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La gestion des sites du patrimoine mondial au Maroc: Le cas du Ksar Ait Ben Haddou (province de Ouarzazate)

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par Hassan ZAKRITI
Université internationale de langue française au service du développement africain - DEPA 2005
  

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1.4. L'inscription sur la Liste du Patrimoine Mondial : un nouvel essor ?

1.4.1. Les fondements

Le ksar des Aït Ben Haddou est situé dans une zone protégée, en vertu de l'

Arrêté viziriel du 29 juin 1953 portant classement des Vallées des Oasis ( B.O. N° 2125 du 7 juillet 1953 - P .983). Mais cette mesure de protection n'a jamais été appliquée. D'où la dégradation des structures du bâti dans la plupart des ksour de cette vallée, sans que les pouvoirs publics interviennent. Un phénomène qui est dû à plusieurs facteurs dont les plus marquants sont : l'éclatement des structures communautaires et l'abandon des villages par ses occupants à la recherche d'un nouveau mode de vie meilleur à leur sens. La situation de la population ne faisait qu'empirer.

Face à cette situation alarmante, les autorités marocaines ont entrepris à partir des années 1970 des actions ponctuelles susceptibles d'atténuer ce processus de dislocation. Parmi les actions menées dans ce cadre, il y a lieu de citer :

- Le Programme d'Assistance aux populations pour la rénovation des « ksour» réalisé par le Ministère de l'Habitat et de l'Intérieur avec l'assistance du Programme Alimentaire Mondial (PAM) entre 1969 et 1974 ;

- le Pré-inventaire des ksour et des kasbahs du Sud, réalisé par le Ministère des

Affaires culturelles (Centre de l'inventaire) conjointement avec l'Unesco (19 75)1;

- Etablissement d'un Programme d'aménagement touristique concernant les régions de Ouarzazate et d'Errachidia réalisé par le Ministère du Tourisme.

En outre, Le ksar des Aït Ben Haddou fût à plusieurs reprises visité par des spécialistes et des experts de l'Unesco entre 1974 et 1977 : deux rapports sont devenus des références en la matière et font état du même constat : architecture remarquable dont l'existence est fortement menacée. Ces rapports, notamment celui de André

Stevens2 et de Jean Vérité3, ont attiré l'attention des autorités marocaines et de l'Unesco sur la nécessité d'agir en faveur du village. A. Stevens avait même mené - à titre d'incitation- en 1977 des interventions légères sur des biens collectifs : dallage de ruelles, reconstitution d'escaliers, réparation de fontaines et bassins d'eau, entretien de

banquettes et abris publics4.

C'est dans cette mouvance, associée à l'émergence d'un mouvement international en faveur du patrimoine culturel exceptionnel parrainé par l'Unesco, que le Maroc a proposé en 1986 le site ksourien des Aït Ben Haddou pour qu'il soit inscrit sur la liste du patrimoine mondial. Chose qui a été entérinée par l'Unesco le 11 décembre 1987.

Mais paradoxalement, le site ne jouissait à cette date d'aucune mesure de protection juridique au niveau national, car il n'était pas classé en tant que patrimoine national pour différentes raisons : procédure de classement très longue, tutelle peu claire, statut foncier assez complexe.

Néanmoins, un plan de développement des agglomérations rurales (PDAR) pour la commune de Aït Zineb fut adopté en 2001 et la procédure de classement a finalement abouti en janvier 2004.

1 Projet PNUD-Unesco MOR 74/005. 300 ksars sur un total de 1000 environ ont fait l'objet d'une première sélection. Cf. F. DeMicheli, op. cit., p.49.

