Une implication efficiente des collectivités locales
dans la mise en uvre du DSRP nécessite au préalable
l'organisation d'un processus d'information-sensibilisation sur son contenu.
Pour la mise en uvre des stratégies du DSRP, des
actions de vulgarisation sont prévues. Le document énonce a cet
effet que la mise en uvre efficace du DSRP repose sur un certain nombre
d'exigences dont l'une essentielle est sa bonne connaissance et son
appropriation par tous les acteurs identifiés dans le document (BENIN
2002a).
A cet effet, il a été prévu la mise en
uvre d'une politique de vulgarisation aux
niveaux national,
départemental et communal.
Cette politique consiste au niveau communal en l'organisation
d'une série d'ateliers de formation sur les programmes, leurs objectifs
et les responsabilités des structures départementales. Le
document recommande également la mise en uvre de toutes autres actions
pertinentes pour mobiliser les différents acteurs autour des objectifs
du DS R P.
Mais, jusqu'à ce jour, aucune action de
sensibilisation en direction des responsables communaux ne semble avoir
été engagée par les responsables du DSRP.
La CNDLP ne dispose d'aucune stratégie de
sensibilisation spécifiquement destinée aux collectivités
locales. Cette attitude relève de la méfiance
générale que les gouvernements africains éprouvent a
l'égard des institutions locales. Actuellement il existe en effet
très peu d'informations concernant les modalités de mise en uvre
du DSRP. Hormis les membres de la CNDLP, aucun des responsables
concernés tant au niveau des organismes chargés de la
décentralisation qu'au niveau des élus locaux, ne dispose
d'informations concrètes concernant les modalités de leur
participation a la mise en uvre du document (entretiens personnels).
Une telle situation ne favorise donc pas l'appropriation du
DSRP par les collectivités décentralisées, surtout que de
manière générale, le processus a été
limité a un
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groupe de cadres de haut niveau en contact avec la
communauté internationale (PAUL, E., 2002).
Les élus locaux interrogés sur la question de
leur appropriation du DSRP ont tous fait preuve d'une certaine
indifférence a l'égard du contenu du document. Rares
étaient ceux qui avaient déjà eu sous la main un
exemplaire du document qui jusqu'à ce jour n'a pas encore
été édité pour publication. Il s'agit uniquement
des responsables des communes ayant déjà leur plan de
développement communal (entretiens personnels).
Cette indifférence des communes serait due au fait que
la mise en uvre du DSRP n'aurait pas véritablement
démarré. Les responsables du Ministère du Plan
interrogés a ce sujet ont expliqué que pour l'année 2003,
le processus du DSRP a été limité exclusivement a un
certain nombre de ministères17. Ce sont donc uniquement les
ministères concernés qui ont eu a être informés et
sensibilisés sur la mise en uvre du DS R P.
Un autre argument tient au jeune age des collectivités
locales qui du fait de leur récente installation n'ont pu être
impliquées dans le processus passé. Mais même dans le
nouveau plan de sensibilisation nationale sur le DSRP qui doit démarrer
a la fin du mois d'aoUt 2004, la programmation a été
limitée exclusivement au niveau départemental (entretiens
personnels).
Cela dénote d'un certain désintéressement
de la CNDLP du role éventuel des collectivités locales car
malgré leur jeune age, ils ont déjà
bénéficié de plusieurs programmes IEC concernant divers
domaines de leurs attributions.
A l'heure actuelle, la seule implication des communes dans la
mise en uvre du DSRP consiste en leur représentation au niveau des
comités départementaux de suivi mis en place a cet effet. Ces
comités n'étant pas encore opérationnels malgré
leur création depuis le 14 aoUt 200318, on n'est pas en
mesure de juger du degré d'implication et de participation des
élus locaux. Une réelle participation des communes a ce
comité faciliterait grandement leur appropriation du processus car ce
comité est l'organe exécutif des stratégies au niveau
départemental. Il assure également l'évaluation des
politiques et actions publiques de lutte contre la pauvreté.
17Ministère de la justice, ministère
de la santé publique, ministère de l'environnement',
ministère de l'enseignement primaire et secondaire, ministère de
l'enseignement technique et professionnel, ministère des transports,
ministère de l'industrie, du commerce et de la promotion des petites et
moyennes entreprises
18Par arrêté interministériel
n°27/MCPPD/MFE/MISD/DC/SGM/DGPP/DESP du 14 aoüt 2003.
