L'Equité dans les Associations( Télécharger le fichier original )par Valérie CALLADINE-GRAUX CNAM de Paris - Master Recherche "Développement des Ressources Humaines" 2007 |
Tableau sommaire des associationsAfin de formaliser les caractéristiques de l'ensemble des structures observées, nous proposons un tableau récapitulatif des éléments constituants :
Chapitre 2 : Analyse des entretiens2.1 L'équité dans les relations salariés/bénévoles Les bénévoles côtoient tous les jours les salariés, que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur de l'association. Comme cela a été présenté précédemment, ce sont deux acteurs aux statuts différents. Tout individu a tendance à évaluer autrui et à s'évaluer par rapport à lui. C'est en partant des deux acteurs cités auparavant, que nous allons analyser les éléments constituants le principe de l'équité. Pour cela, nous aborderons les trois phases de la théorie d'Adams et Homans : l'évaluation de l'échange, la comparaison et l'action. 2.1.1 L'équité individuelle 2.1.1.1 Le concept de l'évaluation de l'échange Le salarié et le bénévole sont au coeur de l'évaluation de l'échange dès l'instant où un lien s'est établi avec l'association. Chacun apporte ses compétences, son temps. En retour, le collaborateur perçoit un ensemble d'avantages. Que nous parlions de la contribution du salarié ou du bénévole, il y a toujours en retour une rétribution sous quelques formes que ce soit. A ce moment s'opère le processus de comparaison contribution/rétribution : l'individu va essayer d'évaluer un ratio entre ce qu'il « donne » en terme de temps, de compétences, d'investissement et ce qu'il a en retour de la part de l'association (numéraire, avantages divers, reconnaissance). - La contribution Apport à l'association § Le bénévole Etre utile, c'est d'abord être présent sous la forme d'apport de ce que l'on sait faire, accepter de faire des choses ingrates ou valorisantes. « Le bénévole doit accepter d'être corvéable à merci, de savoir donner du temps sans compter, d'être là quand il faut »52(*). Le sentiment qui en émerge montre une image négative des actions réalisées par le bénévole alors que ces mêmes actions ne sont absolument pas valorisées. Mais cela traduit aussi un manque de sens dans les actions réalisées par les bénévoles. Or, ce qui semble paradoxal est bien le fait que l'acte bénévole est une action réfléchie. L'action bénévole souffre par conséquent de la politique de la valeur ajoutée « financière ». Nous notons que l'ensemble des acteurs des associations rencontrées, se situent de part et d'autre de la pyramide des âges. Pour schématiser, cette population se veut ou bien jeune, et souvent étudiante ou bien des personnes qui se situent en « fin de vie professionnelle » et avancées dans l'âge. Cette hétérogénéité se veut une force une faiblesse. De nombreuses compétences se croisent mais ont des difficultés à s'allier. Les bénévoles se sentent importants pour la vie de l'association « Il faut des gens qui maintiennent la mémoire » 53(*). § Le salarié Sa démarche de profit est clairement exprimée dans une expression d'une salariée d'association : « Je rentre dans une institution, je me sers et je fais carrière. En association, on sert, en entreprise, on se sert » 54(*) La notion d'individualisme apparaît et tend à casser le sens de la réciprocité. La relation salarié/association est forcément basée sur le donnant-donnant. Le salarié est plus dans une démarche dite « commerciale ». « Il faut reconnaître que nous sommes face à des salariés, qui sont dans une démarche professionnelle. Ils cherchent du travail et en trouvent dans des associations 55(*) ». La confiance en soi § Le bénévole Au cours des différentes rencontres, les bénévoles ont toujours montré une confiance en « ce qu'ils font ». « Ils y croient dur comme fer » 56(*). L'acte bénévole est anticipé, réfléchi, parce qu'il s'appuie sur des expériences vécues. « On pense toujours que le bénévole est là pour perdre du temps, mais, il ne faut pas oublier que les bénévoles savent faire des choses »57(*). Un bénévole va vouloir apporter son soutien dans le domaine qu'il a maîtrisé professionnellement. Ce qui implique une incertitude réduite. En conséquence, l'individu bénévole, même dans une situation inconnue aura la conviction de réussir, car il mettra en application l'ensemble de ses connaissances. Fort de ses capacités, le bénévole s'investit considérablement dans les actions qui lui sont confiées. Il souhaite même être partie intégrante dans la gestion de l'association. Ces réactions s'observent très souvent chez les bénévoles. « Nous donnons vraiment de nous même, nous travaillons parfois le samedi ou le soir » 58(*). Nous assistons donc à une mobilisation importante du bénévole par rapport aux actions à réaliser. Avoir confiance en soi suppose que l'individu, qui est positionné dans une situation tout aussi inconnue que le salarié, décide d'établir un lien, une relation. De cela, il en découlera la transmission d'idées, qui seront actrices d'actions. La confiance en soi est une dominante dans la personnalité du bénévole, chez le salarié beaucoup moins. Pour expliquer ce phénomène, on peut trouver en partie une réponse dans le passé de chacun : l'accumulation d'expériences. Même si les situations ne sont pas les mêmes, le bénévole a pris l'habitude des « dangers », en a mesuré les caractéristiques. Ils ont une grande adaptabilité. Ils ont « pris de l'expérience ». Le bénévole évolue dans un monde de production de biens de consommation. Pourtant, son espace est celui du don où la création d'un lien social, d'un réseau d'échanges avec des personnes nouvelles, et le sentiment d'être utile aux autres sont les véritables valeurs ajoutées du bénévolat et les éléments donnants confiance en leurs capacités et leurs savoir-être : « Par nature, pour les bénévoles ils croient dur comme fer en leur mission » 59(*). § Le salarié A contrario, les salariés ont vécu des situations où les mêmes gestes ont été répétés. Toute nouvelle situation de travail les rend vulnérables. « Je ne suis pas certain de faire quelque chose de bien.......Si je continue malgré tout, c'est que je crois que l'action a des impacts positifs60(*) ». Nous pourrions même considérer que le salarié manque de confiance en lui-même , car il s'agit de quelqu'un qui fuit le secteur marchand : « ils refusent le monde industriel régi par le courant du marché dit néo-libéral. Ils rejettent les règles de la performance 61(*) ». Ils le jugent ce monde comme un lieu de performance où chacun doit se surpasser. A tout instant, le salarié doit faire ses preuves et se surpasser. Ce n'est pas le cas dans le secteur associatif, puisque la culture associative est basée sur le don, le geste généreux et donc sur une non concurrence : « Entre eux, il n'existe pas réellement de différence en terme de technicité, de compétences 62(*) » « : il n'y a aucun jeu de pouvoir au sein de Captifs. Tout est bien défini 63(*) » L'action bénévole comme un travail ? § Le bénévole Nous constatons donc que les bénévoles font preuve d'une confiance prononcée en leurs compétences. Cela se traduit aussi dans le champ lexical lorsqu'ils parlent de leurs activités ou bien lorsqu'on parle d'eux : « Mes enfants m'ont reproché de m'être investi dans la vie associative au détriment de ma vie de famille lorsqu'ils étaient jeunes......Le travail associatif est très absorbant et très consommateur de temps ». 64(*) « Pendant que je cherchais du job rétribué en monétaire, j'avais des activités de bénévole. Depuis 2001, j'étais toujours en activité, même si j'étais considéré comme Demandeur d'emploi par l'administration65(*). » Par leurs pratiques, les bénévoles s'inscrivent « dans un faire pour et dans un faire avec »66(*). Ces interactions se retrouvent dans le secteur marchand (échange de biens). Reconnaître l'activité du bénévole comme un travail engendre une reconnaissance des compétences savoirs, savoir-faire et savoir-être de l'individu. Le bénévole devient un acteur participant à la vie de l'association. § Le salarié Le salarié ne vit pas ce phénomène de reconnaissance, puisque son statut et le lien de subordination avec « l'employeur » lui prévaut déjà la reconnaissance. Maintenant, nous sommes en position de nous demander si le salarié peut reconnaître l'activité du bénévole comme un travail. Il s'agit cependant d'une position qui ne fut pas abordée. Des activités épanouissantes et gratifiantes § Le bénévole Même, dans les associations, il y a des actions gratifiantes et d'autres moins. La recherche des acteurs des associations résident dans le résultat et non dans la performance.. Les bénévoles se sentent pleinement à l'aise au sein des activités associatives, puisqu'ils ne « calculent » pas : « Les bénévoles font les choses d'instinct 67(*)» . Et parce qu'ils se sentent partie intégrante de l'association et parce qu'ils se sentent valorisés dans leurs actions, ce sont des acteurs qui s'« impliquent dans le projet associatif ». Au cours des différentes rencontres, il ressort un souhait de rentrer dans une logique gestionnaire afin d'optimiser l'ensemble des compétences mais aussi pour lutter. Les bénévoles ont une forte volonté d'intégration dans la logique gestionnaire : ils recherchent l'optimisation. Gérer davantage les activités permet une meilleure connaissance des besoins en compétences et une identification claire de ceux qui sont impliqués dans l'action. Mais comme le précise l'une des interviewés, « s'engager dans la vie associative, c'est vouloir agir ensemble, assumer ensemble une cause ou un projet » 68(*) ; Elle pense que chacun raisonne en collectif. La reconnaissance pour les activités réalisées est collective. § Le salarié Cette thématique ne fut pas abordée par les salariés aux cours des interviews. Un état récapitulatif des thématiques abordées dans la contribution La notion de contribution est abordée de manière différente entre le salarié et le bénévole. Nous observons que pour le bénévole, la contribution porte sur ce qu'il apporte concrètement à l'association en terme de thématiques de mémoire, en terme d'investissement en temps et apport de compétences. Le salarié, quant à lui, est plus sur une démarche dite de rentabilité : il donne ses compétences, il attend la rémunération adéquate. Il s'agit d'une démarche plus intéressée. Pour résumer l'ensemble des contributions de chaque acteur, nous proposons un tableau récapitulatif des grandes thématiques retenues par les acteurs pour définir leur contribution.
* 52 Interview 7 * 53 Interview 7 * 54 Interview 7 * 55 Interview 3 * 56 interview 5 * 57 Interview 9 * 58 Interview 9 * 59 Interview 5 * 60 Interview 2 * 61 Interview 1 * 62 Interview 1 * 63 Interview 2 * 64 Interview 5 * 65 Interview 5 * 66 Maud Simonet-Cusset, « Penser le bénévolat comme travail... ou l'apport de la sociologie du travail à l'analyse du bénévolat » in « Les bénévoles et leurs associations Autres réalités, autre sociologie ? », Editions L'Harmattan * 67 Interview 5 * 68 Interview 2 |
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