Par rapport aux modalités de participation
prônées par la Banque Mondiale, le processus participatif
instauré dans le cadre de l'élaboration du DSRP au Bénin
comporte quelques limites qu'il importe de relever.
4.1.2.1 Portée du processus participatifselon la
Banque Mondiale.
Selon la Banque Mondiale, dans sa publication sur les
stratégies de réduction de la pauvreté, la participation
se définit comme le processus par lequel les acteurs influencent et
contrôlent le choix des priorités, l'élaboration des
politiques/programmes, l'allocation des ressources et/ou la
mise en uvre des
programmes (TIKARE et a!, 2001). Les groupes suivants sont
suggérés pour participer
au processus:
· le grand public en particulier les groupes
vulnérables,
· les institutions étatiques, y compris le
parlement, le gouvernement central et les gouvernements locaux,
· les organisations de la société civile
comme les ONG, les organisations communautaires ou de base, les syndicats, les
institutions académiques;
· le secteur privé;
· les bailleurs de fonds aussi bien nationaux
qu'internationaux.
Sur la base de ce qui précède, on peut affirmer
que la Banque Mondiale envisage pour les DSRP, un processus de participation
profonde pour lequel les participants doivent être capables d'influencer
et de contrôler la formulation des politiques /programmes,
l'établissement des agendas, l'élaboration des budgets et leur
mise en
uvre. Ainsi, pour la Banque Mondiale, le processus devrait
être largement participatif et inclusif prenant en compte non seulement
les personnes marginalisées mais aussi les organisations
représentatives et les institutions faItières.
De façon idéale, on peut dire que la
définition donnée par la Banque Mondiale de la participation est
conforme au processus requis pour une implication profonde et large des
différentes catégories de la société. Cependant,
une étude réalisée par Frances STEWART et Michael WANG en
mars 2003 a révélé que la contribution de la
société civile n'est pas significative dans la plupart des pays
bénéficiaires.
De manière générale, l'examen des
différents processus participatifs s'est révélé peu
convainquant. On note en effet que les processus de DSRP ont été
caractérisés principalement par des structures ad' hoc et
pratiquement aucune institutionnalisation de la participation, les formes de
participation utilisées relevant surtout de consultations, moins souvent
de collaboration et rarement de prises de décisions
(EBERLEI, 2001). Le processus participatif béninois a
également souffert de cette insuffisance générale
notée au niveau des DSRP.
4.1.2.2 Les limites au processus
participatifbéninois.
Au Bénin, le processus DSRP a fait preuve d'un relatif
effort en matière de participation sur le terrain, d'autant plus que la
consultation de la société civile pour
lYélaboration des politiques était inexistante dans le
pays (PAUL, E., 2002).
En fait, comme décrit plus haut, divers acteurs ont
été consultés ; des représentants de la
société civile, du secteur privé et des ministères
sectoriels. Toutefois, les séminaires départementaux se sont
beaucoup plus apparentés a des séances d'informations qu'à
une réelle concertation entre les différents acteurs.
Il est a remarquer que la plupart des participants a ces
séminaires départementaux ont reçu leurs invitations et
les documents appropriés moins d'une semaine avant, voire a la veille
des séminaires. On doit manifestement en conclure que les
représentants des OSC n'ont pu ni consulter leur base, ni
préparer sérieusement les séminaires comme l'approche
participative l'avait laissé entendre (BIERSCHENK et a!. 2001). De plus,
les séminaires se sont entièrement déroulés en
français sans traduction dans les langues locales alors que la majeure
partie de la population béninoise ne maItrise pas cette langue.
De nombreux griefs ont été ainsi soulevés a
l'encontre de la crédibilité du processus participatif. Elisabeth
PAUL a retenu notamment que:
· au niveau national, les ministères sectoriels
n'ont guère reçu de soutien de la part de la CNDLP pour
l'élaboration de leur document propre; le Parlement n'a pas
été impliqué formellement, a peine a-t-il
été informé du processus et consulté sur
l'avant-projet de document final;
· la société civile et le secteur
privé n'ont été impliqués qu'au niveau national et
non sectoriel. En outre, vu la virtualité )> de nombreuses ONG
béninoises et la forte interrelation entre les sphères politique,
civile et privée au Bénin, ladite société civile
n'est guère crédible comme contrepoids effectif au gouvernement
dans le débat sur les politiques de réduction de la
pauvreté (PIROTTE, 2002; BIERSCHENK eta!, 2001);
· la composition des séminaires
départementaux était loin d'être idéale, ce qui a
fait que les élus locaux et les pauvres eux-mêmes n'ont
qu'à peine été
consultés. La décentralisation, qui aurait
permis une meilleure représentation locale, n'etait hélas pas
encore effective. Ainsi donc, les résultats des consultations
participatives ne sont pas considérés comme de haute
qualité technique, vu que les séminaires n'ont touché
qu'une faible partie de la population et que le processus participatif semble
s'être réduit a une simple validation ex-post;
· la couverture médiatique du processus a
été très limitée;
· de toute façon, il apparaIt qu'il n'existe
guère de capacités réelles en dehors
du gouvernement pour débattre d'une question aussi
importante que la
pauvreté, ni au niveau du Parlement, ni des partis
politiques, ni de ladite
société civile;
· enfin, la participation dans le processus de DSRP
semble n'avoir touché que des acteurs institutionnels et non des acteurs
primaires (méme au cours des séminaires départementaux) et
n'avoir été qu'une action ponctuelle (un passage obligé)
et non un processus dans la durée, ce qui lui ôte beaucoup de
crédibilité (PAUL E., 2002).
Particulièrement en ce qui concerne l'appropriation
par les collectivités locales, la principale limite résulte dans
le fait que les consultations départementales n'ont pas
été précédées de séminaires au niveau
des 77 sous-préfectures du Bénin. Or les limites territoriales
des collectivités locales actuelles correspondent a celles des
souspréfectures préexistantes.
De la non-implication des différents acteurs au niveau
le plus bas (la sous-préfecture), résulte actuellement
l'inexistence au niveau des collectivités locales, de personnes autant
de la société civile que de l'administration ayant directement
été impliquées dans l'élaboration du DSRP. Une
telle participation aurait favorisé l'appropriation par les
collectivités locales car une partie des leaders locaux aurait tenu a
l'implémentation des politiques.