Chapitre 2- Emplois indirects
Les retombées indirectes des chemins de fer touristiques
en terme d'emploi sont difficiles à évaluer en quelques mots en
l'absence d'étude existante308. Aussi, nous ne nous risquons
pas à faire des estimations chiffrées, mais nous tentons de
voir où peuvent se situer ces retombées.
1- Emplois créés dans le
tourisme
Nous avons la présomption que les chemins de fer
touristiques créent (ou pérennisent) des emplois indirects dans
le tourisme. Ces lots (ou ces flots !) de touristes qui entrent dans les bars
et restaurants à l'arrivée des trains et qui se hâtent de
régler leur note lorsque sonne l'heure du retour sont nettement
perçus par les professionnels309. Dans certaines
zones rurales, ils représentent, pour les commerçants, le
petit plus qui leur permet de rester.
306 Voir fichier BaseDonnéesCFT, colonnes AH,
AI, AJ et total colonne AJ
307 Il s'agit d'un Equivalent Temps Plein annuel (ETP
dans le jargon des DRH). Par exemple une personne travaillant à 80 %
toute l'année compte pour 0,8. Une personne travaillant à temps
plein pendant trois mois compte pour 0,25.
308 Ce qui n'empêche pas de tenter de la
réaliser un jour (mais son « format » dépasserait celui
de ce mémoire).
309 Une restauratrice que nous avons interrogée
à ce sujet connaît bien ce phénomène mais nous a
avoué ne pas pouvoir chiffrer l'impact du « petit train » sur
son chiffre d'affaires.
Le rôle économique des chemins de fer touristiques
est parfois explicitement reconnu. Rendons-nous sur le site internet officiel
de la ville de Lamastre (Ardèche) terminus de la
célèbre ligne des Chemins de Fer du Vivarais310 : Le
« petit train » apparaît non seulement dès la page
d'accueil mais aussi dans les rubriques
« tourisme » et même « économie
» ! L'hommage explicite d'une toute petite ville (2.500 habitants)
à un train touristique qui lui amène 60.000 visiteurs par an.
2- Emplois créés dans
l'industrie
Les emplois créés dans l'industrie ferroviaire le
sont dans deux grandes catégories : -chez les intervenant locaux
-chez les intervenants spécialisés
(réparation de locomotives à vapeur, infrastructures).
Chez les intervenants locaux, l'impact des commandes
issues des chemins de fer touristiques nous paraît négligeable :
les commandes restent très ponctuelles. Mais les achats de combustibles
(charbon, gazole) sont substantiels.
En revanche, cet impact nous semble plus net en ce qui
concerne les intervenants spécialisés. La raison en est
simple : le montant des commandes. La réfection de
chaudière à 150.000 € minimum, la locomotive à vapeur
au tarif de 500.000 €, les Kilomètres de voie ferrée
à reposer au prix de plusieurs millions d'Euros créent des
emplois311.
Une part de ces emplois se concrétise à
l'étranger, au sein des ateliers ferroviaires. InterloK Pila emploie une
vingtaine de personnes en Pologne. Mais InterloK Pila ne travaille qu'en partie
pour les chemins de fer touristiques et que très
épisodiquement pour des donneurs d'ordres hexagonaux.
Conclusion - Un potentiel inexploité
d'emplois ?
L'importance du bénévolat nous donne une
vision brouillée de l'emploi réel
généré par les chemins de fer touristiques. En effet, les
bénévoles font un travail qui pourrait (au moins
théoriquement) être effectué par des salariés.
N'existerait-il pas un potentiel de création d'emplois susceptible
d'être concrétisé par une évolution du
bénévolat vers le salariat ?
310 Adresse : http://www.lamastre.fr/
311 Selon de (très) grosses approximations qui
ont cours dans les entreprises, 150.000 € de chiffres d'affaires
créent un emploi temps plein annuel.
J.-M. Gasc, qui dispose d'une expérience plus que
décennale dans la fréquentation des chemins de fer touristiques,
propose la règle de calcul suivante :
-jusqu'à 50.000 entrées, il faudrait compter un
« forfait » de 5 Emplois Temps Plein (ETP) par exploitation
-au-delà de 50.000 entrées, il faudrait ajouter un
emploi temps plein (ETP) supplémentaire par tranche de 10.000
entrées.
En appliquant ces principes, nous obtenons un peu plus de
500 emplois temps plein (ETP) potentiels pour les chemins de
fer touristiques312. Ainsi, il existerait quelque
200 emplois qui pourraient émerger par transformation du
bénévolat en salariat.
Admettons que le potentiel soit réel. Peut-on le
concrétiser ? Et est-ce souhaitable ? Les réponses à
ces questions dépendent à la fois du coût du travail, du
volant de bénévoles mobilisables, et de la volonté des
chemins de fer touristiques. Pour une quantité de travail donnée,
toutes choses étant égales par ailleurs, un coût du travail
élevé déclenche un arbitrage en faveur du
bénévolat. Or ce bénévolat s'avère de plus
en plus difficile à trouver. La situation peut entraîner les
chemins de fer touristiques en manque de bénévoles vers une
fermeture annoncée. Ces exploitations qui connaissent une crise
ouverte du bénévolat devraient pouvoir plus facilement
créer des emplois à des coûts raisonnables.
Même si ailleurs en France, pour des raisons que nous comprenons et
respectons, les exploitants peuvent vouloir (et pouvoir) pérenniser un
fonctionnement essentiellement bénévole.
La constitution d'ateliers ferroviaires
représente une autre piste de création d'emploi dans le domaine
des chemins de fer touristiques. Sans vouloir verser dans la politique
industrielle, on peut se demander si le « matelas » des chemins de
fer touristiques français ne pourrait pas faire vivre un ou deux
ateliers ferroviaires en France, comme c'est le cas ailleurs ? Les tarifs
seraient par force plus élevés que ceux des intervenants d'Europe
de l'Est, mais cette cherté serait compensée au moins en partie
par des coûts de transport réduits et des formalités
administratives simplifiées.
Mais la vraie solution est, à notre avis,
ailleurs. Elle consiste à lever les blocages
injustifiés à la création de PME
ferroviaires, qui pourraient à la fois prendre en charge
trafics touristiques, passagers, voire fret. Pourquoi la SNCF et RFF qui ne
sont pas intéressés par l'exploitation de voies ferrées
secondaires, non rentables selon leurs critères, devraient-ils
empêcher d'autres intervenants de s'en occuper ?
312 Selon le fichier BaseDonnéesCFT. Voir total
colonne AK.
Conc/usion généra/
Nosta/gie et innovation en synergie
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