RECOMMANDATIONS
Au chapitre des recommandations de notre
précédente étude du RESOF, nous proposions, notamment :
· un changement d'approche en direction des
décideurs, pour une relation gagnant-gagnant,
· Une plus grande capacité de veille, pour une plus
grande réactivité, et pour lutter contre l'entropie du
système,
· Des manifestations ciblées, à
caractère stratégique, d'où émergent des
idées nouvelles, ou bien qui portent en germe l'évolution des
comportements de demain,
· La recherche d'une identité plus visible, pour
affirmer son expertise,
· Un engagement net en faveur des bonnes pratiques, en les
citant,
· L'expérimentation de pratiques qui s'inscrivent
clairement en rupture des modèles en usage.
La question des pools doit également être
débattue, car problèmes il y a. Nous comprenons bien la
justification de leur mise en place, au vu de l'ampleur de la zone
d'intervention potentielle du Réseau, mais les avantages semblent
limités, à l'aune des résultats visibles. Le pool de
PodorMatam-Bakel est le plus étendu, avec tout ce que cela comporte de
difficultés pour se rencontrer régulièrement, pour
communiquer tout simplement. Sur une telle distance, et compte tenu des moyens
mobilisables, n'importe quelle dynamique ferait long feu ; ce n'est pas une
question de motivation au sein du pool PMB, qui ne nous semble pas être
le dernier dans ce domaine.
Le pool de Saint-Louis a, par la force des choses, une forte
coloration urbaine : peu d'organisations professionnelles agricoles, beaucoup
d'opérateurs aux statuts variés, la plupart basés dans la
capitale régionale. Celui du delta paraît le moins dynamique ; il
présente la particularité de regrouper le moins de membres (moins
d'une dizaine), mais c'est en son sein que l'on trouve des organisations
professionnelles construites sur des bases économiques importantes : les
périmètres irrigués et les Unions hydrauliques, qui en
assurent la gestion que leur a rétrocédé l'Etat ; il n'est
pas très étendu, ni trop éloigné des
commodités que peut offrir Saint-Louis.
Malgré ces différences, aucun pool ne fonctionne
vraiment de façon satisfaisante ; l'animateur du Résof en
convient bien volontiers, lorsqu'il nous déclare ceci en juin dernier
:
« on a mis en place des pools pour rapprocher les gens,
mais ça ne marche pas mieux ; les réunions, les plans d'action
proposés ne mènent à rien de concret ! »
Du concret : c'est bien de cela dont ont besoin les individus
qui représentent les fils de la toile du Réseau, cela implique en
principe d'adapter les moyens au rayon d'action, et vice-versa, car un
réseau a besoin d'un flux régulier d'échanges pour exister
et se développer. Un fonctionnement par à-coups, des rencontres
trop espacées, l'absence de vecteur de communication efficace et
adapté aux profils variés des membres, tout ceci ne porte pas
à l'euphorie.
Tous ces points ne peuvent produire leurs effets de
manière efficiente que si un point de mire se détache de
l'horizon ; dans la négative, la dispersion des ressources
occasionnée par les tâtonnements et les bifurcations, ainsi que la
désorientation qui en résultera d'une partie des acteurs seront
source de nouveaux problèmes.
Nous avons montré que la dynamique créée en
2004 s'est assez rapidement essoufflée, et que le secrétariat
exécutif du réseau se retrouve bien seul pour la porter au plan
régional en 2007.
Redonner du sens : si nous ne devions formuler qu'une seule
recommandation à la suite de ce travail, ce serait celle-ci ! Redonner
du sens à ce qui se fait, pour ne pas décourager les uns, pour
intéresser et attirer les autres, parce que la légitimité
d'une poignée d'acteurs pourra toujours être mise en doute par les
autres, ceux qui ne sont « ni dedans, ni avec ».
Mais tout d'abord, pour qu'un réel pilotage
régional dans la Vallée du Fleuve Sénégal ait
quelque chance de voir le jour, une mise à plat du RESOF nous
paraît incontournable ; un atelier interne, destiné à
« libérer » la parole des membres, pourrait permettre i) de
rappeler quels sont les résultats atteints à ce jour, et ii)ce
qu'en attendent ses membres à l'avenir. Quelles sont leurs
éventuelles frustrations, déceptions, souhaits ?
Un accord, des consensus, des compromis en sortiront, qui
devront être appliqués sans faillir, et sans tarder, pour garder
la crédibilité indispensable. Peut être que certains
membres quitteront la partie, mais le jeu n'en vaut-il pas la chandelle ? Une
base ressoudée autour d'objectifs communs n'est-elle pas
préférable à un aréopage dont l'attelage semble
improbable ?
Cet atelier devrait permettre dans une première partie,
grâce aux clarifications auxquelles il donnera lieu, de s'accorder sur
des objectifs concrets et « sexy » à atteindre en
matière de régulation, afin d'éviter de dériver
vers une posture « stratosphérique » ; les personnes ont
besoin de concret, ne serait-ce que pour justifier auprès de leurs
propres organisations le temps qu'elles consacrent au réseau.
Dans un second temps, cette rencontre devrait permettre de
débusquer, d'identifier, de nommer les difficultés de toutes
sortes, engendrées par les lacunes actuelles dans le domaine du
pilotage, c'est à dire de la définition des orientations, des
moyens privilégiés et des arbitrages à réaliser
pour conserver le cap fixé, et tendre vers les objectifs dans les
délais précisés au départ.
Autrement dit, piloter pour faire quoi ? pour modifier quelle
situation ? pour aller vers quel nouvel état ? A toutes ces questions,
les membres du RESOF se doivent d'apporter, ou de construire ensemble, des
réponses claires sur lesquelles on s'accorde, avant de faire
naître l'ambition de vouloir les faire accepter par les autres
acteurs.
Le Bureau de la formation professionnelle agricole, qui doit
par ailleurs animer le travail de mise en place d'un cadre national de pilotage
de la FAR, doit en parallèle préciser, écrire «
ce qu'il met » dans ce terme de pilotage, pour pouvoir le
partager, _c'est bien le moins_ avec les membres du résof.
Dès que possible, il sera souhaitable d'élargir
cette discussion à d'autres, d'une part parce que l'attelage BFPA-RESOF
n'est pas « naturel », ni au plan fonctionnel, ni au plan
opérationnel, d'autre part parce qu'il est indispensable d'accrocher
l'intérêt des autorités locales, avec l'appui des services
techniques de l'Etat et des collectivités territoriales, et «
d'écouter » quels sont leurs centres d'intérêt et
leurs préoccupations.
Pour marquer une inflexion dans les tentatives de
rapprochement du réseau avec ces collectivités, un atelier
d'échanges formaliserait le bilan que l'on peut aujourd'hui tirer :
quelles avancées depuis l'atelier de décembre 2004 ? Quels sont
les points de vue des uns et des autres ? leurs appréhensions et leurs
incompréhensions ?
Redonner du sens ! cette expression utilisée pour
préciser l'avenir dans le champ de la régulation de la FAR vaut
également pour préciser ce que chacun entend par pilotage : dans
quel esprit, selon quelles modalités, jusqu'où ?
Ce qui en sortira pourra être retravaillé avec
l'appui de la recherche et de l'enseignement supérieur, pour dessiner un
point de mire acceptable par toutes les catégories d'acteurs ;
arrivés à ce stade, l'installation d'un cadre de pilotage
régional sera un acte purement formel, qui
constituera une étape ou un résultat
intermédiaire, vers la longue marche du pilotage de la Formation
Agricole et Rurale.
En théorie, les champs d'intervention de l'instance de
pilotage et du Résof ne prêtent pas à confusion : l'un est
légitime pour proposer des orientations, définir des
priorités d'intervention, tandis que le second, si son expertise est
reconnue et avérée, a vocation à éclairer le
premier, à fournir de l'information de première main, à
tester de nouvelles pratiques. Mais c'est la théorie...
Il est aujourd'hui prématuré, selon nous, de
creuser davantage vers une sorte de clé de répartition des
attributions entre ce futur cadre de pilotage que tous souhaitent, et le RESOF
; l'apprentissage comme souvent se fera en marchant, et des frictions semblent
inévitables sur des dossiers forcément communs.
Une problématique au moins est commune au pilotage et
à la régulation ; ce n'est pas sur le long terme la plus
importante nécessairement, en termes d'impacts, mais elle a trait au
nerf de la guerre ; pour que la construction progressive de mécanismes
durables de financement de la formation rurale devienne réalité,
il est urgent qu'un débat s'engage sans tarder entre trois acteurs : le
RESOF bien sûr, mais sans le restreindre aux seuls cinq membres
constituant son secrétariat, le BFPA et le partenaire de la
coopération suisse (Bureau d'appui).
Des efforts communs peuvent encore permettre d'éviter
un dévoiement des fonds de formation locaux, notamment en revisitant de
façon plus terre à terre, plus pragmatique les procédures
déjà ébauchées, pour produire un véritable
guide de procédures qui ne laisse pas place à l'approximation ;
sans cela, l'aventure tournera court avant même que l'on ait pu en tirer
des enseignements.
Bien sûr, ces fonds formation auraient pu être le
prétexte à imposer un pilotage régional, sous forme de
conditionnalités au déblocage des fonds, mais en matière
de durabilité des systèmes humains d'inspiration non coercitive,
imposer ne vaut pas convaincre.
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