La question Kaliningrad dans les relations UE - Russie( Télécharger le fichier original )par Hafid ASSAOUI Université de Perpignan - Master 2 droit public 2007 |
B/ Procédure Du Programme TACISTACIS s'adresse donc, en premier lieu, via une procédure d'appels d'offres, aux sociétés d'ingénierie ou de conseil, voire le cas échéant à des organismes publics, des associations ou des ONG. Une des caractéristiques de TACIS est de reposer sur une double approche : 1- approche sectorielle L'approche sectorielle qui est certes prédominante mais qui se conjugue avec des actions transversales répondant à des impératifs géographiques ou aux besoins de certaines catégories de populations. Aussi dès 1991, des régions prioritaires furent sélectionnées pour mettre en place dans ces zones des programmes cohérents, fondés sur le choix d'un secteur particulier d'activités fonction des atouts de la région bénéficiaire. Le choix de miser sur des régions résulta d'une volonté affichée d'accroître l'efficacité de l'aide, mais aussi sa visibilité. Il reste qu'au-delà de cette ambition, le choix de régions prioritaires obéit à plusieurs impératifs. En premier, la Communauté opta pour les régions les plus avancées dans les réformes (par exemple Saint-Pétersbourg au début des années 1990). Ensuite, le choix des régions pilotes répondit à des motivations économiques : la sélection de la Sibérie occidentale fut dictée par la richesse en ressources naturelles de cette aire géographique). Enfin, la position stratégique de certaines régions put également conduire à les privilégier : tel fut le cas de Kaliningrad ainsi que la partie nord-ouest de la Russie en 1995, date de l'entrée de la Finlande dans l'UE19(*). Mais cette volonté explicite de prendre en compte les niveaux régional et local reposait aussi sur des motivations implicites. La Communauté espérait ainsi développer des relations horizontales avec les régions sans nécessairement devoir passer par le centre. 2- L'approche communautaire L'approche communautaire releva enfin d'une volonté d'insérer les régions russes dans l'économie mondiale et de resserrer leurs liens avec leurs homologues européennes. Dans cette perspective, la Communauté institua d'ailleurs des sous-programmes dont le but fut de développer les liens entre certains acteurs européens et leurs homologues russes20(*). En ce qui concerne le montant des dotations allouées, ce sont quelque 4,2 millions d'euros qui ont été affectés entre 1991 et 2001 à l'ensemble des pays de la zone concernée et la Russie a, pour sa part, reçu 30,2 % (soit 1,27 million d'euros) du total des fonds (hors programmes régionaux). Par comparaison, les cinq pays d'Asie centrale n'ont perçu, à eux seuls, que 7,4 % du total de ces fonds. Il convient néanmoins de souligner qu'à côté des programmes nationaux, 81 28,3 % des fonds TACIS ont été octroyés dans le cadre de programmes régionaux, lesquels ont vocation à favoriser les actions de coopération entre Etats bénéficiaires, en particulier dans le secteur nucléaire, la réforme de l'administration publique, les transports. Le bilan qui peut être tiré, au vu des objectifs initialement fixés et de l'impact attendu des actions engagées dans le cadre de cette première vague de programmation, reste cependant nuancé. Les résultats les plus tangibles, selon les évaluations menées par la Commission, auraient été obtenus en matière de restructuration des entreprises et de ressources humaines : ces deux secteurs se sont d'ailleurs vu octroyer près de 39 % des financements TACIS attribués à la Russie. Le domaine de la sécurité nucléaire n'a pas été non plus négligé puisqu'il a perçu quelque 20,2 % des fonds, ce qui a permis de lancer l'élaboration d'une nouvelle législation sur la sûreté nucléaire, de mettre en place de nouvelles instances indépendantes de réglementation, de fournir des équipements en vue de relever le niveau de la sûreté dans les centrales et enfin d'aider à l'émergence d'une culture d'entreprise axée sur le caractère fondamental de la sécurité. Ainsi, si certains succès ont pu être enregistrés, il reste que la lenteur de la mise en oeuvre des réformes sur le terrain tout autant que les insuffisances intrinsèques