2.2 Megalurothrips sjostedti (Thysanoptera: Thripidae)
Trybom
Le thrips floricole, M. sjostedti a
bénéficié de nombreuses études relatives à
son origine, sa distribution, sa taxonomie, sa morphologie et sa
bioécologie. Aussi des méthodes de lutte ont-elles
été développées pour la gestion de ce ravageur
redoutable au niébé.
2.2.1- Origine et distribution
:
L'espèce Megalurothrips sjostedti a
été rapportée pour la première fois sur le
continent africain, précisément en Afrique de l'Est, au
début du vingtième siècle (1905). Non seulement sa
répartition est restreinte au continent africain, mais il constitue la
seule espèce du genre retrouvée en Afrique (Palmer, 1987).
L'abondance en Asie de l'Est de certaines espèces de ce genre telles que
M. typicus (Bagnall), M. usitatus (Bagnall), laisse
suggérer l'Asie tropicale comme origine du genre Megalurothrips
(Palmer, 1987). Selon Salifu (1986), M. sjostedti est répandu
dans les agro-écosystèmes des pays comme l'Afrique du Sud, le
Bénin, le Cameroun, le Congo Démocratique, la Côte
d'Ivoire, le Gabon, la Gambie, le Ghana, la Guinée Equatoriale,
l'Ouganda et la Tanzanie. Autrefois appelé Taeniothrips
sjostedti, M. sjostedti est la seule espèce ayant le
statut de ravageur des cultures (Palmer, 1987). En Asie de l'Est, cette
espèce n'est pas nuisible aux cultures, puisque ses populations sont
maintenues en dessous du seuil économique des dégâts, par
des ennemis naturels. Cet argument renforce l'hypothèse selon laquelle
M. sjostedti ne soit pas d'origine africaine (Tamo et al.,
1997).
2.2.2- Taxonomie
Megalurothrips sjostedti appartient au super-ordre
des Thysanoptéroides, à l'ordre des Thysanoptères, au
sous-ordre des Terebrantia, à la famille des Thripidae, et à la
sous- famille des Thripinae (Lewis, 1997). Selon Palmer (1987), le genre
Megalurothrips regroupe des espèces facilement identifiables
par leur grande taille. Au stade adulte, ils sont de couleur noire alors que
les stades larvaires sont de couleur variable: blanchâtre, orange ou
rouge en fonction du régime alimentaire. Les mâles de M.
sjostedti sont caractérisés par un segment abdominal de
forme conique, alors que la femelle possède un petit ovipositeur
externe.
2.2.3- Morphologie, Biologie et
Ecologie
Les thrips floricoles sont de petits insectes de couleur
noirâtre de 1 à 2 mm de long, pourvus d'ailes étroites,
allongées et frangées de longs cils. On observe une segmentation
bien distincte des antennes, des pattes et de l'abdomen. De petite taille et
d'un noir pas trop foncé, les mâles sont estimés à
5% de la population, tandis que les femelles très noires, sont plus
grandes et plus abondantes (Tamo, 1991). La photo 1 montre les adultes
mâles et femelles de M. sjostedti.
1,5 mm
Photo 1: Mâle (à gauche) et femelle
(à droite) des thrips floricoles
Source: GOERGEN (communication personnelle)
IITA. Insect Museum, Cotonou Bénin
Selon Salifu (1986), le développement de l'oeuf
à l'adulte dure 19 jours dans les conditions de température de
26,8 #177; 1,4°C et de 65 #177; 10,4% d'humidité relative. Quatre
stades de développement sont identifiés: deux stades larvaires
(larve stade 1 et larve stade 2), un stade de pré nymphe et un stade de
nymphe. Les larves de stades 1 et 2 sont de très petite taille ; leurs
yeux sont rouges net brillants, avec des antennes, des pattes et l'abdomen
courts. Les nymphes se forment dans le sol. En l'absence du
niébé, les thrips se nourrissent et se reproduisent sur plusieurs
plantes hôtes. On y rencontre majoritairement des Fabaceae, quelques
Mimosaceae et Cesalpiniaceae, et une plante non légumineuse,
Cochlospermum planchoni Hook (Bisaceae) (Tamo et al., 1993a).
La photo 2 montre les différents stades de développement de
M. sjostedti.
b
a
1 jour
3 - 4 jours
d
3 - 4 jours
c
g
3 - 4
jours
3 - 4
jours
f
e
2-3
jours
a) Adulte mâle b) Adulte femelle c) oeuf d) Larve
de stade 1 e) Larve de stade 2 f) Pré nymphe g) Nymphe
Photo 2 : cycle de développement M.
sjostedti, à 25°C
Source: Adapté de Tamo (1991).
2.2.4- Méthode de lutte
contre les thrips
La connaissance incomplète des caractères
biologiques de M. sjostedti restreint la gamme des mesures de lutte
contre cet insecte. Toutefois, plusieurs méthodes de lutte ont
donné des résultats appréciables (Sourokou, 1985).
+ Lutte chimique
Les pyréthrinoïdes synthétiques en
formulation simple ou combinée avec d'autres insecticides
contrôlent bien la population des thrips (IITA 1982). Le monocrotophos,
appliqué sur niébé s'est révélé plus
efficace que le fenvalérate et le DDT
(dichlodiphényltrichloroéthane) au sud du Nigéria entre
1973 et 1975. Le cymbush et le mélange cymbush (cypermétthrine) +
diméthoate sont significativement plus efficaces que atellic et
diméthoate. Un test de comparaisons d'insecticides, a conduit à
la conclusion que azodrine assure significativement un meilleur contrôle
des thrips et permet d'avoir de hauts rendements par rapport au DDT et au
sevimol. Le stade critique de menace des ravageurs est atteint à partir
du 37ème jour après semis. Singh (1980) suggéra
des interventions chimiques entre le 35ème et le
40ème jour; cependant, le début de floraison du
niébé dépend de son cycle et de sa sensibilité au
photopériodisme. Malgré leur efficacité, les effets
pervers de ces insecticides font accorder une attention particulière aux
méthodes de lutte plus écologiques (Tissut et al.,
1979).
