2.3.2. Exploitation de la réserve
forestière
Pour mieux étudier l'exploitation de la réserve
forestière, des entretiens avec les populations ont été
menés dans les trois secteurs de la zone d'étude à savoir
le secteur du Nord (Karma), le secteur du Sud (Kouré) et le secteur des
milieux (Damari et Karey Gorou).
Il ressort des entretiens que dans le temps (il y a 30 ans),
le couvert végétal était très important avec une
diversité d'espèces végétales dans la zone
d'étude. Cette diversité végétale servait d'habitat
pour une faune diversifiée et un réservoir pour la
pharmacopée. En effet, les entretiens effectués rapportent que
dans les années 1990 et 2000, une grande partie des terres
cultivées aujourd'hui étaient jadis des savanes arborées
denses, difficiles à parcourir. Les sommets des plateaux étaient
couverts par une végétation dense. La végétation se
dégrade plus rapidement et à grande échelle que dans les
années précédentes.
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km63.png)
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Plusieurs espèces végétales existantes
ont disparu aux fils du temps. Des espèces utilisées dans la
pharmacopée ont pratiquement disparu aujourd'hui dans les terroirs. Il
faut parcourir plus de 20 km pour les retrouver.
Face à cette dégradation avancée du
couvert végétal, l'Etat et ses partenaires techniques et
financiers ont menés des actions de restauration des terres
dégradées et de régénération du couvert
végétal dans les zones ciblées (photo 1). Même si
ces actions ont été menées à des échelles
réduites par des Projets et ONG, elles ont permis de reconstituer la
couverture végétale.
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km64.png)
Photo 1: Site récupéré sur le
plateau à Kouré, Source : travaux terrain, 2023
Dans les zones d'interventions, les actions de
récupération des terres ont permis d'inverser la tendance sur
plusieurs sites.
La coupe du bois pour la commercialisation est la principale
cause de la dégradation du couvert végétal selon la
population. Sur les axes (route Filingué, Dosso, Béla, Torodi,
Youri, Ouallam et Namaro) menant à Niamey sont observés chaque
jour des dizaines des camions et d'autres types de voiture transportant du bois
de chauffe notamment, le jour de marché des villages environnants comme
le marché de :
Axe route filingué : Wankama (2,65667 E ; 13,6719 N)
Axe route Dosso : Margou Béné (2,84095 E ;
13,10576 N), Béla 2 Fakara (2,5243 E ; 13,1637 N), Béla 2 ,
Axe route Torodi : Mossi Paga, Bitinkodji,
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km65.png)
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Axe route say : Youri (2,24556 E ; 13,3356 N) , Sina Koira
(2,64538 E; 13,27709 N) , Djakindi,
Axe route Ouallam : Mangayzé Goubé
Axe route Namaro : Chantier Koga,
On peut compter jusqu'à 300 stères de bois par jour
et 100 à 200 stères pour les autres jours (Source : registre
de la brigade de contrôle d'exploitation de bois, 2023). Ce flux
s'observe plus aux mois de juillet, août et septembre (photo 2).
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km66.png)
Photo 2 : Camion transportant 15 Stères de bois en
provenance de Wankama sur l'axe
route Filingué,
Source : travaux terrain, 2023
Les poids d'un stère de petit bois sec de
diamètre 4 à 8 cm avait été estimé à
225 kg. Le moyen bois de diamètre 8 à 14 cm3 à
300 kg et le gros bois de diamètre 14 à 20 cm3
à 350 kg. Sur ces bases, la productivité en bois de feu pour
Niamey avait été estimée à près de 300 000
tonnes par an (FONABES, 2016). Le jour de marché du bois (villages
environnants), il peut y avoir jusqu'à 20 camions de ce type sur
différents axes, ainsi que d'autres types des véhicules
transportant du bois à usage domestique ou pour la commercialisation. La
population coupe les grands arbres qui ne sont pas morts, les font
sécher avant de tout revendre sur le marché. Cette pratique est
la plus destructrice de la végétation. Cela fait en sorte que
chaque année, une bonne partie de la végétation est
perdue, car après la coupe, il n'y a pas d'initiative de plantation de
bois par la population. Également, la mise en valeur des terres
agricoles s'accompagne de la destruction du couvert végétal, ce
qui a entraîné la perte de milliers
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km67.png)
d'hectares de végétation. Cela est
illustré dans photo 3 d'un champ de culture qui, autrefois, était
une savane boisée intacte.
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km68.png)
Photo 3: Champs de culture à
Kouré
Source : travaux terrain, 2023
La croissance démographique combinée à la
diminution de la productivité des terres a incité la population
à rechercher davantage des terres, entraînant la destruction du
couvert végétal pour créer des nouveaux champs afin, de
répondre au besoin croissant de la population (source : Entretien
avec la population). Cette croissance démographique entraîne
un défrichement massif du couvert végétal en vue d'obtenir
plus d'espace pour l'agriculture. Un exemple de ce phénomène de
déboisement ou plus de 100 hectares du couvert végétal a
été détruit dans les années 1990 pour créer
un champ de culture dans le secteur Sud. Cette pratique est l'un des nombreux
exemples des destructions de la végétation, entraînant une
perte significative du couvert végétal.
Aussi, l'élevage joue un rôle important dans la
dégradation de la végétation dans la mesure où les
éleveurs coupent les arbres pour nourrir les animaux. 25% des ressources
fourragères viennent principalement du couvert végétal
selon le DRE (Directeur Régional de l'Environnement).
L'élevage peut également contribuer à la
régénération du couvert végétal si les
éleveurs se limitent à la taille des branches des arbres. Cela
permettra aux arbres dont les branches ont été taillées de
se régénérer efficacement avec des nouvelles feuilles plus
denses.
De plus, l'expansion urbaine joue un rôle décisif
dans la détérioration de la végétation. Plusieurs
hectares des forêts classées ont été
morcelés, comme cela a été le cas pour la forêt
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km69.png)
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classée de l'aéroport de Niamey, située
dans le département de Kolo, au cours des années 2012-2013.
Les interventions de plusieurs Projets, Programmes et ONG
depuis les années 2005 ont permis de récupérer une bonne
partie des terres dégradées (Photo 4 et 5).
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km70.png)
Photo 4: Récupération de terre
sur le talus et bas fond à karma
Photo 5: Récupération de terre
sur le plateau de Bougoum
Source : Travaux terrain, 2023
Ces photos illustrent l'efficacité des
aménagements de restauration des sols, montrant le degré de
réussite de la régénération des terres. Les
principales méthodes de réhabilitation des terres
dégradées incluent les activités de demi-lune, les seuils
de pendage et les banquettes.
Certaines initiatives menées par les ONG et Projets de
développement se sont avérées très efficaces et
adaptées. Elles ont permis de restaurer plus de mille hectares de terres
dégradées. La prise de conscience générale, a
permis une réelle implication de la population dans les efforts de
restauration du couvert végétal. Ces activités de
restauration des terres se font sous formedu Cash for Work (Travail contre
Rémunération).
Toute fois après le départ des Projets, par
manque de suivi des activités réalisées, la
réussite des actions entreprises est compromise, C'est l'exemple de
plusieurs sites de récupération où l'on trouve des signes
d'ouvrages non réussi, principalement les demi-lunes. Cependant, il est
également important de noter que dans d'autres secteurs, aucune action
de récupération des terres n'a été entreprise,
comme c'est le cas à Damari, laissant ainsi les terres dans un
état de dégradation continue. Dans d'autres secteurs
également, les actions n'ont pas donné les résultats
escomptés en raison d'un manque de suivi (photo 6).
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km71.png)
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km72.png)
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Photo 6: Exemple de récupération
non réussie Source : Travaux terrain, 2023
Malgré l'effort consenti sur ce site de
récupération, le résultat n'est pas celui attendu dû
à l'absence de suivi des ouvrages réalisés.
En résumé, l'analyse souligne l'impact
significatif du changement climatique sur l'évolution du couvert
végétal de la région étudiée,
influencé par les variations pluviométriques au fil du temps. Les
données météorologiques entre 1981 et 2020
révèlent une amélioration des précipitations, en
particulier dans la partie Sud de la région, signalant un possible recul
de la sécheresse pluviométrique qui a affecté le Sahel (P.
Ozer et al., 2003).
Cependant, la décennie 2001-2010 a été
marquée par une baisse des précipitations, sauf à Niamey.
Globalement, une augmentation des précipitations semble être
bénéfique pour le couvert végétal, tandis que la
dégradation actuelle de la végétation est principalement
due à l'exploitation humaine, en l'absence des déficits
pluviométriques majeurs. L'analyse, met en évidence l'importance
de surveiller les tendances pluviométriques dans le contexte du
changement climatique pour une gestion et une préservation.
Les entretiens avec les populations des trois secteurs de la
zone d'étude révèlent une dégradation
avancée du couvert végétal au cours des dernières
décennies. Les activités humaines, en particulier la coupe de
bois à des fins commerciales, sont identifiées comme la
principale cause de cette détérioration. De plus l'expansion
urbaine, la croissance démographique et la pression foncière ont
contribué à la transformation des zones boisées en terres
agricoles.
Néanmoins, des actions de restauration des terres et de
régénération du couvert végétal ont
été entreprises avec une certaine efficacité. Il est
essentiel de poursuivre ces efforts pour restaurer
![](Dynamique-du-couvert-vegetal-autour-de-la-ville-de-Niamey-dans-un-rayon-de-75-km73.png)
le couvert végétal et sensibiliser la population
à la préservation de l'environnement. La gestion durable des
ressources naturelles est cruciale pour éviter une dégradation
continue du couvert végétal et de l'environnement.
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