1.3 Facteurs lies à la demande
d'éducation
La demande éducative dépend d'un certain nombre
facteurs que nous essayerons de mettre en exergue dans cette partie.
1.3.1 Facteurs socio-économiques 1.3.1.1.
Pauvreté
La situation économique des personnes pauvres les
empêche de satisfaire pleinement leurs besoins d'éducation. Les
pauvres pensent à se nourrir d'abord et ensuite aux besoins secondaires.
Donc l'initiative de mettre un enfant à l'école est jugée
comme une dépense supplémentaire.
1.3.1.2. Coûts directs (droits, uniformes,
transports, etc.)
Les frais tels que les droits d'inscription, les uniformes, le
transport et les fournitures scolaires découragent les parents. En
effet, à chaque rentrée scolaire, l'accumulation de ces
dépenses s'élève à un montant tel que les parents
d'élèves se trouvent incapables de les satisfaire. Par exemple,
dans les zones sous scolarisées du nord de la Côte d'Ivoire,
l'avantage concurrentiel que présente l'école coranique sur
l'école « moderne » contribue à la faiblesse de la
scolarisation dans ces zones (Tapé, 1996 ; cité par Ibata, 2003)
car les dépenses exigées par l'école coranique sont en
effet moindres que celles relatives à l'école « moderne
» (Marietou, 1997 ; cité par Ibata, 2003). Les parents
préfèrent donc choisir soit de s'abstenir d'emmener les enfants
à l'école, soit d'opter pour des écoles coraniques.
1.3.1.3 Coûts d'opportunité
d'éducation des filles
La fille, candidate potentielle au mariage est vue comme une
source de revenu pour les parents. Le paiement de la dote constitue une source
de revenu pour les parents. Ainsi, ils ont une préférence
à garder les filles, dans l'espoir de voir la fille se marier à
un jeune homme qui serait capable de subvenir aux besoins de la famille. Par
conséquent les garçons seront ceux vers les chance d'aller
à l'école seront plus élevé.
1.3.1.4. Besoins de enfants pour des tâches
agricoles/ménages
Les activités courantes rencontrées dans nos
pays sont les travaux domestiques et champêtres. Ces travaux
requièrent une main d'oeuvre importante. Le conflit entre l'école
et le travail en économie paysanne décrit par Kamuzora (1984 ;
cité par Ibata, 2003) montre combien la scolarisation limite la
contribution des enfants à la production domestique. Cet arbitrage entre
l'école et les travaux domestiques fait par les parents va amener
ceux-ci à ne pas scolariser leurs enfants puisque la production
domestique est prioritaire. Les filles sont de plus en plus associées
à ces travaux. Par exemple dans l'ouest du Cameroun, les jeunes filles
participent aussi bien aux travaux champêtres les plus laborieux que les
garçons. Elles s'occupent aussi des travaux domestiques. Ainsi, avoir
des filles est une source de richesse que la providence a elle même
donné. En Côte d'Ivoire, les travaux extrascolaires, qui
concernent aussi bien les travaux domestiques que les travaux champêtres,
la garde des animaux, l'exercice du petit commerce, etc., constituent un
obstacle à l'accès et surtout au maintien des enfants à
l'école particulièrement celle des filles (Dedy et Bih, 1997 )
Analyse de la situation de l'éducation des
enfants de 6 à 15 ans : Cas de la commune de San Pedro
1.3.1.5 Chômage des
diplômés
L'état actuel de nos économies est
défavorable à la scolarisation des enfants. Certains parents,
ayant pour objectif premier de recevoir des ressources financières de
leurs enfants lorsqu'ils auront achevé l'école, se
réjouissent du sentiment que les diplômés sortant ne
gagnent pas du travail et donc décident de ne pas scolariser leurs
enfants. Pourtant la réponse première que l'école peut
apporter à quelqu'un est de lui donner la formation afin de lui
permettre de s'affirmer au sein de sa société. Mais
malheureusement nos populations en ont un autre jugement.
