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Problématique de la gestion des marchés publics par les collectivités locales guinéennes. Cas des communes de Ratoma et de Balandougou.


par Mohamed DIALLO
Université Kofi Annan de Guinée - Master en Droit et Gestion des Collectivités Territoriales 2021
  

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Liste des sigles et abréviations

ADL : Agent de Développement Local

ANAFIC : Agence Nationale de Financement des Collectivités

ARMP : Autorité de Régulation des Marchés publics

CRD : Comité Règlement des Différents

DAO : Dossier d'Appel d'Offres

DNCMP : Direction Nationale des Marchés Publics

DND : Direction Nationale de la Décentralisation

MP : Marchés Publics

ONG : Organisation Non Gouvernementale

PACV : Programmes d'Appui aux Communautés Villageoises

PAI : Plan Annuel d'Investissement

PME : Petites et Moyennes Entreprises

PPP : Partenariat Public-privé

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Introduction

Généralement, les personnes publiques recourent aux contrats pour se procurer des biens et des services, pour faire réaliser des travaux ou pour externaliser des activités d'intérêts généraux ou de services publics relevant de leurs compétences. Elles recourent également aux contrats pour développer le dialogue social dans les services. Cette diversité des objets des contrats conclus par les personnes publiques se traduit par une grande variété de formes de contrats : les marchés publics et les contrats de partenariats publics-privés.

En Guinée, il est à constater que les collectivités locales, objets de cette étude, se servent plus des marchés publics que d'autres contrats pour réaliser les actions de développement. Elles ont des besoins en travaux, en fourniture et en services nécessaires au bon fonctionnement des services destinés à satisfaire l'intérêt général. Cependant, dans la gestion courante de ces marchés publics, les collectivités locales, depuis la consécration de la décentralisation ou la gouvernance locale lors du discours programme du chef de l'Etat en 1985, sont confrontées à d'énormes problèmes liés au non-respect des procédures de passation, d'exécution, de contrôle et d'inobservation des principes de la commande publique. Par conséquent, les collectivités locales guinéennes ont du mal, par endroit, à satisfaire les besoins pressants de leurs communautés. Or, à travers les compétences qui leur sont transférées, elles peuvent, à partir d'une gestion optimale, efficace et efficiente des marchés publics, atteindre les missions de développement économique et social qui leur sont assignées.

Rappelons également qu'en Guinée, contrairement aux autres Etats francophones, les instruments juridiques règlementant la gestion des marchés publics locaux manquent d'une certaine corrélation entre eux et ils limitent la capacité d'action des collectivités. Cependant, pour remédier à ces insuffisances, le PACV (programme d'appui aux communautés villageoises), actuellement remplacé par l'ANAFIC, a élaboré un manuel de procédures de passation des marchés au niveau communautaire1tout en se conformant aux grands principes de passation des marchés publics. Ce manuel de procédure, n'étant pas une source régulière de garantie pour les collectivités, doit faire l'objet d'une codification pour en faire un régime spécial pour l'ensemble des collectivités. Il n'est, en aucun cas, une référence légale pour la gestion des marchés publics locaux.

1 PACV Guinée, manuel de procédures de passation des marchés au niveau communautaire, 2012, version actualisée.

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Dès lors que les collectivités locales, bénéficiant des pouvoirs de passer les marchés publics, n'observent pas les principes de la commande publique et se détournent d'appliquer les procédures de passation, d'exécution et de contrôle des marchés publics prévus par les textes législatif et réglementaire, le développement à la base se voue à l'échec. De surcroit, après des enquêtes sur les collectivités locales guinéennes notamment les communes de Ratoma et de Balandougou, il s'avère que celles-ci ne bénéficient pas du transfert de ressources nécessaires à l'accomplissement des compétences qui leur sont dévolues. Sans ces ressources, le plan de développement local, élaboré par l'exécutif local et adopté par le conseil local, duquel est extrait le programme annuel d'investissement2, ne peut être exécuté pour la satisfaction des communautés à la base. C'est à travers le PAI que les projets prioritaires des collectivités sont déterminés et, à partir duquel, les marchés locaux à réaliser sont aussi définis. Il se trouve que ces marchés locaux prévus dans les PAI sont détournés de leurs buts initiaux. Toutefois, avec le faible investissement dans les collectivités, si des manigances ont lieu dans la gestion de leurs marchés, cela va certainement se répercuter sur la qualité de prestations des services publics locaux et donc sur la qualité de vie des populations locales3.

