La place de l'éducateur dans la relation parent - enfant( Télécharger le fichier original )par Aurélia Véquaud IEPSCF Tournai - Educatrice Spécialisée 2007 |
Introduction..................................................................................................................................................................... 2 - I.L'éducateur et ses outils..................................................................................................................................- 5 - 1 Qu'est ce qu'être éducateur spécialisé ?.............................................................................................- 5 - 2. Les outils de l'éducateur......................................................................................................................................- 9 - 3. Présentation du public concerné.....................................................................................................................- 19 - II La relation parent - enfant.....................................................................................................................- 21 - 1. L'enfant et le père................................................................................................................................................ - 21 - 3. L'importance de chacun des deux parents :............................................................................................... - 30 - III L'éducateur dans la relation parent - enfant..............................................................................- 31 - 2. La relation éducateur - parent....................................................................................................................... - 41 - 3. Quelques modèles dont peut s'inspirer le travail éducatif..................................................................-47- Conclusion.......................................................................................................................................................................- 51 - Bibliographie.................................................................................................................................................................- 53 - La société ne permet pas à chacun de pouvoir réussir, elle rejette de nombreuses personnes qui ne partagent pas la norme collective. Certaines naissent avec une bonne étoile, sont en bonne santé, ont la chance d'avoir des parents attentionnés, soucieux de la bonne éducation de leurs enfants...D'autres viennent au monde avec au pied, un véritable boulet (handicap social, physique, mental). Ces personnes-là devront s'accrocher un peu plus que les autres, devront se prouver à eux mêmes mais aussi montrer à leurs proches que c'est possible, et que le bonheur, le bien-être n'est pas réservé qu'à une seule catégorie de personnes. Le secteur du social m'a toujours intéressé. J'ai toujours voulu travailler en institution, être présente pour les enfants qui traversent des périodes difficiles (manque d `amour, rejet, graves problèmes au sein de la famille...) les aider et pouvoir partager leur quotidien. Le choix de ce métier, s'il n'est pas le fruit du hasard, n'est pas neutre. Je pense que vouloir vivre avec des personnes en difficulté est signifiant. Pour entrer en relation avec un être exclu ou différent, l'éducateur doit être sensible à la souffrance de l'autre, aux problèmes de la personne dont il a la charge, quelque chose qui lui fasse comprendre de l'intérieur, ce que peut ressentir un être humain en grande difficulté. Un éducateur travaille avec sa personnalité et non sur des capacités techniques ou une compétence en matière d'inadaptation, certes utiles mais pas suffisantes. Son action ne repose pas sur un savoir, bien qu'il soit indispensable mais sur une capacité à être en relation dans la vie quotidienne de l'enfant, trouver l'attitude éducative la plus appropriée. Quand on décide de devenir éducateur c'est pour aider les autres. On sait très bien, qu'émotionnellement, cela va être dur. Au fil des années, notre « moi » va être parfois sérieusement interpellé. Travailler en institution implique de travailler dans le quotidien des jeunes en difficultés, il n'y aura pas le bureau du psychiatre ou du psychologue pour nous protéger. On vit la situation avec et à travers le jeune. Ce qui implique que l'éducateur doit être au clair avec ses motivations. Pour ma part, je veux être éducatrice spécialisée depuis que j'ai 14 ans ! Je pense qu'il y a une certaine forme de vécu personnel qui joue mais aussi et surtout une vocation qui est présente depuis longtemps. Familièrement, on