au programme TACIS ont été des freins à une pleine efficacité des actions. À cet égard, quatre types de griefs sont généralement formulés à l'encontre du programme TACIS : - des objectifs imprécis et peu adaptés aux réalités du terrain : le caractère par trop général des objectifs retenus pour parvenir à l'instauration d'une économie de marché et d'une réelle démocratie, et ce malgré l'énoncé de cinq axes prioritaires, a conduit, singulièrement au cours des premières années, à une sélection de projets difficilement viables et à une dispersion préjudiciable des dotations. Le principe d'une programmation pluriannuelle afin d'éviter les à-coups dans la conduite des actions ne semble cependant pas encore être pleinement concluante ; - une gestion par trop centralisée au profit de la Commission : si on ne peut contester la préoccupation légitime de cette dernière de vouloir s'assurer de la bonne destination des fonds dans un pays où la situation politique, économique et sociale demeure volatile, cette concentration du pouvoir de décision entre les mains de la Commission a toutefois abouti à ce que les procédures d'instruction des projets jusqu'à leur mise en oeuvre s'étire sur une durée beaucoup trop longue (jusqu'à 18 mois). Dans cette perspective, le Conseil européen de décembre 1999 avait acté le fait que la définition et la programmation par la Commission des objectifs de TACIS et de l'APC 21(*)devaient être conduites simultanément. Parallèlement, le nouveau règlement comporte une clause suspensive reprenant celle figurant dans l'APC. Pour autant, les deux textes restent dans une certaine mesure, au regard du sens à donner à la notion de coopération, en décalage. Doté d'une enveloppe de 3 138 millions d'euros pour les six années d'exécution du programme, les actions doivent s'articuler autour d'objectifs moins nombreux et donc plus ciblés dans le but de parvenir à des résultats plus tangibles. Ces actions doivent par ailleurs et dans toute la mesure du possible reposer sur des projets bâtis de telle façon qu'ils atteignent une envergure suffisante pour avoir un impact significatif. 3Les domaines prioritaires Dans cette configuration, six domaines d'intervention prioritaires ont été retenus. Le soutien aux réformes institutionnelles, juridiques et administratives. La réforme institutionnelle, juridique et administrative couvre l'organisation et les politiques des pouvoirs publics à l'échelon national, régional et local, la mise en place et le fonctionnement du système judiciaire, le développement des compétences notamment des professionnels du droit ainsi que l'aide à l'émergence d'une société civile ; - le soutien au secteur privé et l'aide au développement économique. L'appui apporté au développement du secteur privé et de l'économie doit encourager l'esprit d'entreprise et concourir à la densification du tissu des petites et moyennes entreprises, notamment au travers de partenariats industriels ; le développement du système bancaire et financier et la mise en place d'un cadre économique adapté émargent également à cette rubrique ; - le soutien à la gestion des conséquences sociales de la transition. Il s'agit de prendre en compte les conséquences sociales de la transition à la lumière des effets de la restructuration industrielle et de soutenir pour ce faire la réforme des systèmes de santé, de retraite, de sécurité sociale et d'assurance, ainsi que de favoriser la définition de mesures de reconversion ; - le développement de réseaux d'infrastructures de transports, de communication et de pipe-lines ; la promotion de la protection de l'environnement et de la gestion des ressources naturelles : l'accent doit être mis sur l'alignement des normes russes en la matière sur les normes européennes, ainsi que sur la définition de modes de gestion durable des ressources naturelles. Il convient également de mentionner les aides envisagées pour le renforcement de la sûreté nucléaire et la mise au point de stratégies de gestion du combustible usé et des déchets ; - le développement de l'économie rurale. : l'objectif est d'accompagner le processus de réformes engagé par la Russie en ce qui concerne la privatisation des terres, l'amélioration de la distribution des produits agricoles et de l'accès aux marchés. 4-La programmation TACIS Elle comporte par ailleurs, pour certains domaines tels que la protection de l'environnement ou l'encouragement à l'installation de liaisons entre réseaux de transport, des programmes de coopération transfrontalière ou transrégionale entre les nouveaux Etats indépendants eux-mêmes ou entre ces pays et l'Union européenne.. Ainsi, la Commission européenne a initié en août 1999 une étude de faisabilité d'un projet de transport multimodal (Europe de l'Est - Asie centrale). Au demeurant, ce dossier s'intègre dans un ensemble plus vaste de projets d'assistance technique et d'investissements financés par l'UE en vue de constituer à terme une zone de transport « Europe, Caucase, Asie Centrale »22(*). De même, un programme transfrontalier (Tacis CBC) a été mis en place autour de trois axes afin de stimuler la coopération et d'améliorer les contacts entre les communautés frontalières : le développement d'un réseau d'infrastructures, la protection de l'environnement et la gestion des ressources naturelles, et l'aide au secteur privé et au développement économique. TACIS occupe donc une grande place dans les relations russo-européennes, et on rappellera qu'il joua un rôle dans la réaction européenne à l'intervention russe en Tchétchénie, fin 1999. Pour la première fois, et bien qu'aucune sanction n'ait été prévue, la réaction de l'UE mobilisa de façon cohérente les divers instruments européens. Alors que le Parlement demanda l'application de la clause de conditionnalité pour la poursuite de l'assistance23(*), le conseil Affaires générales, réuni le 24 janvier 2000, décida de consacrer les projets TACIS au renforcement de la démocratie en Russie, mettant entre parenthèses les autres secteurs prioritaires24(*). Le programme d'action 2000 prévoyait ainsi, pour la Russie, la mise en oeuvre d'actions visant à renforcer l'indépendance des médias, la tolérance interethnique, l'approfondissement de l'Etat de droit et la défense des droits individuels25(*).Plus de 170 projets ont déjà été engagés tant au niveau de l'Etat fédéral que des régions. Entre 1997 et 2000, la Russie a reçu quelque 8 millions d'euros destinés en premier lieu à favoriser l'émergence d'une société civile plus démocratique donnant tout son sens à la notion de respect des droits de l'Homme. Pour les années 2002-2004, le but est de poursuivre, en liaison en particulier avec les ONG russes et internationales, les actions engagées en mettant l'accent sur les projets privilégiant le renforcement des capacités d'action de la société civile, la formation aux exigences qu'impliquent le respect des droits de l'Homme et de la règle de droit, la liberté d'expression et l'indépendance des médias. * 19 Delcour L., « La politique de l'union européenne en Russie (1990-2000). De l'assistance au partenariat ? », L'Harmattan, Paris, 2001, p. 149. * 20 Les programmes Démocratie ; initiative de Productivité pour les stages de formation en Europe occidentale pour des cadres d'entreprises russes ; European Senior service Network pour les échanges entre les cadres retraités des entreprises européennes et leurs homologues russes (entreprises privatisées) ; Tempus (Trans-European Scheme for Higher Education) pour les échanges inter universitaires. * 21 L'APC appréhende cette notion dans une acception large et elle recouvre un nombre élevé d'orientations jugées comme prioritaires tandis que le nouveau règlement de TACIS demeure, pour ce qui le concerne, attaché à une définition très circonscrite de la notion de coopération. * 22 Moniteur des travaux publics, Europe et International Transports BCEOM, Projets publics et privés, n° 5 013 du 24 décembre 1999, page 101. * 23 Résolution du 18 novembre 1999 et du 7 décembre 1999, Bulletin de l'Union européenne, n° 11 et n° 12, 1999. 100 Bulletin de l'Union européenne, n°1-2, 2000, point 1.6.102. * 24 Bulletin de l'Union européenne, n°1-2, 2000, point 1.6.102. * 25 Rapport général sur l'activité de l'Union européenne 2000, Luxembourg Office des publications officielles des Communautés européennes, 2000, point 937. |
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