L'institution la plus habilitée a assurer
l'appropriation du DSRP par les communes, le comité communal, n'a
malheureusement pas été prise en compte dans l'organisation
actuelle de la CNDLP. Ce comité, uniquement composé d'élus
locaux et de responsables administratifs de la commune était
censé faire la revue et la collecte d'informations relatives aux actions
de lutte contre la pauvreté.
Pour le moment, l'observatoire du changement social promet
s'atteler dans les prochains mois a l'opérationnalisation des
comités départementaux de suivi (entretiens personnels).
4.2.2 L'évaluation de l'appropriation a travers le plan
de développement communa l
Malgré l'absence d'une appropriation politique
réelle du DSRP par les collectivités locales, celles-ci seront
amenées a faire des interventions dans le cadre de la lutte contre la
pauvreté.
Analysons a présent dans quelle mesure les
collectivités locales ont respecté le principe d'harmonie entre
leurs programmes d'action et les grandes orientations nationales contenues dans
le DSRP.
4.2.2.1 L'harmonisation despolitiques communales avec les
grandes orientations nationales
Selon l'article 108 de la loi 97029 du 15/01/1999, l'une des
modalités d'exercice des compétences communales est leur
harmonisation avec les grandes orientations nationales. Les communes ont donc
l'obligation d'agir en conformité avec les stratégies
sectorielles, les réglementations et normes nationales en vigueur.
Le DSRP étant considéré comme un
document d'orientation nationale, les communes se voient dans l'obligation
légale de suivre ses directives ou au moins de veiller a ce que leurs
programmes ne contrarient pas ses objectifs.
Le plan de développement communal doit donc
s'insérer dans les priorités nationales et régionales. Les
principaux documents de référence a cet effet sont:
· les études nationales de perspectives a long
terme (NLTPS),
· le document de stratégie de réduction de
la pauvreté,
· le programme d'action du gouvernement;
· les stratégies de
développement sectoriel (Mission de décentralisation 2003c
:16-17).
Chaque commune devrait donc s'inspirer de ces documents pour
élaborer son plan de développement tout en tenant compte de ses
potentialités, de sa vocation et de ses ambitions. L'insertion du plan
de développement communal dans la planification nationale et
régionale devra s'opérersuivant le schéma
ci-après.
Diagramme1 : Schéma d'insertion des PDC dans les grandes
orientations nationales.
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DSRP
2003-2005
Capacités internes
Faiblesses
Forces
PAG
2001-2006
Association des populations et
ambitions des
autorités communales
Plan de développement régional
(Niveau
départemental)
PLAN DE DEVELOPPEMENT
COMMUNAL
Vision Bénin 2025
(2000-2025)
Autres programmes
thématiques
Autres Programmes
sectoriels
Opportunités
Environnement
Menaces
Source : Guide pour la planification du développement
communal, Mission de décentralisation,
novembre 2003.
Ainsi donc, les communes sont tenues de prendre en compte les
orientations du DSRP pour l'élaboration de leur cadre stratégique
de développement.
Pour ce faire, le conseil départemental de
concertation et de coordination est obligatoirement consulté sur les
programmes de développement de la commune et sur la mise en
cohérence de ceux-ci avec les orientations nationales.
Pour assurer le respect de cette disposition, la loi soumet
le plan de développement communal a l'approbation de l'autorité
de tutelle pour le contrôle de la légalité. Ce n'est
qu'après ce contrôle et l'approbation du préfet que le plan
acquiert existence légale et devient exécutoire19.
19Article 142, 143 et 144 de la loi 97-029 du 15
janvier 1999.
Spécifiquement en ce qui concerne le DSRP, il est
important de noter que le CDCC est membre du comité départemental
de suivi. Cette disposition permettra de mettre un accent particulier sur la
mise en cohérence avec les objectifs du DSRP.
Mais pour le moment, ni le CDCC ni les comités
départementaux de suivi ne sont opérationnels. Pourtant,
certaines communes et municipalités ont déjà
élaboré et fait approuver leur plan de développement. Nous
allons donc étudier le contenu de ces plans communaux afin de voir dans
quelle mesure ils intègrent les orientations du DS R P.
