a) Les médecins
Je vais dans un premier temps présenter les arguments
des médecins qui sont opposés à l'autoprescription, puis
j'expliquerai les éventuels enjeux qui peuvent inverser la balance des
médecins généralistes.
Le réflexe des Français malades est de
consulter son médecin afin qu'il établisse un diagnostic et qu'il
prescrive des médicaments PMF ou PMO. Cette visite permet au patient
d'être bien couvert au niveau des dépenses maladies mais alourdit
parfois ces couvertures abusives et provoquent, parmi d'autres dépenses,
un déficit de la caisse d'assurance maladie.
L'État demande aux professionnels de santé de
participer à la « responsabilisation » des patients sur leur
capital santé. Pourtant, les médecins sont plutôt contre
l'automédication car elle fragilise et limite les visites chez eux. Ils
tiennent à leur liberté de prescription, mais elle n'est
défendable que s'ils prennent soin d'être bien informés, y
compris sur le plan économique.
Le principal argument qu'ils défendent est le retard
de diagnostic sur des patients qui se sont automédiqués sans
être passé par une consultation de médecin
généraliste. Pour mieux comprendre leur opinion, j 'ai
interviewé un médecin généraliste qui se
positionnait parmi les médecins généralistes contre
l'automédication : Le Dr Fkatchouck Nicolas.
Lors de l'Interview, mes questions portaient sur
l'intérêt de l'automédication en France, sur l'aspect
« promotion institutionnel » pour responsabiliser le patient de
l'État et que le côté réticent des médecins
à l'égard de l'automédication. Les
questions/réponses étant courtes, je les ai directement
intégré ici.
Interview du Dr Fkatchouck :
Quel est le rôle du médecin dans
l'automédication ? Qu'en est-il par rapport aux pharmaciens ?
Dr Fkatchouck : Sur une consultation, un Français
prend rendez-vous avec le médecin soit pour récupérer des
médicaments, soit c'est un moyen de se rassurer qu'on a rien de grave
sur les symptômes qu'il manifeste. Le médecin se veut
éducateur de pathologie car il en a l'expertise. Le pharmacien peut
également l'être mais n'aura pas le temps devant une longue file
d'attente puis pas
de lieu intime pour parler des maladies à tenir compte
pour prendre un médicament.
Que pensez-vous des nouvelles mesures prises par
l'État pour encourager l'automédication en France ?
Il existe un Lobbyisme puissant qui fait que l'État et
l'AFSSAPS se soucient davantage de l'aspect économique que de l'aspect
santé. Pour les problèmes de la santé publique, il faut
raisonner sur une finalité de soin et non d'économie.
Pourquoi êtes-vous contre l'automédication
?
Tant d'années les médecins avaient prescrit des
médicaments « curatifs » et dit de « confort » pour
le patient. Les médicaments nécessaires sont les « curatifs
». Les autres ne traitent pas la maladie, mais permet de la supporter plus
facilement jusqu'au rétablissement.
Les français ont toujours consommés beaucoup de
médicament dont ceux dit de « confort ». Ces
médicaments ne soignent pas la maladie mais permet de mieux la supporter
jusqu'à la guérison. Pour le public français, il n'y a pas
de distinction entre les catégories de médicaments puisque la
totalité d'un traitement était prescrit. Avec les
déremboursements, on repère tout de suite les médicaments
dit de confort car ils sont, pour la plupart, déremboursés.
Pour les dossiers santé, fiches pratiques et conseils
de pathologies sur Internet, les patients ne verront très souvent, que
le côté négatif et ils ont un manque d'expertise qui font
qu'ils ne peuvent vraiment bien s'automédiquer. L'autodiagnostic seul
est dangereux pour le patient car ce dernier ne peut avoir un esprit critique
comme le professionnel de santé, il aura tendance à s'accrocher
aux effets négatifs alors qu'il n'y a peut-être pas lieu
d'être.
Quelle serait la solution idéale pour faire de
l'automédication malgré tout ?