pourrait dire que cela me colle à la peau ! Ce travail de fin d'étude porte sur la place de l'éducateur dans la relation parents-enfants. Autrement dit, quelle place, les parents d'enfants placés en institution, accordent-ils à l'éducateur spécialisé et inversement, la place des parents lorsque l'enfant est placé. Pour cela, je me poserai la question : qu'est ce qu'être un éducateur spécialisé ? Quelle est la vision que les gens ont de nous ? Je rappelle donc brièvement la transformation du métier. Ce qu'évoque le mot éducateur avant et de nos jours ? Ensuite, je parlerai de certains outils de l'éducateur, importants pour la relation éducative. En deuxième partie, j'aborderai la place des deux parents aux côtés de l'enfant, pour permettre de comprendre pourquoi la place de l'éducateur peut être une question difficile. Ce passage est important pour comprendre la troisième partie : Qu'est ce qui fait que les parents ont peur de perdre leur enfant avec l'arrivée de l'éducateur dans la famille ? Je ferai la différence entre la relation père - enfant et la relation mère -enfant. Et enfin, je tenterai d'expliquer la place de l'éducateur dans la relation parents/enfants. Comment les parents ressentent « cet intrus » dans leur relation avec leur enfant ? Je parlerai du rôle de référent, de substitut, de pôle identificatoire. Des mots qui peuvent effrayer les parents. Mais aussi de la relation éducateur / enfant et éducateur / parents. Je précise que ce travail de fin d'étude est basé sur des enfants retirés de leurs parents et placés en foyer d'hébergement J'illustrerais mon travail avec mes diverses expériences notamment mon stage de 1ere année effectué à Notre Dame des Anges à Mouscron. Les noms des enfants et professionnels que j'ai pu rencontrer lors de mes différents stages, ont été changés par souci d'anonymat. Je suis bien consciente que ce mémoire n'est qu'une ébauche et qu'il y aurait encore bien des choses à dire et à apprendre. Car il est vrai que travailler dans ce domaine permet un enrichissement personnel. Dans la relation, chacun apporte un plus à l'autre. QU'EST-CE QU'ÊTRE ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉ ?Avant d'aborder cette partie, je vais tenter de vous expliquer « ma » notion du mot éducateur. La profession d'éducateur est mal connue. Elle est bien souvent restreinte à un seul type de population : les éducateurs s'occupent des enfants. Mais ce n'est pas que cela. Les éducateurs travaillent auprès de personnes handicapées, malades mentaux, délinquants, asociaux, toxicomanes...Ils peuvent intervenir dans des foyers, des institutions, des quartiers, des lieux d'accueils, dans les familles, en milieu ouvert, en internat...Les éducateurs spécialisés peuvent prendre en charge des enfants, adolescents, adultes, avec pour but commun de les accompagner, les aider, les soutenir au mieux dans l'appropriation de leur espace physique, psychique et social. Mon domaine d'action serait plutôt le placement familial. Mon analyse s'est faite à travers mes stages en institutions. Je définirai alors mon métier tel que je l'ai perçu dans les différents établissements. - Ecouter, avec attention, précision, respect et surtout sans jugement. C'est-à-dire, que je dois être capable d'écouter un jeune. Je dois me mettre à son niveau pour l'entendre et ne pas toujours lui faire la morale. - Etablir la confiance. Prendre le temps de connaître le jeune qui vient d'arriver dans l'institution. Accepter qu'il nous défie et inversement. - Aider à parler du conflit, il n'est pas question de le gommer, mais plutôt de le nommer, de le comprendre, d'aider à l'éclaircir. Il est nécessaire de prendre un temps pour parler de la cause du placement, afin que le jeune ait la possibilité de comprendre un peu mieux la raison du placement. - Accompagner l'enfant : à travers le quotidien, nous l'accompagnons par des gestes simples ; que ce soit pour la toilette, pour l'école, pour les loisirs etc....Etre présent pour l'enfant comme le feraient ses parents. - Permettre d'exprimer la souffrance : dans le cas du placement familial, il s'agit de la souffrance de séparation et des souffrances antérieures au placement. C'est important pour l'enfant, qui ne comprend pas toujours la raison du placement, qu'il s'exprimer par des cris, des pleurs, des colères, des paroles, des dessins etc.....L'enfant peut parfois avoir des réactions de violence ou de grande tristesse face à l'incompréhension liée au placement. Il a besoin d'être accompagné et compris dans ces moments difficiles. - D'établir ou de rétablir un dialogue : l'enfant ne doit pas se renfermer sur lui-même, l'éducateur doit créer le lien puis le maintenir. Tout en respectant sa liberté, son besoin d'être seul, il faut être attentif et ne pas le laisser se replier sur lui-même. - Définir un projet individuel et/ou professionnel : toute équipe éducative a un projet pour l'enfant, cela permet de le hisser vers l'autonomie. Le but est de veiller, de l'aider, de lui apprendre les choses de la vie, comme le feraient des parents, sauf que nous sommes éducateurs. Je pense que ces 7 points doivent être le fil conducteur de notre profession. Car les parents préoccupés par leurs problèmes personnels ou familiaux, ne sont pas ou plus en mesure de repérer, de voir ou d'imaginer les besoins spécifiques de leurs enfants, différents des leurs. Et c'est là que nous intervenons pour aider les enfants. Les parents sont en difficulté face à l'éducation de leurs enfants. Ils ne sont pas toujours en mesure d'apporter des solutions à leur problème. Un éducateur n'est pas là pour que tout se passe bien. Un silence entre un éducateur et un enfant peut-être tout aussi bénéfique qu'une bonne entente. L'éducateur doit aussi pouvoir « bousculer » l'enfant, le faire réagir. Un éducateur a pour rôle de contribuer, en partie, aux apprentissages essentiels d'une personne pour qu'elle s'inscrive au mieux dans son environnement. Il s'agit d'être présent, d'accompagner l'enfant dans l'institution où il vit, et qui nous délègue une responsabilité. Mais aussi, être à l'écoute, l'aider dans ses apprentissages, lui donner un cadre structurant, le valoriser, l'aider à se construire, à devenir autonome. Il faut aussi lui donner un environnement chaleureux. Etre éducateur, c'est être substitut parental, sans être parent. L'éducateur à un rôle, une mission. Ces deux termes sont très proches et donc difficiles à définir. Rôle, mission, on pourrait penser que ces termes sont équivalents. En fait je pense plutôt que le rôle de l'éducateur se définit plus dans le quotidien de l'enfant. Exemple, c'est notre rôle que de veiller à ce que l'enfant ait bien fait sa toilette, ses devoirs...Je pense que mon rôle est de dire à l'enfant qu'il doit aller à l'école, ma mission c'est de l'aider à y retourner, à l'aide d'un projet. Tandis que la mission, j'aurais plus tendance à penser que cela vient de la hiérarchie. Nous avons une mission auprès des enfants. Quand le juge place des enfants, il nous confie une mission, d'où la présence de projet pour l'enfant. Par exemple la mission peut-être de rescolariser un enfant, cela peut être aussi de prendre le relais des parents, qui peuvent avoir besoin de souffler. Lors du placement, le juge notifie sa décision. La famille D. La demande du juge par rapport au père (ancien drogué), c'était d'avoir totalement cessé de consommer. Il devait se trouver un logement suffisamment grand pour pouvoir accueillir ses deux enfants. Retrouver un travail et le garder. Le travail d'équipe avec ce papa, c'était de lui faire prendre conscience qu'il devait garder un emploi durable, qu'il devait préparer le retour de ses enfants (inscription à l'école, chambres prêtes...) Si le père est conciliant, on lui donne plus de liberté pour les retours. On discute avec lui du programme vacances, ce qu'il compte faire avec ses enfants, on discute aussi des façons d'appréhender les difficultés (si votre enfant vous fait une crise dans un magasin, comment allez vous réagir ?) Notre rôle avec les enfants, était de maintenir la scolarisation, de dédramatiser la situation. On va en équipe se définir des objectifs pour chacun des enfants. - Pour Marine (7 ans) : c'était le suivi scolaire, elle travaillait très bien, il fallait que ça continue. - Pour Aymeric (2 ans) : C'était l'acquisition de la propreté et son évolution C'est notre ligne de conduite ; le fil conducteur. On se définit des objectifs pour remplir notre mission. Une mission c'est sur du long terme. L'éducateur n'est pas seulement celui qui travaille en institution. L'éducateur accompagne une personne en fonction de ce qu'il est, de ce dont il a besoin mais également en fonction de son identité d'éducateur, de sa personnalité propre. Lors de mes premières expériences d'éducatrice stagiaire, je me demandais toujours ce que je devais faire, je cherchais quelque chose de spécial à faire, oubliant que la simple présence et l'écoute sont des qualités de base de l'éducateur. La société nous demande de conceptualiser notre pratique, de nous ressourcer sans cesse par la formation continue, de faire un travail sur nous-même. En bref, il faut continuellement se remettre en question « Aujourd'hui, c'est donc à une profession condamnée à une remise en cause que nous avons affaire » J.L Martinet1(*). Le travail de l'éducateur est flou, peu défini, l'éducateur doit chercher à resocialiser le jeune. Voilà ce que nous demande la société. « L'éducateur spécialisé, sur qui reposent pour l'essentiel des tâches éducatives est chargé en dehors des heures de classe ou d'ateliers, de l'observation ou de l'éducation d'enfants et/ou d'adolescents présentant des déficiences physiques ou psychiques, des troubles du caractère ou du comportement, délinquants ou en danger, confiés par les autorités judiciaires ou administratives ou par les familles à des institutions spécialisées, c'est-à-dire de ce qui est officiellement dénommé l'enfance inadaptée 2(*)» Jean Marie Foucart. Je reviens sur le travail « flou » de l'éducateur. En effet, l'éducateur spécialisé n'a pas de méthode, pas de manuel pour nous donner la réponse à nos questions. Nous avons un fil conducteur défini en équipe lors de réunions. Il faut savoir se mettre d'accord en équipe sur la façon d'amener les choses. (Finir ou ne pas finir son assiette ?) Cela permet de sécuriser l'enfant, chaque éducateur fonctionne de la même façon, il faut une cohérence. Ce fil est l'objectif défini pour l'enfant à travers la mission. Par exemple le juge nous donne pour mission de redonner un cadre structurant à Paul. Je vais mettre en place petit à petit des objectifs pris en accord avec l'équipe. Chaque objectif va se dérouler sur deux semaines par exemple. Le premier objectif sera le respect des heures de lever et coucher, puis si le but est atteint, alors le deuxième sera qu'il arrête de se lever quant on est à table, puis le troisième objectif sera de corriger son vocabulaire grossier et ainsi de suite. Par contre, on ne passe pas à l'objectif suivant si le premier n'est pas atteint, nous aurons peut-être besoin de plus de temps pour certaines visées. De plus, les objectifs se définissent en fonction de priorités. C'est notre fil conducteur et il nous aide à atteindre notre mission : lui redonner un cadre structurant. L'éducateur ne travaille qu'avec son propre savoir-être et savoir-faire, contrairement au médecin par exemple qui lui, dispose d'outils concrets, il y a des remèdes pour chaque maladie. Tandis que l'éducateur spécialisé n'a pas de manuel, il n'est écrit nulle part comment l'éducateur doit réagir face à un enfant triste parce que sa maman lui manque, il n'est écrit nulle part comment un éducateur doit réagir face à un adolescent qui le menace avec un couteau. L'éducateur travaille avec ses « tripes », avec son coeur, avec son expérience, il travaille avec le jeune sur le moment présent. Il fait des projets avec celui-ci, l'aide dans ses différentes démarches au quotidien. Je pense que l'éducateur doit être un appui pour le jeune. Comme dirait Joseph Templier, « Accompagner quelqu'un, c'est se placer, ni devant, ni derrière, ni à sa place, c'est être à côté » Je pense que cette phrase à elle seule résume bien ma pensée de la pratique éducative. Selon moi, un éducateur consiste à accompagner, à soutenir, à encourager un enfant dans sa demande, à parler avec lui de ses réussites et de ses échecs. En travaillant dans le milieu ouvert, l'éducateur travaille avec la famille et dans son environnement. Le cadre et les limites éducatives sont posés de manière plus invisible, ce qui peut améliorer la relation entre un éducateur, qui est porteur de la Loi malgré tout, et un jeune ayant un problème avec l'autorité par exemple. L'éducateur en milieu ouvert à pour rôle d'aider les familles, de les conseiller. Il intervient, en principe, avant le placement de l'enfant, ou, en fin de placement quand il y a un retour en famille de prévu. Parfois, l'éducateur est vécu comme un intrus pour la famille, il est donc difficile pour celle-ci de coopérer avec cet « étranger » qui vient pour « régler ses problèmes ». Cependant la relation peut parfois bien se passer. Il faut installer un climat de confiance. La famille elle-même doit pouvoir accepter de s'impliquer dans le désir d'être aidé. En effet, le jeune est dans son milieu, avec ses repères. Il n'y a pas l'institution que fait office de loi, d'autorité. Et pourtant les éducateurs en milieu ouvert sont aussi porteur de loi et de cadre mais le jeune en a moins conscience. Et c'est peut-être cette subtilité qui favorise l'accompagnement du jeune. Le fait d'intervenir à l'extérieur, dans un lieu neutre, peut rendre la relation de l'adolescent plus facile. * 1 Jean Luc Martinet, Les éducateurs d'aujourd'hui, éd dunod, 1993, page 77 * 2 Jean Marie Foucard, Déviance et société, éd médecine et hygiène, 1992, page 143 |
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