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Communication politique et communication électorale sur l'Internet

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par Marjorie Pontoise
Université Panthéon Assas Paris II - Master 2 Recherche Droit de la communication 2007
  

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a. Un signe de modernisation de la vie politique

Sites des partis politiques, des candidats, de simples militants, de citoyens, de médias, l'Internet est devenu un outil incontournable de la communication et de la propagande politiques. Par ce biais la campagne électorale s'est trouvé un outil de propagande, qui a en plus l'avantage d'atteindre les jeunes générations moins concernées par les médias traditionnels. On peut y voir une opportunité de modernisation de la vie civique, le simple citoyen devenant acteur à part entière de débats dont il se sentait jusque là exclu. Comme le souligne Bernard Benhamou243(*) : « l'Internet apparaît comme un prodigieux outil de diffusion d'informations qui peut aider les internautes à devenir ces citoyens éclairés qu'une démocratie vivante suppose. Il peut aussi stimuler l'implication des citoyens dans des actions collectives destinées à faire entendre leur revendications, accompagnant la mutation culturelle des formes de militantisme que l'on constate aujourd'hui ». Les politiques commentent sur leurs blogs l'actualité, expliquent leurs prises de position qui sont relayées dans les revues de presse, les partis permettent l'adhésion sur un simple clic. Cette évolution qui déroge aux rituels traditionnels républicains peut heurter les tenants d'un militantisme traditionnel, mais il est aussi certain que ces nouvelles pratiques témoignent d'un renouveau de la vie citoyenne qui est une opportunité pour associer le plus grand nombre au débat public.

L'Internet et les blogs sont un nouvel aspect de la campagne présidentielle de 2007 et un véritable phénomène de société. « Les Français en tête dans la course aux blogs : les blogs, nouvelle passion française » titrait Le Figaro du 10 août 2006244(*) : « plus de trois millions de Français ont créé leur blog et en mai 60% des internautes français avaient visité un de ces sites, classant la France au premier rang pour ce type de consultation. On estime que plus de 7 millions d'internautes consultent un blog chaque mois ». Comme le rappelle l'annuaire « La France en 2006 »245(*) « les plus avertis des acteurs politiques se sont emparés de ce nouvel instrument pour promouvoir leurs idées et leur image, et même à l'échelon local, on ne compte plus les maires de petites communes ou de simples conseillers généraux qui se sont dotés de ces nouvelles tribunes. Certains n'hésitent pas à faire appel aux internautes pour leur servir de boîte à idées ou pour tester des propositions et mesurer leur impact dans l'opinion. En contrepartie, le blog permet aux internautes les plus judicieux, à l'humour parfois ravageur, d'organiser un nouveau genre de contrepouvoir pour répliquer et orienter les débats ». Le cyberespace est devenu un média clef pour promouvoir et échanger les idées, il accompagne et influence nos démocraties modernes. Alors que celles-ci traversent une période de relative désaffection tant en terme de participation qu'idéologique, la nécessité d'utiliser toutes les énergies démocratiques et de tous les outils de communication existants pour « réinventer » la politique implique une utilisation judicieuse de cet univers numérique. L'utilisation des outils immatériels dans la vie politique tient à l'évolution des besoins des « entrepreneurs politiques »246(*). A cet égard, force est de constater qu'une communication et une campagne « continue » doivent être réalisée pour faire face à une opinion publique volatile ; une stratégie spécifique devant être entreprise par les équipes de communication des candidats. En ce sens la « net-politique » n'est pas la simple transposition de la politique traditionnelle sur un média neutre et inerte ; la « net-politique » emprunte des canaux qui ouvrent de nouvelles perspectives à l'information, à la mobilisation, à l'engagement, à la participation politique et à l'action civique. Ce mode de communication inédit s'affranchit ainsi en partie du passage obligé que représente les médias dits de « masse » pour accéder à l'espace public. On peut alors parler de stratégie électronique, qui rassemble et combine les outils techniques les plus aptes à répondre aux attentes des citoyens connectés. La sphère politique dispose de ce média particulier permettant d'informer, de se renseigner, d'échanger des idées, de dialoguer, et ce faisant, d'impulser un renouveau là où la démocratie semblait manquer de souffle. Bruno Salgues précise à ce sujet que « lors des dernières campagnes présidentielle, législative et plus avant municipale, l'outil Internet a pris une place considérable dans leurs déroulés ; nous incitant à nous interroger sur sa place dans le monde politique. Internet s'impose dans les campagnes électorales, génère des nouvelles relations entre les élus et les électeurs...l'Internet sera-t-il le vecteur d'une autre forme de communication avec nos concitoyens ? ». C'est là peut être toute la modernisation de la vie politique : entretenir une nouvelle façon de communiquer entre gouvernants et gouvernés.

