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La gestion des sites du patrimoine mondial au Maroc: Le cas du Ksar Ait Ben Haddou (province de Ouarzazate)

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par Hassan ZAKRITI
Université internationale de langue française au service du développement africain - DEPA 2005
  

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1.7. La mise en oeuvre des mesures de protection : le classement

La protection juridique du site du Ksar Aït Ben Haddou est une composante de

première importance pour la sauvegarde du village.

Le texte de classement est venu enfin en 2004 de se greffer au système de protection du patrimoine national (loi n°22-80) et au processus de sauvegarde du site enclenché depuis 1953 en vertu de l'arrêté viziriel portant classement des vallées des Oasis (B.O. n°2125 du 7 juillet 1953- p. 983). Cependant, ce texte de classement n'a pratiquement jamais été appliqué en faveur du ksar, et tendait à tomber en désuétude, d'autant plus qu'il avait une portée géographique assez importante.

En 2001, deux documents urbains ont été approuvés et homologués par l'autorité chargée de l'urbanisme et l'aménagement du Territoire : le Schéma Directeur du Grand Ouarzazate (SDAU) et le Plan de développement et d'aménagement de la Commune rurale d'A ït Zineb (PDAR).

Bien que ces deux documents tiennent compte respectivement du patrimoine architectural à l'échelle de la Province, et du ksar des Aït Ben Haddou à l'échelle de la commune, ils se sont révélés sans effet réel sur la sauvegarde du site, étant donné que le premier a une portée générale et le second a une portée limitée. Il est vrai qu'il s'agit d'instruments de planification en matière d'aménagement et de l'occupation du sol, mais qui sont dépourvus d'éléments contraignants. Plusieurs infractions au PDAR ont été constatées, et l'intégrité du site risquait d'être altérée irréversiblement.

La procédure de classement avait été entamée en 1994, mais n'a pu aboutir à cause de la lenteur de la procédure et de la complexité du statut foncier du ksar. Conformément à la réglementation en vigueur, la demande de classement doit émaner du propriétaire du bien, de l'autorité de tutelle, ou d'une association reconnue d'utilité publique. Le classement du ksar était confronté à la diversité des propriétaires donc à une variété de régimes de propriété.

La procédure fut relancée en 2001 grâce à l'effort du CERKAS et la volonté sérieuse des collectivités locales et l'autorité de tutelle (Ministère de l'Intérieur).

En conséquence, le Ministère de la Culture est de droit engagé dans l'action de protection du site du ksar (avant, le ministère était en situation de fait). Tout aménagement, modification, construction nouvelle ou installation est en vertu du texte de classement, subordonné à l'avis favorable de l'inspection régionale des sites et

monuments (Marrakech), et éventuellement du CERKAS. Et toute infraction à l'arrêté de classement sera passible de sanction prévue par la loi n°22-80 relative à la conservation du patrimoine mobilier et immobilier (Titre VIII, sections 1 et 2), et la loi 12-90 relative à l'urbanisme.

Le texte de classement prévoit non seulement la protection du ksar mais également ses abords et fixe un zone tampon, ainsi que des servitudes (non aedificandi et non altius tolendi). Celles-ci ont été déjà fixées dans le PDAR (document graphique), et les auteurs du texte de classement ont dû les maintenir pour leur pertinence et leur

adéquation avec le contexte (voir plan ci-dessous)1

Cependant, le classement n'offre pas beaucoup de garanties en faveur du ksar. Il s'agit d'un instrument de protection juridique dont le détenteur (ministère de la culture en l'occurrence) n'exerce aucun pouvoir de police sur les sites classés. Il s'agit à la limite d'un instrument normatif auquel les autorités et la population sont censées s'y référer le cas échéant.

Par ailleurs, ce classement risque de figer la dynamique économique du ksar, dont les propriétaires vont se retrouver devant la contrainte de respecter les normes de construction (modèles et matériaux) et en face d'un instrument juridique contraignant dont les effets échappent à leur perception. D'autant plus que la réglementation en matière de classement n'offre aucune mesure d'incitation pour les propriétaires désireux d'effectuer des travaux d'amélioration de leur cadre bâti (exonération ou allégement fiscal). L'administration de tutelle détient même le droit d'exécuter d'office des travaux qu'elle juge utiles à la sauvegarde des bâtisses (loi n°22-80 ; art. 25).

D'autre part, associé à la réglementation en vigueur (loi n°22-80 ; art.26), le classement du ksar en question consacre la règle du Dahir du 27 avril 1919 organisant la tutelle administrative des collectivités ethniques et réglementant la gestion et l'aliénation des biens collectifs qui dispose que les biens collectifs sont inaliénables et imprescriptibles.

Il est évident que le texte ne classement ne garantit pas pleinement le respect de la réglementation en vigueur. Il y a un effort énorme à fournir auprès de la population et les acteurs locaux dont dépend l'avenir du ksar. A ce titre, le CERKAS est surtout appelé à mener une action de diffusion de ce texte à tous les niveaux en soulignant les enjeux de sa mise en oeuvre et en gardant le sens de l'écoute auprès de la population. Sans cette approche, toute action de sauvegarde et surtout de réhabilitation serait vaine et inconséquente.

1 Le texte de classement existe actuellement en arabe. La version française n'est pas encore publiée.

Chapitre 2. La démarche de réhabilitation

La réhabilitation du ksar des Aït Ben Haddou consiste à repérer les pistes et la mise

en oeuvre des mécanismes de sa mise en valeur, et à inscrire l'ensemble dans une perspective de rentabilité sociale et économique en essayant de concilier d'une part les valeurs internationales (Convention de 1972, Charte de Venise, etc.) avec les attentes de la population locale, et d'autre part l'éthique de sauvegarde avec les impératifs de développement local.

La réhabilitation du Ksar Aït Ben Haddou se veut d'abord une vocation sociale, et passe forcément par l'élément de reconnaissance en tant que patrimoine mondial. La reconnaissance du patrimoine s'effectue à deux niveau : d'une part au sein des détenteurs du bien patrimonial et des gens qui en exerce le droit de jouissance (population, usagers, touristes, etc.) ; d'autre part, au sein des autorités et des organisations.

Il est évident que les propriétaires légitimes du ksar se reconnaissent dans leur village (sentiment d'appartenance, d'appropriation et d'héritage). Mais il n'est pas certain qu'ils sachent tous que leurs biens font partie d'un patrimoine universel. Car même le logo du patrimoine mondial ne figure pas sur le site. Ce qui rend la reconnaissance du bien en tant que patrimoine mondial moins évidente également par les visiteurs.

La réhabilitation du ksar des Aït Ben Haddou est une démarche assez compliquée, dans la mesure où il y a d'abord une approche à adopter auprès de la population (qui a abandonné son village), avant de procéder à la mise en valeur du ksar par l'amélioration des conditions de vie, et la création d'une nouvelle dynamique au sein de l'ensemble.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci