2) Le renforcement des clivages
entre les salariés au sein même de l'entreprise :
Ayant accentué le clivage entre salariés des
petites et grandes entreprises, les RTT ont en outre accru également les
clivages au sein même de l'entreprise, en n'ayant pas la même
incidence selon la place que les salariés occupent dans la
hiérarchie.
Les cadres sont-ils les grands gagnants des RTT ?
Les 35 heures ont fragilisé la catégorie de
cadres et dégradé leurs conditions de travail. Longtemps
caractérisés par un temps de travail très
élevé et par leur zèle, les cadres ont toujours plus
travaillé que les autres salariés. La période qui a
précédé la mise en oeuvre des 35 heures était
d'ailleurs celle d'une grande tension entre les cadres et les entreprises au
sujet même de leur durée de travail.
Alors qu'ils avaient jusque-là toujours
considéré qu'ils n'avaient pas à compter leur temps, les
cadres ont commencé à revendiquer un contrôle plus strict
de leurs horaires au tournant des années 1990. Touchés eux aussi
par le chômage alors qu'ils s'étaient pleinement
dévoués à l'entreprise, les cadres se sont sentis trahis :
« avant les années 1990, les cadres vivaient leur relation à
l'entreprise comme une relation de confiance ».
En contrepartie d'une stabilité de l'emploi, les cadres
acceptaient de travailler pour l'entreprise sans compter leur temps. Cette
relation a été fortement déstabilisée, lorsque les
cadres ont découvert que les entreprises pouvaient les licencier sans
aucune hésitation, et bien souvent dans un but purement financier, soit
pour accroître la valeur du capital, soit pour assurer une meilleure
rémunération aux actionnaires
De ce fait, lors de la mise en place des 35 heures, les cadres
se sont montrés, dans leur grande majorité, très attentifs
à ne pas être lésés par rapport à l'ensemble
des salariés. Malgré un certain scepticisme quant au changement
que la réduction du temps de travail était susceptible d'apporter
sur leurs propres conditions de vie, tant personnelles que professionnelles,
malgré aussi la crainte d'une dévalorisation, les cadres ont
été porteurs d'une revendication forte et extrêmement
claire : celle de bénéficier, à l'instar des autres
salariés, des modalités de réduction du temps de travail.
Par ailleurs, il n'est pas rare, comme l'ont souligné
à maintes reprises les personnes auditionnées, que les cadres
aient du mal à bénéficier de toutes leurs journées
de réduction du temps de travail, même si la période
d'adaptation terminée, le nombre de journées non prises tend
à décroître. A cet égard, il est regrettable que les
formules d'épargne de ces temps de repos non utilisés ne soient
pas plus développées.
Toute la tâche d'organisation des équipes et de
l'activité de l'entreprise repose avant tout sur les cadres, qui
subissent donc sa plus grande lourdeur avec la réduction du temps de
travail.
|