2) Médicaments d'automédication, PMF ou
OTC
Il est important de donner toutes les appellations de
l'automédication pour comprendre ces termes dans l'actualité.
a) Les PMF et les PMO
On distingue les médicaments qui sont prescrits par le
médecin sur ordonnance et ceux qu'on se procure en pharmacie sans
ordonnance, avec ou sans conseil du pharmacien.
La définition qui suit s'inspire du rapport sur
l'automédication d'Alain Coulomb en 2006. Ce rapport a été
rédigé par Alain Coulomb, ancien directeur de la Haute
Autorité de Santé (HAS), et le Professeur Alain Baumelou suite
à la demande de l'ancien ministre de la santé Xavier Bertrand,
Ministre de la Santé et des solidarités. Xavier Bertrand a
commandé ce rapport en juin 2006 car il est apparu nécessaire,
dans un objectif de santé publique de clarifier et d'organiser les
pratiques de l'automédication en France. Le document donnait donc un
état des lieux de l'automédication en France.
L'avis du 27 mai 2005 rappelle les
caractéristiques aux fabricants des médicaments de prescription
médicale obligatoire (PMO), et celles des médicaments de
prescription médicale facultative (PMF).
Les PMO « Prescription Médicale Obligatoire »
nécessitent une ordonnance pour qu'un médicament soit
délivré au patient. Les PMO représentent la
majorité des médicaments (Environ 80 % sur le marché total
contre 20 % des PMF).
Les médicaments d'automédication font partie des
PMF (Prescription Médicale Facultative). Ils correspondent aux
médicaments qui peuvent être délivrés sans
ordonnance. Cependant, rappelons que les médicaments « PMF »
peuvent être délivrés sur ordonnance, afin d'être
remboursés par les organismes sociaux.
Les médicaments « PMF » sont
caractérisés par le fait qu'ils ne présentent pas de
danger direct ou indirect lié à la molécule qu'ils
contiennent si l'on suit bien les doses thérapeutiques
recommandées et même s'ils sont utilisés sans surveillance
médicale.
De manière générale, les molécules
de ces médicaments sont évaluées « tolérables
» et non offensives à notre organisme et donc susceptible
d'être consommées sans l'avis d'un médecin
généraliste ou spécialiste. Ces médicaments
dotés d'une AMM, bénéficient d'une garantie issue d'une
autorité compétente, en France, il s'agit de
l'AFSSAPS.
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Schéma résumé des PMF
Sur le schéma que j'ai réalisé ci-dessus
à l'aide du rapport de Alain Coulomb sur l'automédication, on
retrouve un résumé de tous les types de médicaments
délivrés en pharmacie, on retrace le parcours d'un
médicament à partir de son Autorisation de Mise sur le
Marché : L'AMM. Ce qu'on appelle automédication c'est
l'ensemble des PMF remboursables et non remboursables qui sont achetés
sans ordonnance ou sans prescription. Autrement dit, l'achat d'un
médicament de ce type en pharmacie est directement effectué aux
frais du patient et ne sera pas remboursé.
b) OTC, « Over The Counter » : Devant le comptoir
Cette appellation n'avait pas vraiment de place dans la
société française jusqu'à présent car on
n'avait jamais envisagé que les médicaments PMF soient
disponibles « devant le comptoir ». Cet acronyme vient des
États-Unis où l'on trouve, effectivement, ces médicaments
devant le comptoir des officines et donc sans « l'obstacle » que peut
être le pharmacien. Ici, OTC signifie : Over The Counter, ce sont
uniquement les médicaments d'automédication situés devant
le comptoir du pharmacien.
Néanmoins, le gouvernement a récemment
autorisé 226 catégories de produits d'automédications
à passer devant le comptoir des pharmacies7... Cette
appellation prend désormais
7 Donnée issue d'articles de presse « Le
Quotidien du pharmacien », voir Bibliographie
tout son sens. Ainsi, OTC et PMF représentent la
même catégorie de médicaments d'automédications.
3) Contexte
a) État des lieux
La France est le pays qui consomme le plus de
médicament en Europe, soit près de 1,9 médicaments par
semaine pour un Français contre 1,5 en moyenne pour les autres
européens. Une consommation qui est conséquente suite au
développement de nouvelles pathologies comme celles qui sont
liées au vieillissement de la population...
