4) Les 35 heures : une aubaine pour les femmes ?
La mise en place des RTT a suscité de fortes attentes
auprès de la population salariée féminine,
traditionnellement demandeuse d'une amélioration de la conciliation
entre les contraintes de la vie professionnelle et celles de la vie
privée. Cette aspiration à un meilleur équilibre de vie
était en effet présente dans l'esprit des lois sur les
35 heures. Qu'en est-il exactement aujourd'hui ? Les femmes ont-elles
retiré un bénéfice personnel et professionnel de la mise
en place de la réduction du temps de travail ?
Les problématiques féminines ne semblent pas
avoir été spécifiquement prises en compte lors des
négociations sur la réduction du temps de travail, ce qui est
regrettable, dans la mesure où il y avait là matière
à une réflexion sur la façon de modifier le
caractère sexué de la division du travail, les femmes
n'occupant pas les mêmes postes que les hommes, du fait notamment d'une
disponibilité professionnelle jugée insuffisante, et
d'améliorer la position des femmes dans l'entreprise. L'influence de
cette réforme sur la place des femmes dans l'entreprise est sujette
à discussion.
D'une part, l'impact des RTT sur la conciliation entre vie
privée et vie professionnelle est globalement jugé positif par
les femmes qui travaillent, puisqu'elles étaient 61% à constater
une amélioration en mai 2001. Toutefois, au-delà de ce
résultat global, les opinions divergent fortement en fonction de la
place des femmes dans la hiérarchie de l'entreprise et de la
catégorie socioprofessionnelle à laquelle elles appartiennent. Si
les femmes cadres constatent une amélioration à 72,5 % de
leur vie quotidienne - contre 8 % constatant une dégradation, et
19,5 % aucun changement -, seules 40,2 % des femmes non
qualifiées font le même constat, alors qu'elles sont 20,4 %
à ressentir une dégradation et 39,5 % à ne voir aucun
changement.
Mais ces disparités sont encore plus fortes concernant
l'impact des RTTsur l'évolution des conditions de travail.
Evolution des conditions de travail selon le sexe et la
catégorie socioprofessionnelle
(en %)
|
|
Catégorie socioprofessionnelle
|
Conditions de travail
|
|
Amélioration
|
Sans changement
|
Dégradation
|
Hommes
|
Cadre
|
29,2
|
42,9
|
27,9
|
Intermédiaire
|
30,9
|
40
|
29,1
|
Qualifié
|
24,3
|
47,3
|
28,4
|
Non qualifié
|
24,2
|
48,5
|
27,4
|
Ensemble
|
27
|
44,8
|
28,3
|
Femmes
|
Cadre
|
42,4
|
39,3
|
18,4
|
Intermédiaire
|
21,3
|
50,9
|
27,8
|
Qualifié
|
25,2
|
49,2
|
25,5
|
Non qualifié
|
20,9
|
43,7
|
35,4
|
Ensemble
|
25,1
|
47,7
|
27,2
|
Ensemble
|
26,4
|
45,6
|
28
|
Source : RTT et Modes de Vie - DARES 2004
|
Suite à cette étude, nous pouvons constater que
29,2% des hommes cadres ainsi que 42,4% des femmes cadres ont constaté
une amélioration de leurs conditions de travail depuis la mise en oeuvre
des RTT.
Ainsi, bien que les femmes soient plus nombreuses que les
hommes à se déclarer satisfaites des RTT, elles ne constituent
toutefois pas un groupe homogène, et les clivages entre les
différentes catégories de salariés se reproduisent au sein
de la population féminine. Au-delà de la satisfaction des femmes
cadres, qui étaient celles qui souffraient le plus, avant la mise en
place des RTT, d'un manque de temps pour leur vie personnelle, demeure la
déception des autres femmes salariées, et notamment des femmes
non qualifiées, pour qui les 35 heures sont finalement venues
introduire plus de contraintes que de souplesse, tant dans la vie au travail
que dans la vie privée. Ces dernières ont en effet subi de plein
fouet les contraintes de la flexibilité, qui s'est souvent soldée
pour elles par une désarticulation de leurs différents temps de
vie, alors même que leur temps de travail est fortement contraint par les
impératifs de la vie familiale et domestique.
En effet, la modulation du temps de travail est source d'une
irrégularité particulièrement préjudiciable pour
les femmes qui ont, dans leur grande majorité, même si les choses
évoluent pour les jeunes générations, la charge de
l'organisation de la vie familiale.
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