3.1.2 La Convention d'UNIDROIT (1995)
La Convention a été ratifiée par l'Italie
de 11 octobre 1999 (entre en vigueur le 1 avril2000) et compte jusqu'à
2005 25 Etats contractants4.
La Convention d'Unidroit sur les biens culturels
volés ou illicitement exportés - souvent appelée
Convention Unidroit - a pour ambition de modifier fondamentalement les forces
du marché qui gouvernent les transactions privées dans le domaine
artistique. Elle y parvient en s'attaquant à deux difficultés
majeures qui, dans le commerce contemporain de l'art, empêchent
effectivement les propriétaires légitimes de retrouver et de
récupérer les biens qui leur ont été
volés.
La première de ces difficultés réside
dans les obstacles juridiques qui empêchent de déterminer le lieu
où se trouvent les biens volés et d'identifier leurs
détenteurs. Dans l'état
3 Pernille Askerud & Etienne Clément, op.cit,
p.51
4
Cf. UNESCO ET UNIDROIT-COOPERATION DANS LA LUTTE CONTRE
LEE TRAFIC ILLICITE DE BIENS CULTURELS Conférence pour
célébrer le 10 anniversaire de la Convention de l'UNIDROIT sur
les biens culturels volés ou illicitement exportés, Rome 1995
Paris, Siége de l'UNESCO, 24 juin 2005 UNESCO-Note
d'Information)
actuel de la plupart des législations nationales, ceux
qui participent au commerce d'objets d'art ne sont pas tenus de
révéler le parcours des biens qu'ils mettent en vente. Les biens
culturels et les objet d'art sont les seuls biens négociables de valeur
importante qui ne sont pas soumis à cette obligation, comme c'est le cas
pour les biens immobiliers, les automobiles et les bons du trésor,
à chaque fois qu'ils changent de mains.
La seconde difficulté réside dans les obstacles
juridiques qui s'opposent à la récupération des biens
volés une fois qu'ils sont entrés sur le marché de l'art.
Dans la plupart des législations en vigueur à l'échelle
nationale, il est pratiquement impossible aux propriétaires
légitimes de rentrer en possession d'un bien volé dès lors
qu'il été revendu à un tiers. Les pays ou la
législation est favorable aux propriétaires légitimes,
comme l'Australie, le Canada, les Etats-Unis, la Nouvelle-Zélande, le
Royaume-Uni et quelques autres pays anglophones, sont
l'exception6.
La Convention d'Unidroit s'attaque à ces deux obstacles
en assignant tout bonnement la charge de la preuve aux détenteurs des
biens culturels réputés volés.
La convention établit que le possesseur d'un objet
culturel volé doit restituer celui-ci, qu'il ait ou non
été impliqué dans le vol ou qu'il en ait ou non eu
connaissance.
La Convention ne prévoit de dédommagement en cas
de restitution d'objets culturels qu'à condition que « le
possesseur n'ait pas su ou dû raisonnablement savoir que le bien
était volé » (article6). Aucun texte international
antérieur ne va aussi loin pour persuader les acheteurs potentiels d'art
à chercher à savoir par quelles mains sont passés des
objets qui les intéressent. En fait, cette disposition devrait
convaincre les négociants en oeuvres d'art et les salles des vents
d'établir une documentation précise pour chacun des objets qu'ils
se proposent de revendre. Par ce biais, le Convention d'Unidroit pourrait
exercer à l'avenir une influence majeure, quoique indirecte, sur le
marché de l'art.
La Convention d'Unidroit offre un cadre international pour la
contestation des transactions privées portant sur des oeuvres d'art et
des biens culturels volés, lequel permet entre autres aux demandeurs des
Etats parties à la Convention de saisir la justice dans d'autres pays
signataires en vue de la restitution des biens culturels volés ou
illicitement exportés. Le plus significatif peut-être est que la
Convention d'Unidroit exige sans équivoque la restitution de tous les
objets dont il est prouvé qu'ils ont été volés et,
en cas de restitution, limite les
5
Le droit français en la matière constitue une
exception notable, encore n'es-il pas intégralement appliqué. Cf.
Pernille Askerud & Etienne Clément, loc.cit.
6 Id. p.52
possibilités d'indemnisation à ceux qui prouvent
leur bonne foi (bona fide) et ont cherché avec diligence
à savoir qui était le propriétaire légitime des
biens considérés.
La convention d'Unidroit ne cherche nullement à
entraver le commerce licite de biens culturels. Son but est de lutter contre
les abus dans la circulation internationale des biens culturels et d'asseoir
ainsi le crédit et la réputation du commerce de ces biens.
La Convention contribue par conséquent à la
sécurité du droit dans le commerce international des oeuvres
d'art. Le respect de la diligence, conformément à la convention,
favorise les rapports de confiance entre pays importateurs et pays
exportateurs, facilitant par la même les échanges de biens
culturels à l'échelle internationale. Par ailleurs, la Convention
donne au propriétaire légitime, qu'il s'agisse d'un Etat, d'un
musée ou d'un collectionneur privé, la possibilité de
récupérer un objet volé ou illicitement exporté,
car il peut saisir une juridiction ordinaire.
Pour les musées, la convention d'Unidroit s'inscrit
dans la philosophie du code de déontologie de l'ICOM (Conseil
international des Musées). De nombreux musées agissent
déjà dans le sens de la Convention en n'acquérant que des
pièces dont la provenance est établie. Ils procèdent aux
vérifications nécessaires lors de dons ou de legs en consultant
par exemple le « Art Loss Register »7 ou d'autres banques
de données.
3.1.3 COMPLEMENTARITE ENTRE LES DEUX
CONVENTIONS
La Convention d'Unidroit sur les biens culturels volés
ou illicitement exportés vise à régler certains
problèmes juridiques insuffisamment traités dans la Convention de
1970. Les deux textes sont complémentaires. Alors que la Convention de
1970 vaut à l'échelle intergouvernementale, la Convention
d'Unidroit est un cadre international conçu pour permettre au simple
citoyen de faire valoir ses droits sur des biens culturels ayant fait l'objet
d'un trafic illicite dans le cadre des systèmes judiciaires
nationaux.
La complémentarité des deux Conventions s'illustre
au niveau de l'objet, de la finalité, des intérêts
poursuivis, de la nature juridique, et des procédés
8.
7 Voir plus loin.
8
UNESCO ET UNIDROIT-COOPERATION DEANS LA LUTTE ET LE TRAFIC
ILLICITE DE BIENS CULTURELS, Conférence pour célébrer le
10 anniversaire de la Convention de l'UNIDROIT sur les biens culturels
volés ou illicitement exportés, tenu au Siège de l'UNESCO,
le 24 juin 2005 (Note d'Information)
3.2 Les Recommandations de l'Unesco
La Conférence générale de l'UNESCO a
également adopté plusieurs textes juridiques internationaux qui
ne sont pas des conventions. Il s'agit de « recommandations ». Les
Etats ne sont pas liés par les dispositions des recommandations, mais
celles-ci indiquent clairement quelles sont les normes internationales
généralement admises dans tel ou tel domaine. Les Etats sont donc
invités à s'en inspirer lors de la rédaction des
dispositions législatives et réglementaires nationales.
Plusieurs de ces recommandations peuvent contribuer à
faciliter l'adoption de mesures de lutte contre le trafic illicite des biens
culturels, par exemple, la Recommandation de 1956 définissant les
principes à internationaux à appliquer en matière de
fouilles archéologiques, la Recommandation de 1976 concernant
l'échange international de biens culturels et la Recommandation
de 1980 pour la protection des biens culturels mobiliers.
3.3. Les législations nationales :
La plupart des pays du monde ont adopté des lois visant
à protéger leur patrimoine culturel. Mais, dans bien des cas,
cette législation n'est pas suffisamment élaborée pour
leur permettre de lutter efficacement contre le trafic illicite. De plus,
beaucoup n'ont pas les moyens d'assurer l'application effective de ces textes,
alors que les risques de vol et d'exportation illégale d'objets
culturels s'aggravent.
La Convention de 1970 ne manque pas de rappeler dans son
Préambule que : chaque Etat a le devoir le patrimoine
constitué par les biens culturels existant sur son territoire contre les
dangers de vol, de fouille et d'exportation ;
Et que chaque Etat a le devoir de protéger le
patrimoine constitué par les biens culturels existant sur son territoire
contre les dangers de vol, de fouilles clandestines et d'exportation illicite,
Considérant que, pour parer à ces dangers, il est indispensable
que chaque Etat prenne davantage conscience des obligations morales touchant au
respect de son patrimoine culturel comme de celui de toutes les
nations.
Les pays signataires sont tenus d'adopter les mesures
énoncées dans la convention et de mettre leur législation
nationale et autre disposition en conformité avec celle-ci. Il
appartient à chacun de décider souverainement des mesures
à adopter et de veiller à ce qu'elles soient bien compatibles
avec le système juridique national.
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