La solution serait de faire une campagne
télévisée sur les informations à tenir compte pour
s'automédiquer ou voir son médecin. Il serait intéressant
de préparer des formations par les médecins pour informer les
malades sur les pathologies existantes, sur les précautions à
prendre pour prévenir des symptômes...
En conclusion de cette interview, les principales raisons qui
poussent les médecins contre l'automédication sont : les retards
de diagnostics, le raisonnement de l'État sur une finalité
d'économie et non de santé publique mais aussi un conseil
médical risqué du pharmacien avec le peu de connaissance qu'il a
sur le dossier d'un patient dans une pharmacie. Le médecin a
également un rôle d'éducateur concernant différentes
pathologies, il veut aider ses patients à en savoir plus
mais par manque de temps, il ne peut pas répondre
à toutes les questions.
Le problème est de fournir à ses patients des
informations issues d'expertises (donc de médecins ou de pharmaciens)
qui leur permettra de savoir s'ils doivent s'automédiquer ou pas.
Selon le médecin, il vaut mieux perdre 15 minutes de
consultation avec le médecin généraliste et être
sûr d'avoir telle ou telle maladie plutôt que s'automédiquer
en évaluant à peu près les symptômes ressentis. La
priorité ne doit pas se faire sur le temps où l'économie
mais sur la qualité et la certitude du problème santé du
patient. Telle est la vision de ce médecin, une vision que partagent les
autres médecins généralistes.
L'automédication implique une diminution des visites
systématiques chez le médecin, pourtant cela lui permet par
exemple d'alléger son emploi du temps en consultation et de consacrer
plus de temps à chaque patient. D'autres médecins acceptent de
jouer le jeu tant qu'on ne les accuse pas de mauvaise utilisation : « Les
médecins sont plutôt "pour" à condition que la
société ne fasse pas peser sur eux la responsabilité d'un
mauvais usage des médicaments pris sans consultation » du journal
Le Figaro en 2007. Un autre point positif de la part de ces médecins
concernant les déremboursements de médicaments PMF.
Selon les sources d'IMS Health, les médecins
continuent à prescrire des produits qui ont été
déremboursés et qui entrent dans le domaine de l'OTC. Ainsi,
« 8,5 % de la PMF non remboursable » est prescrite.
Bien que ces médecins soient minoritaires en faveur de
l'automédication, un grand nombre continue de prescrire des
médicaments de PMF même si celle-ci a diminué de
moitié, après les déremboursements. C'est pour eux, un
moyen de répondre à leurs attentes mais aussi de les aider
à se soigner seul quand cela est nécessaire. De plus, c'est une
action volontaire significative si l'on prend en compte la difficulté
d'accès à des bases de données rapidement mises à
jour, à l'absence d'inscription du niveau de SMR dans les bases de
données et au peu de communication sur les décisions politiques.
Ce sont des procédures qui rendent difficile le suivi dans la pratique
quotidienne de la prescription du médecin.
En résumé, les médecins assurent que
leur diagnostic lors de premiers symptômes bénins chez un malade
est plus recommandé que de laisser les patients à leur propre
autoprescription. Il est très important, pour eux, de ne pas
négliger les effets secondaires et les retards de diagnostic que
l'automédication peut engendrer. Et surtout, il n'est pas question de
parler d'automédication dans un dessein financier, non, la
réflexion doit se porter sur une solution en termes de soins.
Néanmoins, une minorité de médecin se porte favorable
à l'automédication car elle permet de les soulager de
consultation, de participer à la santé publique
de l'État et de consacrer plus de temps au malade.
Les médecins ne sont pas les seuls à se porter
réticents à l'automédication. Les associations de patients
et quelques malades ne veulent pas concilier avec cette pratique. Pourquoi ?
C'est ce que nous allons voir dans cette dernière partie.
b) Les associations de patients et quelques patients
réticents...
Les associations de patient ne sont pas opposées
à l'automédication tant que celle-ci est bien encadrée au
niveau de la communication Santé Grand Public.