Un résultat qui peut également être
expliqué par notre système de santé. Ce dernier rembourse
à plus de 50% un médicament (PMF et PMO). La
sécurité sociale a ainsi, déboursé en 2006, plus de
20,3 milliards d'euros. Les autres systèmes de santé
européens remboursent environ 30 % des médicaments prescrits sur
ordonnance alors qu'en France, on compte 70 %. On comprend alors pourquoi les
Français consultent leurs médecins régulièrement en
cas de maladie (même bénignes mais persistantes), étant
donné que les médicaments prescrits sont remboursés.
Cependant, le gouvernement rencontre des difficultés
de financement de leur caisse d'assurance-maladie. Les nouvelles technologies
de pointe en médecine sont très coûteuses et
l'accroissement du vieillissement de la population entraîne des prises en
charge médicales plus importantes. Si le progrès et le
bien-être des Français semblent être atteints, il en est
loin en ce qui concerne son financement. Pour réduire les
dépenses de santé, l'État recherche de nouvelles solutions
comme celle de dérembourser un bon nombre de médicaments PMF,
c'est-à-dire les produits d'automédications. Les
médicaments déremboursés ont des critères
particuliers.
b) Quels sont ces médicaments déremboursés
?
Il faut savoir que chaque médicament à deux
niveaux d'évaluations : Le Service Médical Rendu (SMR) et
l'Amélioration du Service Médical Rendu (ASMR) qui sont
notées par la Commission de
transparence8.
Le SMR est un indice d'évaluation qui varie en fonction
de l'efficacité, de ses effets indésirables, de sa place dans un
traitement thérapeutique, mais aussi de son intérêt pour la
santé publique. Son évaluation peut être du type :
Insuffisant, faible ou modéré. On compte aujourd'hui 20 % de
médicaments avec un SMR insuffisant.
8 La Commission de transparence est issue de l'AFSSAPS
qui réglemente entre autres les médicaments.
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L'ASMR, quant à lui, indique le degré de
pertinence d'un nouveau médicament par rapport aux médicaments
déjà existant pour traiter un même symptôme. Son
indice allant de 1 (signifie alors qu'il y a un progrès majeur) à
5 (signifie qu'il n'apporte rien par rapport aux médicaments
existants).
De manière générale, un médicament
au SMR insuffisant est un médicament qui n'est pas assez efficace par
rapport à tous les symptômes que présente la maladie
traitée. Cependant, cela ne veut pas dire qu'il n'est pas efficace sur
un ou deux symptômes d'une maladie. Ses propriétés
thérapeutiques sont donc limitées, mais elles restent efficaces
sur certains symptômes.
En 2001, la prise en charge des médicaments à
SMR insuffisant par la Sécurité Sociale a baissé. De plus,
une décision de la communauté administrative a
complété la liste de médicaments à SMR insuffisant
qui étaient encore remboursables à 65%. Ainsi a eu lieu la
première vague de déremboursement. Elle ne concernait que les
médicaments présentant un SMR insuffisant. Il peut s'agir de
médicaments obsolètes, ne méritant plus de conserver des
prix élevés, mais aussi de médicaments
considérés comme « bas de gamme » par le public. Cette
décision a lancé quelques débats sur le web. Par exemple,
sur le blog de RTL dont l'un des sujets du jour était
l'automédication, on a pu retrouvé les critiques du grand public.
Sur les commentaires de ce sujet, j 'ai pu voir des remarques de type :
« On dérembourse au prétexte de S.M.R
insuffisant et l'on souhaiterait que ces mêmes produits inefficaces pour
être remboursables soient efficaces en vente « libre ».
Le patient semble être perdu entre les différents
discours de l'État. En effet, sous prétexte qu'un
médicament a un SMR insuffisant, L'État le dérembourse,
cependant, le patient qui désire acheter ces médicaments devenus
désormais PMF, porte également le jugement que n'étant pas
un médicament qui a satisfait auprès de l'AFSSAPS (car c'est
l'AFSSAPS qui porte l'évaluation et définit le SMR d'un
médicament), il n'a aucune raison de l'acheter. La communication et le
vocabulaire du SMR ne semble pas être assez clair pour comprendre qu'il
s'agit de médicament de confort. Certes, un médicament de confort
mais ce médicaments PMF, bien qu'il ne soit pas efficace à 100%,
apporte tout de même une cure satisfaisante et ainsi il peut avoir sa
place dans l'armoire à
pharmacie.
