2. Une prépondérance des données
physiques
a) Bien distinguer les "inputs" et les
"outputs"
La deuxième question de recherche que je suis
amené à traiter porte sur le type de données
utilisées par les outils de gestion environnementaux. La première
hypothèse à ce sujet, nommée H 2.1 est que l'impact
environnemental d'une entreprise soit exprimé à l'aide de
données physiques.
Avant de parler des données utilisées par les
outils, il faut noter qu'un bon nombre de ceux ci comportent des données
entrantes (que l'on peut appeler des "inputs") et des données sortantes
(que l'on peut appeler des "outputs"). C'est notamment le cas des ACV, des
bilans carbone et des tableaux de bord. En schématisant cette
affirmation, on obtient ceci:
Données entrantes: "inputs"
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Données sortantes: "outputs"
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OUTIL
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L'outil servant à rendre des données lisibles,
interprétables, ou à effectuer des analyses, il est possible que
les données entrantes et sortantes ne soient pas du même type.
Il est par exemple possible d'avoir en entrée, des
données physiques et des données financières en sortie: si
on traduit des émanations de carbone par les couts
qu'elles engendrent en taxes. Autre exemple envisageable avec
des données physiques en entrée et des données
qualitatives en sortie: un outil qui permet de fournir une analyse
commentée à partir de chiffres relatifs aux différents
impacts (production de déchets, matières consommées,
rejets...).
b) Des données physiques en
entrée
D'après ce qui a été observé sur
le terrain, les données servant d'inputs aux différents outils de
gestion environnementaux sont bel et bien des données physiques. On
parle de "litres d'essence", de "kilos de gaz", de "kilos
de déchets", de "kilowattheures d'énergie" et
d'autres flux physiques de diverses natures, qui dépendent des
paramètres mesurés.
Tous ces flux vont alimenter les outils. Qu'il s'agisse d'un
bilan carbone, d'une analyse de cycle de vie ou de tableaux de bord, les
mesures de base sont effectuées en données physiques.
Ceci nous permet de valider de manière tout à fait
certaine l'hypothèse H 2.1.
Dans le cadre des tableaux de bord, des données
financières peuvent venir compléter les informations fournies par
les données physiques. Une dépense d'énergie
chiffrée en Kilowattheures peut par exemple s'accompagner d'un suivi des
coûts liés à cette dépense, mais la recherche d'une
meilleure efficience énergétique vise à réduire la
quantité d'énergie consommée (directement
contrôlable) plutôt que son coût, qui dépend à
la fois de la quantité consommée que du prix de l'énergie
sur les marchés (sur lequel les entreprises n'ont pas d'emprise).
c) A la recherche d'unités
pertinentes
Concernant les données entrantes, la recherche
d'efficience passe par la récolte de données les plus
précises possible. A côté de cela, le but des
données sortantes est d'en fournir l'interprétation la plus
pertinente possible. Ces données peuvent être de plusieurs
types:
Dans le cadre d'une ACV, il s'agit d'agréger les
mesures des impacts mesurés tout le long de la chaîne de
production et les répartir sur ses différentes étapes. Les
unités sortantes sont donc identiques aux unités entrantes mais
le point de vue fourni est global et permet de les analyser. On peut par
exemple voir à quelle étape la production des déchets est
la plus importante, quelle étape est la plus gourmande en
énergie... ce qui n'est absolument pas possible en utilisant directement
la multitude de mesures effectuées sur le terrain. La limite de cette
démarche réside dans le fait de ne pas pouvoir comparer entre eux
de façon pertinente les différents types d'impacts.
Le bilan carbone fonctionne sur le même principe mais
convertit cette fois l'ensemble des impacts en équivalent carbone, c'est
à dire qu'au lieu de comptabiliser une consommation de matières
premières (exprimées en poids de cette matière
consommé), on calcule la quantité de CO2 dégagée
pour produire la matière en question. Rien ne change à ce niveau
là vis à vis de notre hypothèse (on a toujours des
données physiques en entrée et en sortie) mais on obtient cette
fois une échelle de comparaison des différents impacts, bien
qu'elle soit centrée sur le carbone, au détriment d'autres
aspects.
d) Les données financières ne permettent
pas de traduire l'impact environnemental
Même si les informations financières peuvent
permettre de compéter des données physiques au sein d'un tableau
de bord, il est clairement apparu que les outils permettant de traduire un
impact environnemental en unités financières ne sont pas mis au
point.
Des outils tels que l'ACV et le bilan carbone
n'intègrent pas du tout l'aspect financier car leur but est justement de
se concentrer sur les flux physiques. Les tableaux de bord les intègrent
parfois mais en tant que complément d'information.
La question de savoir si l'entreprise traduit ses impacts
environnementaux en unités financières, la réponse a
été négative dans tous les cas. D'une manière
générale, aucune recherche d'équivalence
directe entre les unités financières et impacts environnementaux
n'a été mise en avant au cours de l'étude terrain.
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