Ainsi, le marché public, selon l'article 1 de la Loi L/ 2012/020/CNT du 11 octobre 2012 et modifiée par la loi L/2018/028/AN du 05 juillet 2018 fixant les règles régissant la passation, l'exécution, le contrôle et la régulation des marchés publics et partenariats publics-privés, est un contrat écrit, conclut à titre onéreux, passé conformément à ses dispositions, par lequel un entrepreneur, un prestataire ou un fournisseur s'engage envers l'une des personnes morales mentionnées à l'article 3, soit à réaliser des travaux, soit à fournir des biens ou des services moyennant un prix. Ceci dit que les collectivités locales peuvent passer les contrats de marchés publics dans les mêmes conditions que l'Etat, sous réserve de quelques dispositions du code des marchés publics et de l'arrêté fixant les seuils de passation desdits marchés. En outre, au même titre que l'Etat, elles peuvent posséder les qualités de pouvoirs adjudicateurs mais aussi de celles d'entités adjudicatrices. Par ailleurs, les collectivités locales peuvent faire des économies d'échelles en intégrant un groupement de commande4. Celui-ci peut réunir les collectivités locales, les établissements publics, l'Etat ou des personnes morales de droit privé.

2Article 579 du Code des collectivités locales guinéen

3Iram El QUAOUTI, gestion locale des marches publics et service public local : le cas communal, Université MOHAMED V, 2009, page 29.

4J. FERSTENBERT, F. PRIET, P. QUILICHINI, Droit des collectivités territoriales, Dalloz, 2° édition, 2016, p. 846.

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Les marchés publics, qu'ils soient étatiques ou locaux, obéissent à des principes dont l'observation permet aux pouvoirs adjudicateurs de fournir des prestations et/ou de réaliser des travaux d'intérêt général. Ces principes, mentionnés à l'article 2 de la Loi sur les marchés publics, portent sur la libre concurrence, la liberté d'accès à la commande publique, l'économie et l'efficacité du processus d'acquisition et la transparence de la procédure.

D'abord, la libre concurrence et la liberté d'accès à la commande publique sont des principes fondamentaux dans la gestion des marchés publics. Ils signifient que l'autorité contractante ou l'entité adjudicatrice ou l'acheteur public doit permettre à toutes les entités candidates pour l'exécution d'un marché de soumissionner en toute liberté. L'autorité contractante, pour la satisfaction de ses besoins avec efficacité, doit créer un milieu concurrentiel et être impartial entre les entrepreneurs ou entre les fournisseurs ou entre les prestataires qui ont décidé de soumissionner. Aucune entité ne peut être écartée dans la procédure en se fondant sur des conditions autre que celles prévues par le code des marchés publics.

Ensuite, l'égalité de traitement signifie que tous les candidats à un marché doivent être traités de manière identique s'ils sont placés dans les mêmes situations juridiques. Il est le corollaire du principe selon lequel tous les êtres humains sont égaux devant la loi. Il faut dire que l'égalité de traitement est un principe fondamental pour les Etats de droit démocratique car, il a été consacré dans l'ensemble des instruments juridiques encadrant les droits de l'homme notamment la déclaration universelle des droits de l'homme. Selon ce principe, transposé dans la gestion des marchés publics, aucune personne publique candidate à l'attribution d'un marché public ne doit fausser ou échapper le libre jeu de la concurrence en tirant indument profit des avantages dont il dispose en tant qu'autorité publique5. Il permet à tous les candidats à un marché de bénéficier d'un même traitement, de recevoir les mêmes informations et de concourir selon les mêmes règles de compétitions prévues par le code des marchés public. Les élus des collectivités locales ont une obligation d'abstentions en cas de conflits d'intérêts. Les membres de la commission d'appel d'offres intéressés à l'affaire doivent organiser leur suppléance et n'exercer aucune influence sur le choix de l'entreprise attributaire, de manière à ne mettre en péril la régularité de la procédure.6

