L'une des principales sources des difficultés de
gestion au niveau local se situe au niveau du déficit en ressources
humaines. Celles-ci sont constituées du personnel administratif et
technique travaillant pour la commune et des élus locaux qui doivent
diriger la mise en uvre des stratégies.
5.1.1.1 Les capacités des ébus b~caux
Une étude menée en 2003 par le PNUD (BEDIYE et
a!., 2003) révèle que les élus locaux ont un niveau
d'instruction très faible. Comme le montre le tableau 1, près de
30 % d'entre eux sont sans diplôme et seulement 26 % ont un niveau
universitaire. Ceci représente un handicap important surtout lorsqu'on
sait que la décentralisation est a sa toute première
expérience. En tant que premiers élus locaux ils sont donc
appelés a mettre en place toute une organisation institutionnelle et
structurelle de gestion des communes. Le défaut d'instruction rend donc
particulièrement difficile la tâche des élus locaux dont
certains ne maItrisent pas actuellement l'étendue de leurs
responsabilités nile statut de la commune au sein de l'Etat.
Tableau 1 : Classification des élus par niveau
d'instruction
Source : BEDIYE eta! (2003).
Cette catégorisation des élus locaux n'est que le
reflet de la situation nationale car le taux d'analphabétisme au
Bénin est de 70%.
La catégorisation professionnelle de élus
locaux a montré qu'une forte proportion d'entre eux à un bas
niveau et exercent des petits métiers. Ceci a un impact important sur
l'exercice de leur fonction car les élus locaux dans leur ensemble ne
connaissent pas les roles qu'ils doivent jouer aux postes qu'ils occupent. Ils
ne connaissent pas non plus les relations qu'ils doivent développer les
uns envers les autres et avec les services déconcentrés de
l'Etat. Cette ignorance est source de conflits d'attribution qui ne facilitent
pas l'exercice serein des fonctions communales (BEDIYE et a!., 2003).
Toutefois, les élus ont de très grandes
ambitions pour leurs communes et ceci dans divers domaines. Mais ils n'ont pas
toujours les capacités intellectuelles pour traduire ces ambitions en
programmes et projets de développement.
La situation serait meilleure s'ils disposaient d'un personnel
qualifié, capable de traduire leurs visions politiques en programmes
concrets.
5.1.1.2 Le deficit depersonnel communal
Le faible niveau d'instruction des élus locaux ne
serait pas dommageable en soi si ceux-ci disposaient d'un personnel communal de
qualité. Or, il existe là également un déficit
aussi bien qualitatif que quantitatif.
Les communes béninoises ont hérité du
personnel des anciennes sous préfectures et elles ont le droit de faire
de nouveaux recrutements d'agents sur leurs budgets propres. Mais compte tenu
de leur récente installation et des difficultés
budgétaires qu'elles rencontrent, peu de communes ont réellement
recruté de nouveaux agents pour étoffer leur personnel.
C'est donc presque exclusivement le personnel des anciennes
sous préfectures qui est actuellement employé dans les communes.
Or une étude de la Maison des Collectivités Locales en 2000 a
montré que l'état des ressources humaines au niveau des futures
collectivités locales est peu reluisant. Ce personnel souffre en effet
de déficits aux plans quantitatif et qualitatif, mais fait
également l'objet d'une mauvaise gestion.
L'effectif total du personnel communal pour les 77 communes du
Bénin est de 4066 agents très inégalement répartis
sur l'ensemble du territoire national. L'exemple le plus illustratif de cette
disparité est celui de la commune de Cotonou qui a elle seule compte
plus de 1000 agents soit près de 25% du total national.
Au niveau qualitatif, on peut constater au sein du personnel
communal une forte prépondérance d'agents appartenant a une
catégorie peu ou pas qualifié (51,82% en catégorie D et
11,6% en catégorie E). Il y a donc une prépondérance des
agents ayant vocation a occuper des emplois correspondant a des tâches
d'exécution courante (catégorie D) ou ne nécessitant pas
de qualification particulière (catégorie E) au détriment
des agents ayant vocation a occuper des emplois correspondant a des fonctions
de direction, de contrôle (catégorie A, 4,76%),
d'élaboration et d'application a haut niveau (catégorie B, 2,04%)
ou méme a des tâches d'exécution spécialisées
(catégorie C, 4,01%).
Les services des communes béninoises sont donc
systématiquement sous encadrés a l'exception des grandes villes
(Cotonou, Porto-Novo, Parakou) qui disposent d'un assez fort taux de personnel
d'un bon niveau technique. Méme les villes moyennes ne disposent
qu'exceptionnellement de cadre de niveau licence. En moyenne, moins de 5% du
personnel des communes est éligible a la catégorie des cadres.
Mais comme le souligne NACH MBACK (2003 :441), le personnel de la
catégorie des cadres ne signifie pas non plus personnel qualifié.
Le critère, ici, tient essentiellement compte du niveau d'étude
ou de formation de l'agent, sans que ces études ou cette formation ne
répondent forcément a un profil
spécifique en matière d'ingénierie administrative ou
technique.
Ainsi, l'enjeu des ressources humaines communales se
réduit parfois a la simple question de savoir oU trouver un personnel
minimum capable d'appuyer les nouveaux élus locaux pour assurer le
démarrage des communes (NACH MBACK, 2003: 440). Si l'on ajoute a cela le
faible niveau d'instruction des élus locaux décrit plus haut la
carence en ressources humaines des collectivités locales prend des
dimensions dramatiques.
Les collectivités locales ont de ce fait
d'énormes difficultés pour élaborer des plans de
développement communautaire conséquents. Il est encore plus
délicat de leur demander l'élaboration de stratégies
sectorielles rentrant dans le cadre de politiques spécifiques de lutte
contre la pauvreté.
De ce fait, elles font massivement appel a des consultants et
a des structures de soutien a la décentralisation pour
l'élaboration des stratégies. Mais pour leur mise en )uvre il
leur faut nécessairement disposer de personnel qualifié. Le
renforcement des capacités a travers la formation professionnelle
s'impose donc aux collectivités locales afin qu'elles soient
dotées d'un personnel a la hauteur de leurs responsabilités.