3) Un problème important : l'évolution des
rémunérations a été freinée :
Outre la dégradation des conditions de travail et
d'articulation entre vie professionnelle et vie privée, les 35 heures se
sont accompagnées d'une modération salariale qui a pesé
sur tous les salaires, mais dont les effets se sont faits le plus fortement
ressentir sur les plus bas d'entre eux.
Certes, le phénomène de la modération
salariale ne date pas des 35 heures : la désindexation des salaires sur
l'inflation, cumulée à la montée du chômage, ont
été à son origine. Toutefois, comme l'a montré une
étude récente de l'INSEE, ce processus a été
accentué à partir de 1998 par la mise en place des 35 heures. De
fait, pour compenser la réduction du temps de travail, la plupart des
accords ont posé le principe d'une modération des salaires dans
les deux années suivant leur signature.
L'INSEE souligne que les salaires du secteur des services,
nets de cotisations sociales et déflatés des prix à la
consommation, ont connu des évolutions particulièrement
dynamiques entre 1996 et 2000 (+ 8,2%). Plusieurs facteurs ont contribué
à ce résultat : la baisse des cotisations salariales, le recul de
l'inflation et la hausse du niveau de qualification. Néanmoins, l'INSEE
met en évidence le « contexte de modération salariale
liée à la réduction du temps de travail »
Si elle rappelle que pour 90 % des salariés, la
réduction du temps de travail n'a entraîné aucune perte de
salaire (une compensation étant réalisée sous la forme
d'une hausse du salaire horaire ou d'une prime spécifique incluse dans
le salaire de base), l'INSEE souligne que cette compensation s'est, pour plus
de la moitié des salariés concernés par un accord de
réduction du temps de travail, accompagnée d'un gel ou d'une
augmentation moindre des salaires pendant une durée moyenne de deux ans.
Par ailleurs, l'INSEE met en évidence « un
resserrement des bas salaires vers le SMIC», notamment parce que si
« les salariés rémunérés au niveau du
SMIC ou des garanties mensuelles de rémunération ont leur pouvoir
d'achat garanti par des mécanismes de revalorisation, ce n'est pas le
cas des salariés rémunérés légèrement
au-dessus des minima légaux, qui ont vu leur salaire freiné par
les accords de modération salariale liée à la
RTT.»
Enfin, l'étude de l'INSEE fait apparaître que
« la réorganisation du travail liée à la RTT a
entamé certaines primes ». En effet, la modération
salariale n'a pas porté seulement sur le salaire de base, mais s'est
également traduite dans les rémunérations annexes et en
particulier sur les primes. La part des primes dans la
rémunération globale a ainsi diminué entre 1999 et 2000,
surtout pour les ouvriers pour lesquels elle est passée de 13,9 % en
1999 à 12,7 % en 2000. Cette diminution a concerné surtout les
primes liées aux contraintes de poste. En effet, à
activité et à structure de qualification données, «
les entreprises passées aux 35 heures » ont
attribué en 2000 moins de primes de contrainte de postes que les
entreprises restées à « 39 heures » ». Cette
limitation des primes a surtout concerné les ouvriers, pour lesquels ce
type de primes est une composante importante de la rémunération.
De même souligne l'INSEE, « l'annualisation et la modulation du
temps de travail ont entraîné la transformation de certaines
heures supplémentaires en heures prises en compte dans la durée
légale, ce qui a induit un manque à gagner pour les ouvriers et
les employés.»
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