1.2.3) L'auto-emploi : l'alternative fatale
Un diplôme reste un investissement extrêmement
rentable. Mais, des questions demeurent sur l'insertion des
diplômés dans le marché du travail. Nous n'avons pas pu
trouver un travail pertinent au sujet de l'employabilité des
diplômés en sciences dans les universités
béninoises, et des diplômés en technologie des
écoles polytechniques .
6. Le cas du Bénin doit être rigoureusement
étudié. "Nous devons investir dans le développement de
l'EFTP et de l'information sur le marché du travail des systèmes,
ainsi que dans le renforcement des capacités des individus et des
institutions pour être en mesure de concevoir des instruments et de
collecter et analyser les données" ( UNESCO, 2012).
7. Voir Annexe A sur l'importance de la formation
professionnelle et technique pour l'auto-emploi.
13
Compétences nécessaires à
l'employabilité des jeunes diplômés
En ce qui concerne la demande d'emploi, il est noté que
plusieurs milliers de demandes d'emploi sont enregistrées auprès
de l'Agence Nationale pour la Promotion de l'Emploi (ANPE). Parmi ces
candidats, on compte les diplômés de l'université. Au cours
des dernières années, le nombre de demandeurs d'emploi avec un
diplôme de l'enseignement supérieur dépasse nettement celui
des bacheliers. Deux tiers ont un diplôme universitaire avec une
disponibilité à travailler à une position
inférieure. L'âge des demandeurs d'emploi est de 25 ans en
moyenne. En outre, près d'un demandeur d'emploi est vacant depuis au
moins un an. Le Bureau d'études statistiques trouve spectaculaire que
les diplômés postulent à des emplois qui nécessitent
peu de qualifications. Le Bénin est donc indéniablement
confronté à la question du chômage et de l'emploi des
jeunes en sous-emploi. La main-d'oeuvre potentielle est estimée au
Bénin en 2006 à 4 856 548 individus, soit 64% de la population
totale du pays, dont 51% de femmes et 49 % d'hommes. Les jeunes de 15 à
35 ans représentent environ 60.3% de la population (d'après le
RGPH3). Selon les projections faites par l'Institut National de la Statistique
et de l'Analyse Économique (INSAE), le nombre de jeunes au Bénin
passera de 1 290 333 personnes en 2004 à plus de 2 571 174 personnes en
2025, soit une augmentation de 72 500 personnes par an. Le taux de
chômage en 2007 selon les statistiques de l'INSAE est de 0.74 % et le
sous-emploi est évalué à plus de 75%. Les jeunes sont les
plus touchés par ce phénomène de sous-emploi avec de
très faibles perspectives de travail décent, ou d'emploi
permanent.
Bernard Mumpasi Lututala, Capacity for access to employment
Sub-Saharan Africa, Août 2012, rapport préparé pour le
projet de l'enseignement secondaire innovant pour l'amélioration des
compétences (ISESE), dirigé par le Results for Development
Institute (R4D) avec le soutien de la Fondation Rockefeller.
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Quoi qu'il en soit, Adeyemo et al. (Juin 2010) ont soumis un
travail sur le problème : A survey of factors determining the
employability of science and technology graduates of polytechnics and
universities in the Nigerian Labor Market. De leur résumé,
de nombreux diplômés universitaires se plaignent des niveaux
élevés de chômage parce que les perspectives d'emploi se
sont détériorées au fil du temps. Le pourcentage de
chômage des diplômés a pris des proportions alarmantes en
particulier pour les diplômés en sciences et en technologie.
Est-ce que l'éducation qu'ils reçoivent est en harmonie avec les
exigences de compétences d'aujourd'hui, dans le marché du travail
ou les programmes utilisés dans les établissements d'enseignement
supérieur sont-ils trop obsolètes? Leur analyse des
résultats d'enquête a montré un décalage entre les
sorties de l'université et les exigences du marché du travail. La
proportion des diplômés en sciences au chômage est encore
plus importante.
