INTRODUCTION
L'élaboration du budget de l'Etat de Côte
d'Ivoire, est un exercice qui s'étale généralement sur la
période de septembre à décembre d'une année, et
peut prendre fin au plus tard au mois de février de l'année
suivante.
Partant du cadre macro-économique prévisionnel
pour l'année concernée, une enveloppe de ressources propres de
l'état est arrêtée qui, confrontée aux besoins en
dépenses (de fonctionnement et d'équipement) dégage un gap
budgétaire ou déficit budgétaire. Ce gap, majoré du
volume annuel de la dette à refinancer représenterait l'ensemble
de ses besoins.
Le budget1 2004 faisait état d'un gap
à financer de 394,4 milliards de FCFA. Généralement, pour
financer ces besoins, deux possibilités s'offrent à
l'état2 : augmenter le taux de pression fiscale tout en
sachant que cela risquerait de déprimer l'investissement ou emprunter
auprès de ses résidents ou ceux de l'extérieur.
Pour un pays en voie de développement comme la
côte d'Ivoire, décourager l'investissement, source de croissance
économique et donc gage d'un développement durable, par une
augmentation de la fiscalité, s'avérerait être un mode de
financement peu recommandable. En conséquence, la brèche la mieux
exploitable demeure les emprunts intérieurs et extérieurs pour
assurer le financement de son déficit budgétaire.
A ce niveau, le Trésor Public de Côte d'Ivoire
participe à l'arbitrage entre l'endettement intérieur et/ou
l'endettement extérieur.
1 Ministère de l'Economie et des Finances
2 Gregory N. Mankiw, Macroéconomie, traduction de la
3ème édition américaine par Jean Houard,
P.502
En effet, selon les décrets n° 97-582 du 8 octobre
1997, n° 2001-2 10 du 04 mai 2001 et n° 2004-97 du 29 janvier 2004,
le Trésor Public de Côte d'Ivoire est chargé de participer
à la collecte de l'épargne et assure la gestion administrative et
financière de la dette publique.
Toutefois, la faiblesse de l'épargne intérieure
qui se situe à environ 18% du PIB, oblige l'Etat de Côte d'Ivoire
à s'orienter régulièrement vers la mobilisation de
ressources extérieures afin de financer ses gaps budgétaires et
promouvoir ainsi son développement qui nécessiterait des
ressources à hauteur du quart au moins (25%) du PIB1.
Or, cette mobilisation de ressources extérieures
s'effectue jusqu'ici par le biais de flux publics de capitaux,
matérialisés par les prêts bilatéraux et
multilatéraux. Pourtant, la restructuration de la dette souveraine de
certains pays en voie de développement, notamment le Brésil et le
Mexique par le Plan Brady en 1989, a montré désormais à
cette catégorie de pays, une autre source de mobilisation de ressources
extérieures.
En effet, le Plan Brady qui consistait à restructurer
la dette contractée auprès du club de Paris et à la
renégociation de la dette commerciale ainsi que des
arriérés via l'émission de nouveaux titres de
créances (les obligations Brady) garantis par le Trésor Public
américain, a permis aux pays bénéficiaires de retrouver
à nouveau un niveau soutenable de la dette publique. La
conséquence immédiate, c'est que les pays en voie de
développement se sont détournés pour la plupart des
traditionnels prêts bancaires pour émettre de plus en plus de
titres de dette sur le marché international des capitaux
(euro-obligations).
1 L'événementiel, Fraternité Matin, La
Côte d'Ivoire peut-elle rebondir? Interview de Claude Rougeot, Expert
International, P. 257, février 2004
Avec des coûts relativement très bas, servis pour
de longues échéances (10 - 20 - 30 ans) et des risques de
volatilité de la charge d'intérêts qu'on peut obérer
grâce à l'activation de mécanismes financiers,
l'émission d'euro-obligations constituent une ressource
intéressante et moins contraignante1 pour les pays en voie de
développement.
Ainsi, en 2004 la république de Tunisie a
emprunté2 pour 10 ans par émission d'euro-obligations,
un montant de 450 millions d'euros soit 295 milliards 180 millions de FCFA pour
financer son déficit budgétaire, à un coût de
4,825%. Dans le même temps, l'Etat de Côte d'Ivoire empruntait sur
le marché intérieur pour ses besoins de financement en 2003, une
enveloppe de 40 milliards par emprunt obligataire à un coût de 6%
pour seulement 3 ans.
L 'on se demande à juste titre s 'il est possible
aussi à la Côte d 'Ivo ire de recourir à l 'endettement
euro-obligataire pour fin ancer ses gaps ? Existe-t-il en effet une
stratégie particulière de mobilisation de ce type de ressources
pour les pays en voie de développement? En quoi consisterait-elle ? Dans
le cadre éventuel d'une telle opération, quels peuvent en
être les contraintes et le mode opératoire ? Comment pourrait s
'opérer en outre, la minimisation du coût de l 'émission
sous une contrainte de risque, quant l 'on connaît la
vulnérabilité des pays en voie de développement à
ces facteurs ?
1 Dans la mesure où c'est l'Etat en question qui en fixe
les règles désormais, aucun plan d'ajustement n'est
imposé
2 Magazine bihebdomadaire, l'Economiste Magrébin, n°
365 du 15 décembre 2005
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