2 André Stevens, Réhabilitation des kasbas du Sud, Paris, 1977.

3 Jean Vérité, Inventaire, protection et mis en valeur des architectures traditionnelles du Sud Marocain, Paris, 1977.

4 F. DeMicheli, op. cit., p.40

1.4.2. Les justifications d'inscription

Les justifications qui ont amené le Comité du patrimoine mondial à approuver le

classement sont multiples. On lit dans le rapport de suivi périodique fourni par le Maroc (2000) les justifications suivantes :

<< (...) Aït Ben Haddou, à 31 Km au nord de Ouarzazate, est le plus célèbre des Ksour de la vallée de l'Ounila, qui fait l'objet d'une protection globale depuis 1953, avec toutes les vallées des oasis. C'est un extraordinaire ensemble de bâtiments offrant un panorama complet des techniques de construction présahariennes (pisé appareillé en panneresses et boutisses, terre banchée ordinaire, brique crue, etc.) et un raccourci saisissant de la typologie architecturale du sud marocain. Un étonnant grenier forteresse domine la montagne à laquelle s'adosse le Ksar ; ces greniers appelés Agadir ou Ighrem ne sont pas rares au Maroc mais leur caractère défensif n 'est pas toujours affirmé de manière aussi évidente par le choix d'un site de hauteur et le système de fortifications qui unit au village le grenier, conçu comme le dernier bastion de la résistance en cas de siège. » (p.2)

Et dans le dossier de << Proposition d'inscription sur la Liste du patrimoine mondial soumise par le Maroc, que l'état de dégradation de l'ensemble était avancé : intempéries, ruissellement et infiltration des eaux, abandon.. Et plus loin : «..la conscience de l'originalité de cet établissement qui représente une construction humaine unique dans son genre et qui apporte des enseignements toujours actuels à

tous ses visiteurs. » 1

Outre les rapports d'experts, l'examen de l'icomos a été à l'avantage du site : il a estimé que le Ksar Aït Ben Haddou comportant encore de nombreuses constructions en assez bon état, pourrait servir de banc d'essai à une politique de conservation fondée sur le retour aux techniques traditionnelles de travail de la terre et accessoirement du bois.

L'icomos a suggéré que la protection - qui implique de sévères mesures non aedificandi aux abords du ksar Aït Ben Haddou - ne doit pas rester ponctuelle mais doit s'étendre à l'ensemble cohérent et limité de la vallée de l'Ounila.

L'icomos, sous réserve d'un accord du gouvernement marocain à ces recommandations, donna son avis favorable à l'inscription d'Aït Ben Haddou sur la

Liste du patrimoine mondial au titre des critères IV et V 2 :

1 F. DeMicheli, op. cit., p.50

2 Rapport du suivi périodique sur l'état des sites du patrimoine mondial au Maroc (2000), p.3

Critère IV: Aït Ben Haddou est un exemple éminent des ksars du sud marocain illustrant les principaux types de constructions que l'on observe dans les vallées du Draa, du Todgha, du Dadès et du Souss.

Critère V : cet habitat traditionnel, représentatif d'une culture, est devenu vulnérable sous l'effet de mutations irréversibles.

Par rapport a l'authenticité du ksar et l'intégrité du site, le rapport de suivi susmentionné déclare qu'au moment de l'inscription : le ksar Aït Ben Haddou représente une meilleure synthèse de l'organisation de l'espace dans les vallées présahariennes. Cette organisation est illustrée par un type d'habitat rural vernaculaire adapté au climat et aux conditions de vie sociale et utilisant des matériaux fournis par l'environnement (pp.4-5).

Et même après des années de l'inscription (2000) le document rapporte que : malgré l'abandon et le dépeuplement du ksar, les conditions d'authenticité et d'intégrité sont maintenues. Les espaces ont gardé leur morphologie ; néanmoins, certaines maisonnées ont été aménagées à des fins économiques (p.5).

Quant aux traits qui confèrent au ksar une valeur exceptionnelle, le rapport résume ses valeurs ainsi :

? adaptation aux conditions climatiques ;

? fusion et intégration au paysage naturel ;

? simplicité et ancienneté des procédés architectoniques ;

? harmonie des proportions et des volumes ;

? sobriété et beauté de décors ; etc. (p.18)

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon