III- 2. LES ÉLÉMENTS DE DÉPART
III- 2.1. LE RESOF EST CRÉÉ EN 2000 :
POURQUOI ?
Nous nous sommes adressés à Jacques FAYE,
sociologue rural, proche collaborateur du bureau d'appui à la
coopération sénégalo-suisse (qui subventionne le
fonctionnement du RESOF), et à l'époque directeur
général de l'Institut Sénégalais de Recherche
Agronomique (ISRA) au moment des faits. Son discours éclaire les
conditions dans lesquelles a émergé l'idée de faire
travailler en réseau les acteurs de la formation agricole et rurale,
dans la Vallée du Fleuve Sénégal.
C'est lorsqu'il travaillait sur le nouveau projet
d'établissement de l'ISRA, qui a conduit à la création de
l'actuel Fonds National de Recherche Agricole et Agroalimentaire, que cette
idée a germé. La question centrale était alors la suivante
: « Comment s'organiser pour en faire davantage, sachant que nos pays
disposent de moyens limités ? »
Le constat était unanimement partagé : des
personnels nombreux, répartis dans de nombreuses institutions publiques
oeuvrant dans le développement rural. Il paraissait donc logique de les
faire travailler ensemble, pour permettre d'additionner les avantages
comparatifs de chaque institution, tout en décloisonnant des
institutions qui travaillaient pour le même bénéficiaire
final.
La question qui venait immédiatement après
était donc : comment on va s'y prendre ? Deux options se
présentaient alors :
1) fusion de ces institutions
Mais très rapidement, les nombreux freins
identifiés incitèrent à penser que cette solution ne
menait nulle part.
2) les faire fonctionner en réseaux (sur des
sujets d'intérêt commun). Dans ce cas, il fallait que
quelque chose motive les gens à aller dans ce sens car une limite
apparaissait immédiatement : les moyens financiers. En effet, «
outre le fait qu'il n'est pas illimité, l'argent qu'on « flaire
» attire du monde, et pas nécessairement pour la bonne cause
».
Le contexte général était cependant
favorable pour conduire certaines réformes ; le ministre de
l'époque (Robert SAGNA) souhaitait redonner une image positive au
ministère, et le gouvernement voulait remettre un peu d'ordre dans le
secteur.
Il était également question de créer une
véritable Direction de la Formation Professionnelle Agricole ; le
président de la République avait donné le feu vert, et la
Banque Mondiale et la Coopération Française étaient
également d'accord pour l'appuyer.
Tous les décideurs s'accordaient sur la
prégnance d'un exode rural déjà bien visible à
cette époque. Il paraissait évident que tous les jeunes ruraux ne
pourraient pas s'installer en tant qu'agriculteurs, et que la Formation
(Agricole et Rurale) était un moyen de donner aux jeunes les clés
pour entrer dans l'économie urbaine, et les armer pour qu'ils puissent
affronter cette mutation avec un minimum de chances de réussite
d'insertion.
« Au départ, l'idée était aussi
de concéder le service public aux ONG et opérateurs privés
qui souhaitaient gérer des centres de formation. Cette idée
valait également pour le Conseil agricole, car selon moi, l'ANCAR ne
devait pas disposer de personnels de terrain (contrairement à la version
actuelle qui a été mise en place dans le cadre du programme des
Services Agricoles et d'Appui aux Organisations de Producteurs(trices)
PSAOP). »
« On a donc dit à ces acteurs, qui se situent
dans le champ de l'opérationnel : « Si vous vous mettez en
réseau, en nous expliquant pour quoi faire, on vous donnera les moyens
de travailler » ! C'est la « carotte » que nous avions
trouvé pour les inciter à aller dans ce sens. »
Six ans plus tard, Jacques FAYE reconnaît que les
avancées sont minces, et en attribue d'abord la cause à
l'alternance politique de 2000, la nouvelle équipe gouvernementale
aurait découragé les acteurs impliqués en mettant «
au placard » les dossiers en cours, hérités de
l'équipe précédente.
En vérité, au nombre de ces acteurs figuraient
en bonne place les paysans eux-mêmes, et ils ne semblent pas s'être
beaucoup investi dans les réseaux émergents, peut être en
raison du fait que cette initiative n'était pas parti d'une demande
formelle de leur part. Pourtant, l'idée de départ se limitait
à rendre visible quelque chose qui existait en partie déjà
dans les faits, au quotidien.
Ainsi, les représentants de la profession, comme le
président de l'imposante Fédération des
Périmètres Autogérés (riziculteurs), et l'Ecole
Nationale d'Economie Appliquée, travaillaient déjà
ensemble sur les problématiques du Conseil et de la Formation
Agricole.
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