En avril 2003, les mesures économiques continuent, et
incluent cette fois-ci à la liste des médicaments dont le SMR est
« modéré ou faible ». Plus de 617
médicaments9 voient ainsi leurs taux de remboursement
baissés. La même année, J.F. Mattei, ministre de la
santé de l'époque, présente une liste de
médicaments à SMR insuffisants pouvant être
déremboursés par la Sécurité Sociale. Ces
déremboursements ont eu lieu en trois étapes entre 2003 et
2005.
Les Français bénéficient avant tout des
médicaments d'innovations récentes. Cependant, en
déremboursant des médicaments de types SMR « insuffisant
» l'idée de médicaments « secondaires » ou «
obsolètes » prêtent à confusion.
« S'automédiquer » reviendrait à
utiliser à nos propres frais des médicaments que l'État et
les instances réglementaires de santé ont jugés peu
efficaces et non satisfaisants ?
D'ailleurs, des incidents ont déjà eu lieu comme
celui du médicament déremboursé Celebrex en Belgique,
l'anti-inflammatoire vedette du laboratoire pharmaceutique Pfizer. Celui-ci
était accusé d'augmenter les risques cardio-vasculaires du
patient et a tout de même était déremboursé.
L'indépendance et la rigueur des autorisations de mise
sur le marché sont suspectés ainsi que le laboratoire. Les SMR
qui sont remis en cause sont réévalués par les instances
de sécurité sanitaire.
D'autres remarques de patient confirment cette tendance en
laissant des commentaires sur le blog de RTL suite à une émission
radio dont l'un des sujets du jour était « l'automédication
» (Voir Figure 3 en annexe). Certains n'étaient pas d'accord pour
le déremboursement d'une partie des médicaments car cela
remettait en cause leur jugement sur l'efficacité du médicament
qui est souvent qualifiés de médicament « non
nécessaire ».
Pour éviter la polémique sur ce sujet et
développer l'automédication, l'État veut lancer l'adoption
d'une nouvelle attitude avec l'expression : « une automédication
responsable ».
Le terme « d'automédication responsable » est
très souvent relayés dans les médias mais également
par l'AFIPA, le LEEM, les professionnels de santé et est même
utilisé dans le rapport d'Alain Coulomb pour le ministre de la
santé. Cette expression définit la capacité
à se soigner seul suite à un autodiagnostic en allant chercher
des médicaments de type PMF à la pharmacie.
L'OMS donne sa définition : «
L'automédication responsable consiste pour les individus à
soigner leurs maladies grâce à des médicaments
autorisés, accessibles sans ordonnance, sûrs et efficaces dans les
conditions d'utilisation indiquées ». Un mouvement que
l'État, l'AFIPA, l'EMEA (l'Agence européenne des
médicaments) et d'autres organismes en faveur de
l'automédication
9 Source d'un communiqué de MG France :
Fédération Française des Médecins
Généralistes
cherchent à promouvoir en France. Le but est de donner
aux patients une plus grande indépendance sur leur santé et
d'agir en conséquence mais aussi de participer à
l'économie de la caisse d'assurance maladie.
D'après l'article des Echos de 2008,
l'automédication n'est pas habituel en France si l'on regarde les
chiffres de nos voisins européens qui dépensent 40 à 60
euros sur les PMF contre 25 euros pour les Français. Pourquoi les
français n'ont-ils pas le même engouement?
Une hypothèse : le remboursement des médicaments
sur ordonnance peut sans doute expliquer ces résultats. Le
système de santé français dont l'OMS a qualifié de
meilleure système de santé au monde, rembourse à plus de
50% les médicaments sur ordonnance. Ainsi, les patients n'ont pas
l'habitude de se soigner seul avec l'automédication. De plus, les autres
pays européens n'ont pas de système de santé qui rembourse
à plus de 20% les médicaments issus des ordonnances.
Un article du journal « Le Monde » de 2006
évoque également cette hypothèse et plus
précisément sur le comportement des malades. Selon cet article,
le malade a pris l'habitude de toujours consulter son médecin au moindre
signe d'une pathologie. Il est alors plus simple d'aller voir le médecin
pour se faire rembourser les médicaments (y compris les PMF)
plutôt que d'aller directement à la pharmacie.
Le thème de l'automédication est de plus en plus
présents dans les médias, ce sujet semble se développer en
France mais est-ce que ce marché est en réelle hausse ?
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