+ Lutte culturale
Il est préférable que dans un système
d'association maïs-niébé, le maïs soit semé
avant le niébé, de façon que le maïs entre en
floraison avant celle du niébé. Cette pratique contribue au bon
développement du niébé et permet aussi de réduire
les dégâts occasionnés par les thrips. Lors de la
déhiscence des panicules, les méloïdes sont attirés
par les pollens du niébé (IITA, 1982). Par contre Rathore et
al., (1984) rapportent qu'en culture intercalaire, il n'y a pas de
différence significative entre la densité de population des
thrips sur le niébé en culture pure et celle associée au
maïs (IITA/SAFGRAD, 1984).
+ Lutte biologique
En relation avec les questions écologiques, doivent
être abordés, les problèmes des êtres vivants
auxiliaires de l'agriculture, des pollinisateurs et des prédateurs
divers
s'attaquant aux nuisibles. Dans le processus de contrôle
des thrips, des prédateurs et des parasitoïdes ont
été identifiés. Orius amnesius, O.
albidipennis (Hémiptère: Anthocoridae); Cheilomenes
sulphurea (Coléoptère: Coccinellidae), Iphyseius
sp. (Acari : Phytoseiidae) (Tamo et al., 1997) sont des
prédateurs identifiés pour une lutte biologique contre M.
sjostedti. Au nombre des parasitoïdes identifiés pour la
réduction naturelle des populations de M. sjostedti, on peut
citer: Ceranisus menes (Gahan) (Hyménoptère: Eulophidae)
(Diop, 1999), Ceranisus femoratus (Gahan) (Hyménoptère:
Eulophidae) (Agboton, 2004) et des genres de la famille Trichogrammatidae que
sont Megaphragma sp et Oligosita sp (Tamo et al.,
1997). Le tableau 1 présente la liste de quelques prédateurs de
thrips classés par ordre, famille, genre et espèce. Toutefois, la
question de l'efficacité de ces différents auxiliaires contre les
thrips se pose. Alors, des méthodes de lutte culturale et des
variétales sont aussi utilisées.
Tableau 1: Liste des prédateurs de
thrips
Ordre
|
Famille
|
Genre
|
Espèces
|
Proies (Thrips)
|
Orthoptère
|
Gryllidae
|
Oecanthus
|
Longicauda Turanicus
|
Thrips tabaci Thrips tabaci
|
Névroptère
|
Chrysopidae
|
Chrysopa
|
Alobana Carnea Vulgaris Plorabula
|
Selenothrips rubrocinctus Selenothrips rubrocinctus
Odontothrips intermedius Caliothrips faciatus
|
Leucochrysa
|
Marquesi Submacula
|
Selenothrips rubrocinctus Selenothrips
rubrocinctus
|
Hemerobiidae (brown lacewings)
|
Hemero bi us
|
Maliformicus Pacificus
|
Taeniothrips inconsequens Taeniothrips
inconsequens
|
Diptère
|
Cecidomyiidae
|
Adelgimyza Artrocnodax
|
Thripiperda Occidentalis
|
Liothrips olae T. palmi
|
Asilidae
|
Machinu
|
Annuleps
|
Haplothrips sp.
|
Dolichopodidae
|
Condilostylus
|
Pacifus
|
Taeniothrips inconsequens
|
Syrohidae
|
Baccha Mesograpta
|
Livida Marginata
|
Gynaikothrips ficorum Thrips tabaci
|
Chloropididae
|
Lioscinella
|
Sabrosky
|
Teuchothrips sp.
|
Hyménoptère
|
Vespidae
|
Polistes
|
Hebraeus
|
Rhipiphorothrips cruentatus
|
|
Azteca Pheidole
|
Chartifox Megacephla
|
-
Liothrips urichi
|
|
Formicidae
|
Wasmannia
|
Auropunctata
|
Selenothrips rubrocinctus
|
Mesostigmates
|
Phytoseiidae
|
Amblyseius
|
Addoensis
Andersoni Stipulatus Swirskii
|
Heliothrips syvanus
Frankliniella occidentalis, Thrips tabaci
Scirtothrips citri
Thrips tabaci, Retrithrips syriacus
|
Typhlodromus
|
Pyri
Athiase
Occidentalis Waltersi
|
Drepanothrips reuteri Retrithrips syriacus Retrithrips
syriacus Frankliniella occidentalis
|
Source: Van Rijn (2002) et Agboton (2004)
·. Résistance
variétale
Des travaux d'amélioration génétique
développés par l'IITA et INRAB ont permis d'identifier du
matériel résistant aux thrips et d'autres ravageurs (IITA, 1979;
INRAB, 1995). Le tableau 2 présente quelques variétés
résistantes de niébé. IITA (op cite) a
développé des cultivars tels TVu 1509, 2870, 6507, 7133,
remarquables quant à leur degré de résistance. IITA (1982)
suggéra que cette résistance est due à une antibiose
contenue dans le niébé. Les cultivars à floraison
très précoce sont utilisés dans la lutte contre les thrips
parce qu'ils échappent en partie aux attaquent de ces thrips.
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