4.2.2.2 Evaluation de l'appropriation par rapport au contenu des
plans de développement communal (PDC).
Sur les 77 communes, seulement 10 disposent a l'heure
actuelle d'un plan de développement communal. Cette situation est due a
des difficultés institutionnelles sur lesquelles nous allons revenir
dans le prochain chapitre.
Pour l'élaboration de leurs plans communaux de
développement, les collectivités locales, ont fait appel a des
cabinets de consultants ; ces derniers ont tenu a respecter le plan d'insertion
du PDC dans les orientations nationales. Sur les dix plans de
développement locaux déjà élaborés en aoUt
2002, nous avons pu en obtenir six20. Parmi ceux-ci, trois ont
été élaborés avant l'adoption du DSRP et
l'installation des nouveaux maires. Dans chacun de ces plans, les visions
nationales a partir desquelles ont été élaborées
des visions communales étaient essentiellement le NLTPS et le programme
d'action du gouvernement (PAG). Ces visions communales ont servi en dernier
lieu a la détermination des différentes actions du PDC.
Ici, les rédacteurs des PDC ont donc veillé a la
cohérence entre leurs programmes et les objectifs définis par les
Etudes Nationales de Perspectives a Long Terme (NLTPS ; Bénin 2025,
Alafia). Cela ne contredit en rien le DSRP puisque comme le rappelle la Mission
de Décentralisation, le NLTPS a servi de référence a
l'élaboration du Document de Stratégie de Réduction de la
Pauvreté (Mission de décentralisation 2003c, 17).
Quant aux communes qui ont élaboré leurs plans
de développement a partir de l'année 2003 (Lokossa,
Glazoué) elles ont toutes expressément fait
référence au DSRP après le NLTPS pour l'intégration
de leurs objectifs dans les grandes orientations
201l s'agit des communes de BaniKoara,
Dogbo, Glazoué, Kandi, Kérou et LoKossa.
nationales. La SNV qui soutient actuellement 30 communes
béninoises dans l'élaboration des PDC affirme qu'il est
expressément tenu compte des orientations du DSRP dans les
différents programmes. Les communes de Sèmè-Kpodji et de
Porto-Novo qui élaborent actuellement leur PDC se réfèrent
également aux orientations du DS R P.
Ainsi, les actions définies dans les PDC rentrent de
manière générale dans la logique du DSRP. Toutefois dans
aucun des PDC il n'a été défini des objectifs
stratégiques dont le but déclaré serait la contribution a
l'atteinte des résultats attendus par le DSRP.
Malgré cela, la majorité des actions et
programmes contenus dans les PDC peut facilement être classée sous
les différents axes d'interventions définies par le DSRP. Ainsi,
la promotion et la diversification de la production agricole, le
développement de l'hydraulique, la couverture sanitaire et la promotion
de la femme sont entre autres divers objectifs inscrits a la fois dans le DSRP
et dans plusieurs PDC.
Cela démontre que le DSRP a fait un diagnostic assez
exact des causes et déterminants de la pauvreté au Bénin.
C'est pourquoi, les PDC sans avoir cherché de manière
précise a atteindre les objectifs du DSRP sont arrivés a
définir des politiques qui correspondent a maints égards aux
actions prévues par le DSRP.
S'il n'y a pas eu une adhésion formelle ou politique
des élus locaux aux stratégies du DSRP, dans la pratique leurs
actions tendent vers la réalisation de ses objectifs.
On peut donc conclure qu'il n'y a pas eu un processus
d'appropriation du contenu du DSRP par les collectivités locales mais
que les obligations légales les ont conduit a prendre en compte les
orientations du DSRP dans l'élaboration de leurs PDC. Cette prise en
compte est également influencée par le fait que le DSRP a
été adopté par les bailleurs de fonds qui en font
désormais leur cadre stratégique d'aide. Les communes sont donc
conscientes qu'elles ont intérét a s'inscrire dans la méme
logique pour pouvoir bénéficier des subventions
internationales.
Il nous reste donc a savoir si les communes ont actuellement les
capacités institutionnelles nécessaires a la mise en application
de ces plans.
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