14
La précédente analyse AEO 8(2015) a
établi un certain nombre de faits concernant l'emploi des jeunes et leur
éducation :
1. Un niveau d'éducation élevé est
lié à un chômage élevé chez les jeunes, et un
faible taux de chômage chez les adultes;
2. Dans la population des individus à niveau
d'éducation élevé, le taux de chômage varie selon le
type de degré d'éducation;
3. Le découragement et la décision de ne plus
travailler sont plus probables chez les jeunes dotés de peu
d'éducation formelle.
L'auto-emploi serait donc une alternative à encourager,
notamment pour faire face au sous-emploi et au chômage accru des jeunes,
diplômés ou non.
1.3) Problématique, objectifs et
hypothèses de recherche Problématique
Les enjeux du millénaire étant multiples, les
politiques en faveur de la création d'emploi décent ne saurait
être efficaces sans toutefois répondre à la
problématique de l'auto-emploi, en vue d'améliorer sa
qualité compte tenu de son importance économique. En effet, la
situation du marché du travail pour les jeunes du Bénin est
précaire et le sous-emploi est également dominant. Ceci engendre
des inquiétudes quant à la qualité du travail
indépendant au Bénin: peut-on dire qu'il représente une
économie prospère? D'autre part, le public et le privé
semblent ne plus être capables d'accueillir les jeunes sortant des
universités, et des écoles. L'auto-emploi est donc une
alternative inévitable et présente pour les jeunes
l'opportunité d'une insertion professionnelle plus facile. Cependant,
l'on ne saurait faire la promotion de l'auto-emploi sans diagnostiquer à
la base le profil des acteurs qui le caractérise. Autrement dit, l'on ne
pourrait recadrer durablement les politiques institutionnelles vers
l'auto-emploi, sans toutefois évaluer l'environnement
démographique et socioéconomique dans lequel évolue le
travail indépendant. La formation professionnelle et technique par
exemple souffre d'un manque de valorisation, et reste très peu
convoitée. Pourrait-elle orienter les jeunes vers l'auto-emploi sans
aucune réforme préalable?
Pour mettre en oeuvre des politiques favorables à
l'auto-emploi, afin de garantir un emploi décent pour tous, il faudrait
identifier à la base les actions nécessaires compte tenu de la
situation actuelle. Les questions suivantes surgissent donc : l'environnement
institutionnel, y compris le système éducatif, est-il prêt
à faire cet élan vers l'auto-emploi? Pour répondre
à cette problématique, une étude du travail
indépendant est requise : qui sont ces jeunes présents sur le
marché de l'auto-emploi? quels sont leur profil et les types
d'activité qu'ils exercent? Leur niveau d'instruction a-t-il joué
un rôle significatif dans le choix du type d'occupation? En dehors
8. African Economic Outlook
15
de leur motivation, quel est l'influence des facteurs
démographiques et socioéconomiques? Un diagnostic fiable
permettra de mettre en lumière l'état des lieux sur le
thème. C'est dans ce cadre que s'inscrit cette étude sur les
déterminants de l'auto-emploi chez les jeunes de 15 à 29 ans au
Bénin. L'analyse servira de piste de réflexions pour les
décideurs, et un guide dans la mise en oeuvre des politiques, et
particulièrement dans l'élaboration des documents de
stratégies de réduction de la pauvreté (DSRP).
Objectifs et hypothèses de recherche
Ce travail permettra donc de re-orienter les actions des
institutions concernées, notamment le Fonds de Développement de
la Formation Professionnelle Continue et de l'Apprentissage (FODEFCA), dans les
réformes contributives à la formation professionnelle et
technique, ainsi que l'insertion professionnelle des jeunes sortant des
écoles et universités pour une expérience sur le
marché du travail plus épanouie. Pour cela, nous
étudierons l'auto-emploi à travers :
· une caractérisation socioéconomique de la
population des jeunes travailleurs indépendants (formels ou
informels);
· l'influence du niveau d'instruction (de l'individu ou de
ses parents);
· l'influence de la formation professionnelle et technique
(de l'individu ou de ses parents);
· et l'influence d'autres facteurs démographiques
et socioéconomiques. Les hypothèses de recherche que nous
émettons sont :
H1 : Une éducation formelle a
une influence positive sur l'auto-emploi;
H2 : La formation professionnelle et
technique a une influence positive sur l'auto-emploi.
16
Chapitre
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