Section 2 Exigences et implications Structurelles de la
titrisation
La titrisation est un montage financier qui, pour assurer la
protection des investisseurs et garantir le succès de
l'opération, doit respecter un certain nombre d'exigences. Pour ce
faire, elle implique la participation de plusieurs acteurs.
1. Montage de la titrisation et ses acteurs
Ce paragraphe récapitule les principaux acteurs d'une
opération de titrisation et précise le rôle joué par
chacun d'eux. Certains acteurs sont concernés par la mise en place et la
gestion de l'opération de titrisation. D'autres fournissent directement
des rehaussements de crédit.
1.1 Le cédant
C'est un établissement de crédit qui
désire transférer au marché ses créances. Ce n'est
pas exclusivement les banques. Dans la plupart des pays, les autorités
de surveillance établissent la liste des établissements de
crédits autorisés à pratiquer la titrisation des
créances. Ce peut être les banques bien entendu mais aussi les
fonds généralistes ou spécialisés, les compagnes
d'assurance, les grandes entreprises ou les entités publiques. Selon
HALL, STUART, COUSSERAND, KOEPPEN-MERTE et NAKATA (2004), la
performance satisfaisante d'une transaction de titrisation nécessite au
préalable que différentes parties prenantes remplissent leurs
engagements respectifs. De toute évidence, la qualité du
cédant est un important point de départ pour toute
opération de titrisation. Les standards et les normes suivies par le
cédant lors de la mise en place des crédits déterminent la
qualité de ceux-ci. Il est donc de la responsabilité du
cédant de montrer que les crédits dont la titrisation est
envisagée respectent bien les critères fixés par les
agences de notation ou par la réglementation et la documentation
appropriée desdits prêts est en place.
1.2 Le Fonds Commun de Créances
L'opération de titrisation nécessite la
création ou l'existence d'une entité (en France le fonds
commun de créances (FCC)) à qui l'établissement de
crédit cède des créances contre des liquidités.
Le fonds procède en contrepartie à l'émission des
parts. Il encaisse ensuite les intérêts et les remboursements
versés par les débiteurs initiaux et les utilise pour
rémunérer et rembourser les titres émis et couvrir les
frais de gestion. Juridiquement, le fonds commun de créances
est dépourvu de la personnalité morale. Ce n'est ni une
société ni une indivision mais une copropriété de
créances caractérisée par une pluralité
d'investisseurs, une quote-part d'actif proportionnelle au nombre de parts et
une gestion confiée à une société de gestion.
Le FCC pourrait emprunter pour prévenir le retard de
paiement provenant des créances, faire face à
l'impossibilité temporaire de maintenir le volume des émissions
de parts, couvrir un besoin temporaire de liquidités, couvrir le risque
de défaillance. Le recours à l'emprunt à titre
exceptionnel doit être cependant strictement réglementé et
ne doit aucun cas entraîner une dégradation du niveau de
sécurité offert aux porteurs de parts. L'objet exclusif du FCC
est l'acquisition par émissions de titres de créances
détenues par les établissements de crédit. Le FCC
s'interpose entre l'investisseur et le cédant. En cas de
faillite de celui-ci, le FCC continue d'exister et les investisseurs sont
assurés d'avoir accès aux flux financiers
générés par le portefeuille d'actifs acquis.
Afin de faciliter l'analyse du risque lié au
portefeuille, c'est à dire de prévoir les flux financiers, les
créances cédées sont de préférence de
même nature tel que : un portefeuille de crédits
hypothécaires résidentiels, un portefeuille de crédits
hypothécaires commerciaux ou un portefeuille de crédits
liés à des opérations de location financement sur machines
etc.
Le FCC est constitué par ses deux cofondateurs, le
dépositaire et le gestionnaire :
1.2.1 le dépositaire
(trustee)
Société commerciale ayant pour unique objet la
gestion du FCC, elle doit être agréée par les
autorités de surveillance. Sa mission est d'assurer le fonctionnement du
FCC, de représenter les porteurs de parts, de calculer
périodiquement les sommes qui leur sont affectées afin de donner
au dépositaire les instructions relatives aux paiements. Il calcule les
distributions dues aux investisseurs. Elle administre le FCC. Il est
dépositaire des créances acquises par le fonds ainsi que de sa
trésorerie. Il est donc responsable de la conservation des titres de
créances et de la trésorerie du fonds. Il s'assure de la
régularité des décisions prises par la
société de gestion dont il contrôle les opérations.
Il peut placer temporairement les liquidités du fonds sur des placements
qualifiés de sans risque.
1.2.2 le gestionnaire ou l'organe de
gestion (servicer)
Il joue un rôle important en maintenant la
qualité du crédit une fois que la transaction est lancée
et en cours. Il collecte les règlements des débiteurs
cédés (intérêts et principal) et est chargé
de la remise des fonds collectés au dépositaire. Il suit les
performances du panier et peut-être amené à le gérer
conformément aux restrictions du contrat. FENDER et MITCHELL
(2005) insiste particulièrement sur sa performance, source de
risque hors défaut. En effet, le laxisme et le manque de vigilance du
recouvreur, à l'origine d'une série de défaut, peuvent
occasionner des pertes plus substantielles que prévu. HALL,
STUART, COUSSERAND, KOEPPEN-MERTE et NAKATA (2004) ajoute que le
risque du gestionnaire est particulièrement élevé dans les
pays où cette sous-traitance n'existe, obligeant le cédant
à cumuler ce rôle. Les agences de notation ont commencé
à tenir compte de la solidité du gestionnaire lors de
l'attribution de la note.
1.3 L'arrangeur (manager)
Il joue le rôle le plus important dans
la mise en place du FCC. Il prépare le dossier de présentation de
l'opération aux autorités de surveillance avec le
dépositaire et le gestionnaire. Il évalue les créances,
les flux qu'elles doivent générer et négocie avec l'agence
de notation. Généralement une banque d'affaires ou une maison de
titres spécialisée, l'arrangeur sollicite les cédants
potentiels, imagine la structure de toute l'opération de
titrisation afin que les objectifs du cédant soient
atteints et que les intérêts des acheteurs soient
suffisamment clarifiés pour que le produit de la titrisation
rencontre une demande effective. De plus, il s'occupe le plus souvent de la
syndication des parts ou de leur placement. Pour HALL, STUART,
COUSSERAND, KOEPPEN-MERTE et NAKATA (2004), la qualité de
l'arrangeur est l'un des principaux déterminants
de la performance de l'opération. Il a la responsabilité de
neutraliser les conflits d'intérêts inhérents à la
transaction. Les agences de notation prennent un temps considérable pour
apprécier sa qualité, sa structure organisationnelle, son
expertise, la stabilité de son staff. Les performances passées de
l'arrangeur lors des précédentes transactions,
c'est-à-dire la mesure dans laquelle il a satisfait aux tests
O/C (Over-Collateralisation : s'assurer
de l'existence de garanties suffisantes dans le sous-jacent pour couvrir le
principal restant à payer) et I/C (Interest
Coverage : s'assurer que les intérêts reçus du
sous-jacent suffisent pour couvrir les intérêts à payer sur
les tranches « senior » et
« mezzanine ») sur les opérations
antérieures. Dans certains cas, les agences de notation ajusteront les
pertes attendues en fonction des capacités de l'arrangeur. En effet,
diverses analyses quantitatives conduites par les principales agences de
notation ont conclu que pour des actifs similaires les performances des
« managers » peuvent sérieusement varier.
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