1.3.2. Facteurs socioculturels
1.3.2.1 Faible importance accordée à
l'éducation des filles
Dans nos sociétés traditionnelles, la jeune fille
est perçue d'une part, comme une main d'oeuvre au service de sa
mère, et d'autre part comme une épouse reproductrice (Marietou,
1997 ; cité par Ibata, 2003). C'est ce qui traduit dans l'effectif
scolaire dans nos pays, la faible proportion des filles. Ce jugement malheureux
hérité des traditions, Africaines, condamne des millions de
filles sous l'ornière de la non scolarisation.
1.3.2.2 Bas niveau d'éducation des parents et
sexe du chef de ménage (CM)
Le niveau d'éducation des parents influent fortement
sur la scolarisation de leurs enfants. Les parents ayant déjà
fréquenté l'école ont une grande préférence
à emmener leurs enfants à l'école. En revanche, ceux
n'ayant pas un niveau scolaire appréciable, ni n'ayant pas
fréquenté l'école accordent moins d'importance à la
scolarisation de leurs enfants. Concernant le sexe du chef de ménage,
une étude montre qu'au nord de la Côte d'Ivoire les CM de sexe
féminin assure une scolarisation plus forte que leurs homologues de sexe
masculin (Toto ,1999).
1.3.2.3 La taille du ménage
Le nombre élevé de personnes dans le
ménage, notamment des enfants très jeunes, limite les
capacités de ce dernier à investir dans la scolarisation des
enfants. Ainsi la relation entre la taille du ménage et la scolarisation
des enfants pourrait être négative surtout dans les ménages
pauvres. Les études réalisées en Afrique tendent à
infirmer cette hypothèse classique. En Côte d'Ivoire, on observe
un effet ambigu. Montgomery et al. (1995 ; cité par Ibata, 2003) ont
effectué une étude comparative sur la Côte d'Ivoire et le
Ghana, et montrent qu'en milieu rural la taille du ménage à un
effet positif sur la scolarisation et qu'en milieu urbain, l'effet est
négatif. Une autre étude de Dedy et Bih (1997) montre que la
taille du ménage agit négativement sur la mise à
l'école particulièrement dans les régions sous
scolarisés du Nord.
1.3.2.4. La religion
Les enseignements ainsi que les pratiques de certains groupes
religieux peuvent affecter la scolarisation, surtout celle des filles. La
plupart des parents musulmans de certaines régions de la Côte
d'Ivoire affirment privilégier la pratique religieuse chez les filles ;
l'école publique laïque, apparaît comme un des obstacles
majeurs à la vie spirituelle des familles qui, pour la contourner,
préfèrent garder leurs enfants à la maison ou les inscrire
à l'école
coranique (Trah, 1996). L'école est perçue comme
un lieu de dépravation des moeurs, lieu de rupture avec le milieu
familial, contrairement à l'école coranique qui enseigne le
respect, la soumission et les principes de la religion musulmane (Marietou,
1997 ; cité par Ibata, 2003). Toto (1999) prouve qu'en zone urbaine
comme en zone rurale, les chefs de ménages chrétiens scolarisent
plus les enfants que ceux d'obédience musulmane.
1.3.2.5 Autres facteurs
Parmi les facteurs socioculturels, il faut citer
également les grossesses et mariages précoces et la perception de
l'éducation en conflit avec les valeurs traditionnelles. Il faut noter
l'impact de certaines maladies telles que la pandémie du sida sur la
demande éducative. D'après une estimation de l'AFD (2004 ;
citée par Dougnon et al, 2006), certains pays comme le Malawi, la
Zambie, Le Zimbabwé et l'Afrique du Sud verrons d'ici 2010 leur
population se réduit d'un quart par rapport à une situation
d'évolution démographique normale a cause du sida.
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