Paragraphe 2 Les plans d'actions des Nations Unies.
Pour encourager le respect des diverses conventions et surtout
l'adoption par les Etats des mesures visant a éliminer les
discriminations fondées sur le sexe, les Nations Unies ont pris
plusieurs initiatives. La première de ces actions était la
proclamation par l'Assemblée Générale de l'année
1975 comme année internationale de la femme dont l'un des objectifs
était de promouvoir l'égalité entre les hommes et les
femmes94. Consacrée par la Conférence mondiale de
l'Année Internationale de la Femme, cette année a donné
lieu a l'adoption d'un des premiers plans d'actions pour la réalisation
de l'égalité des sexes par les Nations Unies. Ce plan d'action
qui liait la situation d'infériorité des femmes au
sous-développement socio-économique a suscité la
proclamation de la décennie des Nations Unies pour la femme (1976 a
1985) dont les trois objectifs étaient Egalité,
Développement et Paix. La deuxième conférence mondiale sur
les femmes tenue en 1980 a Copenhague a élaboré le programme
d'action pour la réalisation de ces trois objectifs.
Clôturée par la conférence de Nairobi en 1985,
l'évaluation de la décennie de la femme a engendrée le
plan d'action de Nairobi basé sur le fait qu'une contribution
essentielle au renforcement de la paix et de la sécurité
internationales serait apportée par
94 SYMONIDES, J., VOLVODINE, V., Droits des Femmes, recueil de
textes normatifs internationaux, Paris, UNESCO, 1998, p. 16
l'élimination de toutes les formes
d'inégalité entre les Hommes et les Femmes95. Des
mécanismes spécifiques ont donc été mis en place
pour suivre la mise en ceuvre des stratégies élaborées a
Nairobi et adoptées par l'Assemblée générale des
Nations Unies. Il s'agit de la Commission de la condition de la femme, ainsi
que la mise en place par le Conseil Economique et Social des Nations Unies
d'une procédure de soumission de rapport sur la question.
La question de l'égalité des sexes était
donc jusque-là traitée par les Nations Unies comme une question
en dehors du système de protection des droits de l'Homme. De plus, la
recherche de l'égalité entre hommes et femmes était
justifiée par des nécessités de développement et/ou
de paix.
Il a fallut attendre 1993, a la conférence de Vienne
sur les droits de l'Homme, pour que les graves violations des droits
fondamentaux des femmes soient reconnues comme faisant partie du programme des
droits fondamentaux des Nations Unies. Le fait que (les droits des femmes sont
des droits fondamentaux a été réaffirmé lors de
cette conférence et toutes les instances des Nations Unies ont
été appelées a éliminer la violence contre les
femmes dans les sphères publiques et privées. La
conférence recommanda a cet effet que les organismes des droits de
l'Homme ainsi que les Etats intègrent une approche sexospécifique
dans leurs programmes et plans d'action. Il s'agit ainsi pour les structures
concernées d'incorporer les questions qui affectaient de manière
différente et disproportionnée les différents sexes et
particulièrement les femmes dans leurs analyses et modes
d'interventions.
Cette tendance a été réaffirmée et
approfondie lors des conférences suivantes des Nations Unies,
particulièrement lors de la conférence internationale sur la
population et le développement du Caire en 1994 et lors de la
quatrième conférence mondiale sur les femmes de Beijing en 1995.
Cette dernière a donnée lieu a un Plan d'actions
internationalement reconnu qui devait permettre d'aboutir a une
égalité substantive des sexes a travers la protection et la
promotion des droits fondamentaux des femmes.
95ibide
Le premier point de ce plan d'action basé sur une
analyse différenciée selon les sexes concerne les droits de
l'Homme. Tout en réaffirmant que les droits des femmes sont d'abord des
droits de l'Homme96, Beijing a mis en exergue les
spécificités féminines dont la protection devrait
découler des mêmes droits reconnus a tous. De ces
spécifiés dues a des roles biologiques mais également a
des construits sociaux se dégageait la nécessité
d'introduire une analyse différenciée suivant les sexes dans les
droits fondamentaux. Pour concrétiser les engagements pris par rapport a
l'égalité des sexes, les Nations Unies devraient intégrer
la problématique homme-femme dans l'analyse des normes et
mécanismes existant en matière de droits fondamentaux et dans
leur application97.
Malgré son caractère essentiellement politique,
le plan d'action de Beijing est une instrumentalisation des dispositions et
mesures exigées par la CEDAW qui est opposable juridiquement aux Etats.
Même si elle n'a pas une force juridique obligatoire, le Plan d'action de
Beijing est un instrument assez contraignant pour les Etats avec un
mécanisme de suivi fonctionnel. Ainsi la conférence de 1995 a
t-elle été suivie de deux autres, une en 2000 a New York et la
dernière en 2005 a Pékin.
Sans être des instruments juridiques en ce qui concerne
l'égalité des sexes, les déclarations de Vienne et de
Beijing ont introduit le débat sur une nouvelle approche de la question
de l'égalité des sexes. Il s'agit de l'approche
sexospécifique formulée pour la première fois dans le
cadre des droits fondamentaux par la déclaration de Vienne. Etroitement
liée au concept genre et développement, cette démarche
dans le cadre de l'égalité des sexes constitue une nouvelle voie
d'instrumentalisation qui a de nombreuses implications sur la
compréhension même de la notion d'égalité.
96 Et ce, malgré la polémique qu'induisait le terme
droits de l'homme >> ainsi que l'existence de texte concernant
exclusivement les droits de la femme.
97 AMNESTY INTERNATIONAL, op. cit., P.5
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