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Activités agricoles et dégradation des ressources naturelles dans la commune de Ségbana (Bénin) : Impacts sur la santé des populations

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par Aboubakar KISSIRA
EDP- FLASH- Université d'Abomey-Calavi (Bénin) - DEA Gestion de l'Environnement 2005
  

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B - Conséquences de la baisse continue des revenus sur le

bien-être des agriculteurs

Les dépenses exorbitantes engagées dans l'entretien d'un champ de coton, comparées aux revenus souvent insignifiants ou inexistants parfois des producteurs de coton, sont les premiers indicateurs de l'appauvrissement des producteurs au profit des opérateurs économiques privés. Que la campagne cotonnière soit bonne ou non, les opérateurs économiques privés nationaux récupèrent les frais d'intrants agricoles.

Les producteurs de coton sont nombreux à dénoncer le refus du report de leur dette ou l'exigence de la caution solidaire, la cherté des intrants agricoles, et le retard accusé par les structures chargées de la commercialisation du coton-graine dans le paiement des frais de coton aux producteurs.

Cette réaction des producteurs s'explique par le fait qu'ils s'endettent sans cesse au point qu'il leur est difficile de sortir de cette situation dégradante. L'endettement croissant des producteurs pourrait conduire à terme à leur appauvrissement en ressources financières. Il pourrait donc constituer des menaces pour la satisfaction des besoins de santé.

Au vu de l'ampleur des conséquences néfastes liées aux activités agricoles et à la mauvaise gestion des ressources naturelles, la politique agricole du Bénin mérite d'être revue.

C- Contribution à l'amélioration des conditions de vie et de travail des

producteurs

L'amélioration des conditions de travail et de vie des paysans dans le contexte actuel des activités agricoles passe notamment par la sensibilisation et la formation pour un changement de comportement.

1 - Information et formation

Les activités agricoles telles qu'elles sont menées dans la commune de Ségbana contribuent à la dégradation des ressources naturelles. Elles entraînent la disparition progressive du couvert forestier et l'appauvrissement des sols (PDC, 2004).

En outre, les observations portant sur le traitement phytosanitaire, l'épandage d'engrais, l'usage des intrants agricoles à d'autres fins et surtout l'impact négatif de ces intrants sur la santé humaine, amènent à accentuer les séances d'informations sur les risques liés à ces mauvais comportements au cours des activités agricoles. Le changement des comportements vis-à-vis des ressources naturelles, de la santé humaine peut se faire dans le cadre d'une éducation environnementale. Il revient d'expliquer aux paysans que la santé ne peut être considérée de manière isolée. Elle est étroitement liée à la qualité de l'environnement dans lequel ils évoluent. Pour vivre en bonne santé, les humains ont besoin d'un environnement sain. (BOKO, octobre 2003).

Toutes ces idées doivent servir de thèmes de sensibilisation. A travers l'Information, l'Education et la Communication (IEC), il est possible de susciter chez les auditoires désignés des changements de comportement ou d'attitude, ou à la consolider en utilisant une combinaison d'approches, de techniques et de méthodes. Avec l'IEC on vise à aboutir à un changement de comportement. Des supports audiovisuels aideront notamment à atteindre ces objectifs.

Des agents d'agriculture, de santé, d'Organisation Non Gouvernementale et des Sociétés privées intervenant dans le secteur agricole doivent se concerter pour définir des programmes cohérents de formation des paysans. Tout doit être aussi mis en oeuvre pour amener les organisations paysannes à travailler avec les institutions étatiques. Avec le transfert des compétences, les agents de vulgarisation sont considérés comme « dépassés », ne pouvant plus rien apprendre aux producteurs agricoles. Ce qui amène certains auteurs à affirmer que le désengagement de l'Etat des fonctions de production et de commercialisation du coton-graine est précipité et mal préparé (MDR, mai 2000).

Les comportements négatifs des paysans dans le milieu agricole sont aussi liés à leur fort taux d'analphabétisme et à un faible niveau de professionnalisme. Cette situation sous-tend la mauvaise gestion des organisations paysannes. Les membres des organisations paysannes ne maîtrisent pas encore les règles et principes fondamentaux du mouvement coopératif (MDR, 2000). Dans cette situation que doit-on attendre de la majorité des paysans qui doivent maîtriser des techniques d'utilisation des intrants agricoles, et à qui il est demandé de sauvegarder les ressources naturelles ? Nul doute que le faible niveau d'instruction des paysans en est pour quelque chose. Au faible taux de scolarisation (56 %) dans la commune de Ségbana s'ajoute celui de l'analphabétisme (Tableau VII).

Tableau VII : Situation de l'alphabétisation dans la commune de Ségbana (2002 - 2003)

SEXE

Alphabétisation

Post alphabétisation

Inscrits

Abandon

Testés

Inscrits

Abandon

Testés

Hommes

138

7

131

178

-

178

Femmes

54

1

53

44

-

44

TOTAL

192

8

184

222

-

222

Source : Service de l' alphabétisation Ségbana, 2004

Ce tableau montre que le taux d'alphabétisation demeure très faible de façon générale dans la commune. Le cas des femmes est encore plus préoccupant.

Le faible niveau d'alphabétisation constitue une des causes de la mauvaise utilisation des intrants agricoles.

Il est plus facile de susciter le changement de comportement chez des paysans qui savent lire et écrire, qui sont alphabétisés. Il leur est plus facile de lire eux-mêmes les consignes inscrites sur les emballages des pesticides, de respecter les indications aux fins de ne pas s'exposer aux pesticides ou de diminuer volontairement les doses recommandées d'utilisation des insecticides.

L'alphabétisation est aussi utile pour les conduites à tenir notamment pour éviter l'extension exagérée des superficies agricoles, les brûlis des champs et la destruction du couvert végétal.

Face à l'ampleur de la destruction du couvert forestier par les producteurs et aux difficultés liées à la chute des cours du coton au niveau mondial, à l'endettement continu des producteurs, aux problèmes de santé physique et morale, l'organisation de la filière des vivriers doit être envisagée, surtout que la filière coton qui connaît l'engouement des paysans ne répond plus aux attentes de la majorité.

2 - Organisation de la filière des vivriers et création des activités génératrices de revenus

Dans la commune de Ségbana, la filière des vivriers existe. Cependant elle n'est pas organisée. Les opérateurs économiques privés intervenant dans la filière coton n'y voient pas encore l'utilité de le faire. L'Etat non plus n'en fait concrètement une préoccupation. Des déclarations d'intention d'organiser cette filière ne manquent pas.

Mais les faits prouvent sur le terrain que l'acte n'est pas joint à la parole. Les conséquences sont énormes. Les producteurs de vivriers ont des difficultés pour écouler leurs produits agricoles ; le marché de vivriers n'étant pas bien organisé comme celui du coton. Chaque paysan choisit de vendre son produit où il veut et quand il le désire, n'empêche les désagréments qu'il pourrait enregistrer. Avec la sortie massive des vivriers vers le Nigéria, le conseil communal de Ségbana tire la sonnette d'alarme et envisage l'organisation locale de la filière des vivriers (PDC, 2004).

En effet, le mutisme face à cette sortie des vivriers crée une pénurie qui oblige les paysans à débourser plus qu'ils ont l'habitude de le faire pour acheter les vivriers en cas de besoin.

Ce qui est déplorable est qu'en cas de pénurie de vivriers, les produits qui leur ont été achetés et conservés par des petits commerçants de la commune de Kandi leur reviennent deux ou trois fois plus chers. Les paysans déplorent cette situation qu'ils connaissent dans la période de soudure. Cependant ils ont du mal à se corriger parce qu'aveuglés par la quête de l'argent après la récolte et le stockage de leur produit. La lutte permanente menée par les paysans est d'assurer leur bien-être social et économique. Alors l'organisation de la filière des vivriers doit inclure dans son programme l'octroi de crédits aux agriculteurs afin de les amener à développer les activités génératrices de revenus. Avec l'octroi des crédits, les paysans pourront participer activement à la transformation des produits vivriers plus facile à écouler.

Les producteurs méritent une initiation à la création des Associations des Services Financiers (ASF) pour les encourager à s'organiser pour l'épargne, les prêts et le remboursement, à l'image de certains producteurs initiés par le PAGER dans la partie méridionale et par le PROMIC dans la partie septentrionale du Bénin.

Le bien-être des paysans voire des populations doit préoccuper tous les autres acteurs du monde rural et surtout les décideurs politiques. « L'environnement d'un pays ne peut être préservé lorsque les populations ont difficilement accès au minimum pour leur bien-être social ... entre pauvreté, précarité de la santé et environnement le lien est de plus en plus étroit ... La pauvreté ne donne pas la possibilité à ceux qui en souffrent d'éviter de détériorer leur environnement (BIAOU, 2000) ». Aussi, tous les paysans interrogés ont évoqué la complexité des travaux agricoles, la force physique excessive qu'ils déploient au cours de ces travaux quand les moyens financiers leur font défaut pour solliciter des ouvriers agricoles ou pour demander le concours de la culture attelée.

Sur 196 paysans interrogés (156 hommes et 40 femmes), 92 hommes soit 56% ont déclaré ne pas être en mesure de satisfaire les besoins sexuels de leurs épouses quelques fois parce qu'épuisés par le grand effort physique fourni au champ. Les femmes interrogées ont annoncé leur disponibilité à leur époux, à tout moment sauf au cas où elles ont des problèmes de santé. Le non accomplissement répété de ce devoir conjugal par les hommes concernés pourrait conduire à l'infidélité de leurs épouses. Il s'avère donc nécessaire de participer réellement à la réduction de la complexité des travaux agricoles par l'octroi de crédit à faible taux d'intérêt aux paysans afin de leur permettre de se faire aider par des ouvriers agricoles à des moments donnés.

De ce fait, il faut joindre l'acte à la parole à tous les niveaux pour faire de la participation à la bonne santé et au bien-être des populations une réalité.

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera