Chapitre 2 - Caractéristiques du « produit
» chemin de fer
touristique
1- Une forte saisonnalité
Les « petits trains » sont marqués par
une forte saisonnalité. La période
d'exploitation va en gros de Pâques à la Toussaint, avec une haute
saison en juillet et août. Mais certains chemins de fer touristiques,
souvent les plus modestes, n'ouvrent que weeK-ends et fêtes, y compris en
plein été.
Le reste de l'année, pratiquement tous les chemins de fer
touristiques251 sont fermés (bien que certains d'entre eux
puissent rouvrir ponctuellement à l'occasion d'une fête ou d'un
affrètement). Les activités se concentrent alors sur l'entretien
ou la rénovation du matériel roulant et des infrastructures.
2- Un produit qui attire un large public
Qu'y a-t-il de commun entre un chemin de fer touristique à
voie étroite de 2 Km de long et un autre à voie normale qui en
fait plus de 100 ? Entre une exploitation qui accueille 700.000 visiteurs par
an et une autre 2.000 ? Pourtant, du seul point de vue touristique, les
différences ne sont pas si grandes. Dans tous les cas, les
chemins de fer touristiques attirent un large public : familles,
jeunes, personnes âgées ; citadins et ruraux. Ils jouent
un rôle de ciment à la fois entre les
générations et entre la ville et la
campagne de par leur caractère consensuel.
249 Sur les différences considérables
d'échelle dans les budgets de promotion entre associatifs et
professionnels, voir infra, Neuvième Partie, Introduction.
250 Castets, Delavois, Demange, Marseille (2006), p 6. C'est nous
qui soulignons.
251 A l'exception des réseaux exploités
par la Compagnie du Mont-Blanc : Train du Montenvers - Mer de Glace et Tramway
du Mont-Blanc, ouverts hiver comme été.
Les groupes (jeunes et personnes
âgées pour l'essentiel) représentent en moyenne le
quart des visiteurs, mais cette proportion varie selon les chemins de
fer touristiques de moins de 10 % à plus de 40 %252.
L'intérêt de ce type de clientèle réside dans le
fait qu'elle lisse la fréquentation : elle se concentre
sur les périodes creuses, avant et après la haute saison.
Qu'il s'agisse d'individuels ou de groupes, plusieurs
gisements de clientèle intéressent nos « petits
trains »253 :
-les touristes étrangers, originaires de
pays anglo-saxons, nations dans lesquels les chemins de fer touristiques sont
une réalité bien plus tangible que par chez nous. Ces touristes
ont tendance, assez naturellement, à rendre visite aux « petits
trains » situés dans leur région de villégiature. On
peut rattacher à cette catégorie les touristes
français venant de régions à tradition
industrielle
-les touristes locaux c'est-à-dire
habitant dans la zone de chalandise de chaque « petit train ». A
titre indicatif, on doit comprendre cette zone comme incluse à
l'intérieur d'un isochrone d'une heure trente de trajet autour du site
du chemin de fer touristique. Il semble qu'effectivement, au-delà de
cette durée, l'image d'une exploitation touristique se
brouille254.
-les amateurs ferroviaires qui disposent leurs
propres réseaux d'information et parcourent de grandes distances pour
aller découvrir un « petit train ». Ils restent
néanmoins marginaux en termes de volume (environ 1 % des visiteurs).
3- Un touriste captif et « animé
»
Du point de vue du professionnel, le chemin de fer touristique
possède un avantage majeur : c'est un produit qui tient
le touriste captif. Séparé de sa voiture individuelle
abandonnée sur un parKing, le touriste est à la merci des
tentations mercantiles qu'il trouvera infailliblement sur sa voie :
naturellement il doit payer son billet, mais un peu plus tard il aura
sûrement soif, probablement faim, et il succombera au désir
d'immortaliser sa demi-journée (ou sa journée) en ramenant chez
lui quelque objet authentique « made in China ».
Restauration, vente de produits régionaux, boutique de
souvenirs, découverte d'un site touristique, visite d'une bourgade ou
d'un village pittoresques, activités annexes (accès à une
base de loisirs, baignade, randonnées, balades en VTT ou VTC...etc.)
sont intégrées à toute offre de train touristique
bien pensée. La boutique
252 Source : fichier BaseDonnéesCFT.
253 Voir Gasc (1994), p 101 pour les informations
contenues dans ce paragraphe.
254 Notons que dans certaines régions où
les chemins de fer touristiques sont relativement proches les zones de
chalandise se recoupent, entraînant une concurrence de fait entre «
petits trains ».
à elle seule représente couramment 10 à 15 %
du chiffre d'affaires. Comme jadis255, la
rentabilité des activités ferroviaires se conquiert aussi...
à côté du train! Cette rentabilité passe
obligatoirement par une gestion du temps et de l'argent
dynamiques.
Gestion du temps: un produit touristique ferroviaire
bien conçu est basé sur une durée d'une
demi-journée (ou plus rarement, d'une journée) avec, sur la base
d'une demi-journée, une durée d'aller simple optimale
située autour de 45-50
minutes256.
Gestion de l'argent: l'achat du voyage à bord du
train touristique ne doit pas
« assécher » le pouvoir d'achat du touriste,
auquel cas il ne dépensera rien de plus. Il faut donc
positionner le prix du billet au niveau adéquat, voire le
minorer pour regagner ailleurs, là justement où la marge est
supérieure (restauration, souvenirs...), le chiffre d'affaire perdu.
Certains chemins de fer touristiques proposent des tarifs « famille »
avantageux, des prestations annexes (transport de vélos, de sKis, de
surfs257) ou bien combinées (train + VTT) en synergie avec
l'offre touristique locale.
L'animation d'un chemin de fer touristique
constitue un autre élément important. Il est souhaitable que les
trajets soient commentés. De même, tout « petit train »
qui se respecte se renouvelle au cours de l'année : organisation de
« fêtes de la
vapeur »258, de trains spéciaux (trains du
Père Noël, trains d'Halloween, « attaques » du train par
des Indiens, stages de conduite de locomotive à vapeur...). Les
idées foisonnent. Même les petits et grands
évènements de la vie (mariages, anniversaires...) peuvent se
fêter en train touristique : des affrètements sont proposés
par nombre de réseaux. Tout est prétexte à ce que le
touriste (notamment le touriste local) vienne plusieurs fois et ne cède
pas aux sirènes des parcs d'attraction classiques.
255 Voir supra, Deuxième Partie,
Chapitre 3.
256 Au-delà, le touriste se lasse, en-deça il n'y a
plus assez de temps pour les activités à bord du type vente
ambulante.
257 Le P'tit Train de Saint-Trojan aménage des wagons pour
le transport de planches de surf.
258 Les « Fêtes de la Vapeur » sont aussi
l'occasion d'attirer les passionnés, qui peuvent alors venir en
nombre.
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