Parmi les associations de patients, je peux citer le CISS :
Collectif Inter associatif sur la Santé, regroupe des associations
intervenant dans le champ de la santé à partir des approches
complémentaires de personnes malades et handicapées, de
consommateurs et de familles. Leur but est de défendre l'opinion des
patients et de la rapporter aux différentes instances de
santé.
D'après un communiqué de presse sur leur site
représentatif, le CISS n'est pas contre l'automédication,
cependant souhaite que l'État apporte plus d'informations et de
transparence aux malades sur trois points. Le premier est d'améliorer
les notices incluses dans les boîtes de médicaments PMF, de
privilégier des données simples dans un langage accessible
à tous. Le deuxième point concerne une éventuelle campagne
de communication institutionnelle mettant en avant la dangerosité de
consommer trop de médicament et en privilégiant le contact avec
le médecin si l'automédication ne marche pas. Et enfin, le
troisième point concerne la crainte de voir les prix des PMF en vente
libre augmentée.
Sur le site Internet de l'Internaute25, on
retrouve beaucoup de sondage dont un qui m'a paru très
intéressant « pour ou contre l'automédication? », j'ai
pu trouvé des avis négatifs, cependant ce sont des avis
personnels de 2 ou 3 personnes, ils n'engagent en rien la pensée des
patients en général. Voyons quels sont leurs raisons :
« les associations de consommateurs dénoncent
les pratiques inflationnistes des laboratoires pharmaceutiques : dès
qu'un produit est déremboursé, son prix, jusque-là
encadré par l'Assurance maladie, s'envole » extrait de
l'article sur «
Notretemps.com » en Septembre
2007.
Certains consommateurs se plaignent du prix imposé par
les laboratoires suite aux déremboursements, cependant ils ne savent pas
que les TVA et bon nombre d'entités qui caractérisent le
médicament change lors des déremboursements. Tout ceci peut
paraître transparent et expliqué mais aux yeux des patients, il y
a un problème sur la hausse des prix. Un autre patient
25 Voir Bibliographie, Site Internet
donne son opinion : « quel est le patient capable de
faire le diagnostique de sa maladie, comment seront appréhendés
les risques d'interactions médicamenteuses ainsi que les contres
indications ».
De manière globale, les patients sont contre car ils
craignent des interactions nocives pour leur organisme suite à des
mélanges de médicaments ou tout simplement suite à des
abus. La citation ci- dessus extraite du sondage, revient très souvent
comme réponse en « contre automédication ». Ayant
crainte des risques de iatrogénie, les patients n'osent pas
s'automédiquer et préfèrent demander conseil à un
professionnel de santé.
D'autres pensent que les médicaments ne doivent pas
être pris à la légère :
« Totalement contre l'automédication, je suis
secrétaire médicale. Exemple: imaginons un instant un patient qui
tousse, va aller à la pharmacie, va acheter un antitussique. Les
antitussiques empêchent de tousser mais ne soignent pas ».
On retrouve dans cet exemple la nuance qui peut exister avec
les médicaments dits de « confort » qui soulagent un peu mais
qui ne sont pas curatifs. Il semble que la patiente parvient à
distinguer les deux mais sans doute parce qu'elle est secrétaire
médicale et qu'elle s'y connait dans le domaine de la santé.
En conclusion, la volonté des associations de patient
va dans le sens de l'AFIPA qui souhaiterait faire une campagne institutionnelle
sur l'automédication responsable mais la finalité n'est pas la
même. Les associations de patients veulent des informations rassurantes
pour pratiquer de manière correcte l'automédication alors que
l'AFIPA voit un moyen de pousser les patients à acheter des
médicaments PMF et ainsi à participer à leur recette. Les
patients réticents, quant à eux, restent méfiants
vis-à-vis des interactions de médicament et reste prudent sur
leur santé en demandant toujours conseils auprès d'un
professionnel de santé.
Après avoir passer en revue l'ensemble des acteurs de
santé, nous pouvons comprendre que l'évolution de
l'automédication passent par divers facteurs qui vont soit dans le sens
de la promotion, soit vers la crainte d'une mauvaise utilisation du
médicament.