Enfin, la transparence des procédures suppose que les autorités contractantes permettent la traçabilité du déroulement de la procédure de passation des marchés publics (procès-verbaux d'évaluation, de jugement, d'audition, de négociation, etc.) et la publication de toutes les

5 CE, 2000, Sté Jean-Louis-Bernard consultant, N°222208, recueil Lebon.

6 CE, 14 octobre 2015, région Nord-Pas-de-Calais, n°390968, recueil Lebon.

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phases de la procédure pourvus que tous les soumissionnaires soient au même niveau d'information. Les critères de choix sont portés à la connaissance des soumissionnaires dès la publicité. Ils permettront aux autorités contractantes de choisir l'offre la moins-disante. De même, tout candidat ou soumissionnaire dont l'offre est rejetée conformément aux prescriptions du Code des Marché Publics ou ne correspond pas aux critères retenus pour l'attribution doit être informé ainsi que des motifs de ce rejet.

« On retrouve ce principe en amont et en aval des procédures de passation des contrats de marchés publics. La transparence, c'est en effet à la fois la publicité la plus large possible, afin qu'un maximum de candidats puissent répondre à une procédure, qu'il s'agisse d'un marché public ou d'une concession...Il n'est, cependant, plus l'apanage des seules autorités contractantes ; il s'applique aussi aux opérateurs économiques qui ne doivent occulter aucun élément relatif à leur situation. »7

Ce principe, lorsqu'il est appliqué par les acheteurs publics, permet d'éviter les conflits d'intérêts entre les services de passation et d'attribution et les candidats ou les soumissionnaires. De plus, pour une gestion optimale des deniers publics, le code des marchés publics en ajoute au principe traditionnel de transparence le principe de l'économie et de l'efficacité du processus d'acquisition. Ceci suppose que les autorités contractantes, en charge de l'intérêt général, doivent permettre le financement à moindre cout les marchés à réaliser pour le bénéfice des collectivités.

Malgré que ces enjeux et ces principes sont prévus et définis par le législateur guinéen, nos collectivités ont du mal à amorcer un développement harmonieux et équitable. De ce fait, il est important de signaler qu'elles sont confrontées à d'épineux problèmes de gestion des marchés publics. Ces problèmes, liés aux procédures non adaptées de passation et d'exécution des marchés publics, au manque de moyens financiers, au non-respect des principes de la commande publique et à un manque de personnels qualifiés, constituent des handicaps pour le progrès des communautés : but de la décentralisation. Globalement, le déficit en infrastructures et en services des collectivités locales guinéennes, qui s'explique par une mauvaise gestion des marchés publics, constitue un handicap sérieux au développement local.

L'expérience a démontré qu'une gestion efficace et efficiente des marchés publics par les collectivités territoriales permet de réaliser des progrès socioéconomiques partagés. A cet

7 J.M. PEYRICAL, La transparence dans les marchés publics, www.constructif.fr, N°51, Novembre 2018.

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effet, pour permettre à la Guinée d'avoir une décentralisation efficace et efficiente, il faut une gestion optimale des marchés publics.