La force de l'utilisation de l'Internet pour les campagnes de communication politique est sa complémentarité avec les autres médias, les technologies numériques apparaissent en effet comme accessoires. Au vu de plusieurs enquêtes, nos pouvons constater une convergence des candidats, particulièrement en période électorale, vers la communication télévisée, les relations avec la presse écrite et les réunions publiques plutôt que la communication sur Internet. Cependant nous pouvons soulever qu'en avril dernier, François Bayrou avait appelé les blogueurs à organiser sur Internet (et sur aucun autre support médiatique) un grand débat des candidats à l'élection présidentielle, avant le 22 avril, en ces termes : « je propose que tous les blogueurs d'Internet, que tous ceux qui ont des sites, se groupent pour organiser un débat sur Internet entre Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal, Jean-Marie Le Pen et moi » lors d'une conférence de presse. Des blogueurs comme Christophe Ginisty, Laurent Gloaguen ou encore Daniel Schneidermann s'étaient portés candidats à l'organisation du débat. Ils avaient été concurrencés par les médias professionnels : 20 minutes, RMC Infos et nouvelobs.com. Par ailleurs, « Marianne 2007 », le fil «présidentielle» de l'hebdomadaire « Marianne », s'était déjà associé à plusieurs sites Internet dans l'optique d'un débat ( Latelelibre.fr, Netpolitique, Election-presidentielle.fr, Blogonautes, PoliTICShow). Cette concurrence entre sites s'était doublée d'un début de polémique entre blogueurs, selon certains «quand il s'agit de se mettre en valeur, il y a beaucoup d'ego disponibles» et «la proposition de François Bayrou tient du gadget». Certains journalistes avaient alors titré « Bayrou sème la zizanie sur le web »247(*).

Le média Internet a échoué dans l'organisation d'un débat entre les principaux candidats avant le premier tour de l'élection présidentielle. En dépit de la décision d'utiliser une « page blanche », c'est-à-dire, de renoncer à l'utilisation de toute marque ou logo dans la diffusion des échanges entre les candidats, les sites et les blogueurs regroupés dans une invitation commune n'ont pu convaincre François Bayrou, Jean-Marie Le Pen, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy de se réunir ensemble, le lundi 16 avril au matin, dans un studio préparé pour les accueillir. La blogosphère politique s'est fait l'écho de ces efforts durant la semaine précédent le débat. Plusieurs réunions et de violents échanges de courriels avaient fini par dégager le sentiment qu'il était difficile de permettre à douze candidats de s'exprimer largement et de façon équitable dans un évènement unique. Plus de quatre Français sur cinq se prononçant dans tous les sondages sans exception pour les quatre « grands candidats », il était plus réaliste de s'en tenir à cette liste de quatre noms pour confronter directement aux Français ceux qui sont en position d'occuper la présidence de la République. L'invitation en ce sens lancée le 10 avril par des différents sites n'a jamais, à aucun moment, rassemblé l'assentiment des quatre participants. Seul François Bayrou a, de façon continue et non ambiguë, affirmé sa disponibilité. Ségolène Royal l'a d'abord suivi, tandis que Jean-Marie Le Pen, se disant « très occupé », proposait de se faire remplacer par Bruno Gollnisch248(*). Seul Nicolas Sarkozy avait déclaré qu'il n'y participerait pas, cette défaillance mettait à mal l'idée même du quatuor. Avertie de ce refus, l'équipe de Ségolène Royal s'était à son tour désistée, mettant fin à un projet de débat en ligne. Pourtant ce nouveau procédé de confrontation des idées aurait pu bénéficier d'un statut particulier : normalement les médias doivent respecter une stricte égalité des temps de parole et d'antenne entre les candidats, mais cette règle ne s'applique pas sur l'Internet, support sur lequel le CSA n'est pas compétent. Cette opportunité « d'essayer » un nouveau mode de communication sur la toile pour les candidats, bien qu'ayant échoué, nous permet de voir qu'Internet peut enrichir la sphère communicationnelle politique, et la transformer.

D'autre part, le web est le terrain idéal pour mettre à jour l'affect, l'indignation, l'ironie, alors que le langage des grands médias est policé par des normes communément admises. Pour exemple, les postures extrémistes s'y dévoilent aussi avec plus de spontanéité et les sites satiriques contre Ségolène Royal ou Nicolas Sarkozy par exemple, ne pourraient voir le jour à la télévision249(*). Une place plus indépendante et autonome est accordée aux internautes, dans la limite du respect des règles légales qui entourent l'exercice de la liberté d'expression. Pour Monique Dagnaud, « l'effet le plus éclatant sur le Net est sa vertu thérapeutique. Il opèrent régulation psychique que la société, car il suggère que chacun à la faculté de faire entendre sa voix dans l'arène. A [son] sens, Internet propose à chacun des citoyens un levier pour démultiplier sa puissance d'action et surtout sa puissance à collaborer ». Enfin pour Thierry Crouzet250(*), « le Net procure un subtil plaisir à l'ego, et il comble le besoin de lien social. Il est le talisman d'une société qui hisse au pinacle l'expression de soi. Ainsi, à sa portée, pour le moment, est davantage culturelle que directement politique ». Dans cette lignée de participation active des citoyens, il apparaît logique qu'après tout le processus d'information et de débat, le moment du vote apparaisse : la concrétisation d'un vote électronique n'est pas encore envisageable, mais l'on peut soulever différents aspects de modernisation dans un but le lisibilité des informations politiques mises en ligne et dans une optique de démocratie électronique.

* 243 N° 327 de la revue Regards sur l'actualité, « La démocratie électronique » : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/catalogue/3303332603275/index.shtml

* 244 http://www.lefigaro.fr/medias/20060810.FIG000000182_les_francais_en_tete_dans_la_course_aux_blogs.html

* 245 Etude de la Documentation Française

* 246 Daniel Van Lerberghe, « Réinventer la politique dans le cyberespace », janvier 2004. « La notion d'entrepreneurs politiques souligne le fait que les responsables politiques sont de plus en plus amenés à agir en qualité de chef d'entreprise ; la vie politique mais aussi la vie publique et institutionnelle, intègre les lois de l'entreprise au sens large ».

* 247 http://www.plusnews.fr/articles/000362_bayrou_debat_interne.php

* 248 Délégué général du Front National : http://www.gollnisch.com/

* 249 www.segolenades.com/segolene-royal/segolene-royal-cest-juppe-sans-les-bottes/, zero.royal.over-blog.com/reglement-blog.php, sarkostique.xooit.fr/t2687-sego-tend-la-main-aux-centristes.htm, http://www.desirsdevent.com/, http://www.segostop.com/people/, http://www.paslesroyal.com/

* 250 Auteur du livre « Le Cinquième Pouvoir »

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille