B) DEUX APPROCHES DIFFERENTES DE LA MISE EN PLACE DES
RTT :
Comme l'indique un rapport de commission, « du
point de vue des entreprises, les RTT a été un exercice
imposé dans la grande majorité des cas et ne
relève donc pas d'un choix délibéré pour un grand
nombre ». Conscients des conséquences de cette mesure sur
le tissu économique français, les pouvoirs publics avaient
toutefois mis en place des dispositifs d'aides ; ceux-ci ne se sont
cependant pas révélés suffisants pour compenser la lourde
contrainte imposée aux entreprises dans leur gestion financière
et organisationnelle. Conscients aussi des risques pesant spécifiquement
sur les PME et les TPE, les pouvoirs publics avaient de plus mis en place un
dispositif spécifique à ces entreprises, qui ne leur a
malheureusement pas toujours permis de faire face et n'a pas
empêché l'accroissement des inégalités entre grandes
et petites entreprises.
Ce n'est pas une surprise ; dès la mise en oeuvre
de la réduction du temps de travail, de nombreux observateurs avaient
alerté le Gouvernement sur les dangers qu'il y avait à imposer
une réduction du temps de travail de manière uniforme et
impérative.
Ainsi dans un rapport publié dès 1999, le Centre
des jeunes dirigeants estimait que « la loi, centrée sur
la réduction obligatoire du temps de travail, ne fait que changer une
norme et ne tient pas compte de la diversité qui existe entre les
entreprises et qui ne fait que s'accroître ».
Quelque années plus tard, il est malheureux de
constater que ces analyses étaient fondées. Si les
stratégies de gestion du choc externe qu'ont représenté
les RTT ont été diverses et étalées dans le temps,
selon que les entreprises ont ou non choisi de bénéficier des
dispositifs incitatifs de la loi Aubry I, il n'en demeure pas moins que la
réduction du temps de travail a eu de lourdes conséquences pour
l'organisation et la gestion des entreprises, quels que soient leur taille et
leurs secteurs d'activités.
Globalement, il apparaît que si les grandes entreprises
ont été à même de profiter du passage aux
39 heures pour négocier une meilleure organisation du travail et
ainsi augmenter leur productivité, les petites et moyennes entreprises
ont, à l'inverse, le plus souvent été dans
l'incapacité de tirer partie de la négociation sur la
réduction du temps de travail, qui s'est ainsi
révélée pour elles une lourde contrainte
supplémentaire, parfois même un handicap.
Par ailleurs, quelle que soit la réussite ou non du
passage aux 39 heures pour les entreprises, la RTT a dans tous les cas
induits des coûts de gestion et des pertes de compétitivité
pour l'ensemble des entreprises.
Des stratégies diverses
de gestion des RTT :
Comme l'a indiqué un rapport (M. Rouilleault*),
« vis-à-vis de la réduction du temps de travail, la
diversité est la règle ». En effet, ce rapport
recense les multiples cas de figure qui peuvent se présenter au regard
de la situation des entreprises face au passage aux RTT.
Alors qu'un tout petit nombre d'entreprises avaient
réduit le temps de travail à 35 heures ou moins avant 1996,
certaines se sont inscrites dans le cadre de la loi de Robien, dans sa version
offensive ou défensive, d'autres l'ont fait à partir du second
semestre 1998 dans celui de la loi Aubry I, de façon offensive ou
défensive ou même sans bénéficier des aides qu'elle
prévoyait, ou à partir de début 2000 dans le cadre de la
loi Aubry II. D'autres enfin ont procédé à
l'application directe d'un accord de branche.
Une fois passées aux 35 heures, les entreprises
avaient à leur disposition la possibilité de jouer sur trois
paramètres pour préserver leur propre équation
économique : les allègements de charges conditionnés
à la réduction du temps de travail, l'amélioration de leur
organisation et la modération salariale.
Suivant qu'elles ont ou non été dans la
capacité de jouer sur un ou plusieurs de ces paramètres, les
entreprises ont anticipé ou non le passage aux 35 heures et plus ou
moins bien réussi à absorber le choc qu'elles ont
constitué pour elles.
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