L'étude de ce thème est d'un intérêt particulier car, les collectivités locales guinéennes, ayant reçu des compétences transférées, ne parviennent pas à assurer pratiquement le développement à la base par la gestion optimale des marchés publics. Par conséquent, son étude a un intérêt théorique et pratique. Théoriquement, cette étude nous permettra d'avoir une connaissance sur le processus de gestion des marchés publics locaux prévu par la législation et la règlementation d'une part et d'autre part, la jurisprudence et les avis des doctrinaires. Sur le plan pratique, elle permettra, d'une part, de lever le voile sur les mauvaises pratiques qui gangrènent la gestion des marchés publics des collectivités de Ratoma et de Balandougou et de présenter les obstacles que rencontrent celles-ci et d'autre part, d'aboutir à des solutions pouvant leurs permettre de répondre aux défis de développement communautaire.

Notre réflexion, dans le cadre de cette étude, va porter essentiellement sur les marchés publics (passation, exécution et contrôle) des collectivités locales guinéennes. Par conséquent, l'analyse menée dans cette présente ne portera pas sur les contrats de partenariats public-privés. Ces derniers, dans la pratique, n'ont jamais été un moyen de gestion des services publics des collectivités guinéennes notamment celle de Ratoma et de Balandougou malgré leur importance dans le développement économique et social. Mais, il faut retenir aussi que ces contrats, de même que les marchés publics, obéissent à certaines dispositions du code régissant les marchés publics. Toutefois, les conclusions de cette étude peuvent avoir des incidences positives sur une éventuelle réforme des contrats de partenariats public-privé au niveau local.

Le présent mémoire a pour objectifs de présenter d'une part, de façon générale, les mécanismes de gestion des marchés publics et d'autre part, décrire les dysfonctionnements que rencontrent les collectivités locales guinéennes et proposer des solutions qui permettront aux décideurs à la base de pouvoir gérer les projets de développement locaux de manière efficace et efficiente.

Dans le cadre de cette étude, nous avons recouru à différentes méthodes pour l'atteinte des objectifs susmentionnés. Parmi celles-ci, nous avons :

- La revue documentaire :

Pour cette revue documentaire, les principales structures visitées sont : la bibliothèque universitaire de l'université Kofi Annan de Guinée (UKAG), le programme d'appui aux

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communautés villageoises (PACV), la Direction Nationale de la Décentralisation (DND), le gouvernorat de la ville de Conakry et les communes de Ratoma et Balandougou. Les documents consultés sont ainsi structurés comme suit : les ouvrages généraux et spécifiques, les mémoires, les revues/recueils en rapport avec notre thème, les textes législatifs et règlementaires et les rapports d'étude des structures susmentionnées. Cette revue documentaire nous a permis de cerner et d'appréhender les procédures formelles de passation et d'exécution des marchés publics locaux. Notons aussi que notre recherche documentaire à porter sur les sites internet spécialisés dans l'étude des collectivités territoriales.

- La méthode empirique

Cette recherche documentaire a été complétée par des entretiens réalisés auprès des personnes ressources se trouvant dans les communes urbaine et rurale de Ratoma et Balandougou et celles relevant des structures du gouvernorat de Conakry, du PACV et de la direction nationale de la décentralisation. Ces entretiens ont porté sur les éléments pratiques des procédures de passation et de contrôle des marchés publics locaux. A cet effet, nous avons pu relever et mesurer les difficultés auxquelles les collectivités font face quotidiennement pour satisfaire les besoins en infrastructures, en fournitures et en service.

Alors, après avoir analysé leur régime juridique, quels sont les obstacles juridiques et matériels, en matière de gestion des marchés publics, qui empêchent les collectivités locales guinéennes d'engager un développement économique et social ? Du moment où les diagnostics sont présentés, quels peuvent être les solutions pouvant permettre aux collectivités de répondre efficacement aux besoins de leurs populations en matière d'infrastructures et de services ?

Notre étude qui a pour thème : « la problématique de la gestion des marchés publics par les collectivités locales guinéennes » va alors se proposer, d'une part, de présenter le régime juridique de la gestion des marchés publics des collectivités de Ratoma et Balandougou comme illustrations (Première partie) et, d'autre part de relever les insuffisances des procédures de passation, d'exécution et de contrôle desdits marchés et de suggérer des solutions aux dysfonctionnements constatés ou observés (Deuxième partie).

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera