1.2. Examen de la littérature sur le
contrôle des budgets communaux
Le contrôle des finances publiques d'une manière
générale et spécifiquement des finances locales remonte
à une période lointaine en Angleterre (a) et se décline en
plusieurs types (b).
a) Genèse du contrôle des finances publiques
locales
Le point de départ des finances publiques se situe au
début du XIII e siècle en Angleterre avec la Magna Carta en juin
1215, document dans lequel sont inscrites les premières règles
financières.11S'agissant du contrôle des finances
locales, son point de départ date des 1980 avec la création des
chambres régionales des comptes en France. Dans le domaine de la
levée et de l'utilisation des ressources publiques, l'exigence de
l'exercice d'un contrôle a été considérée
comme fondamentale au point que les auteurs de la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 aout 1789 ont
proclamé à l'article 14 de ladite Déclaration : « les
citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs
représentants, la nécessité de la contribution publique,
de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la
quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée » .
En fait, très peu de pays échappent à la
dilapidation des fonds publics et à la corruption. Ces
phénomènes revêtent simplement des formes et prennent des
proportions différentes dans le temps et dans l'espace. Seul un
contrôle effectif et performant permet de lutter efficacement contre
ceux-ci et d'assurer la maitrise des finances publiques et de remédier
aux dysfonctionnements préjudiciables à l'épanouissement
des citoyens des Etats.
11 YONABA S., (2010) cours de finances publiques,
Université Ouaga II
14
FIEDLER (1998), Secrétaire général de
l'INTOSAI en 1998, affirme, dans l'avant-propos de la Déclaration de
LIMA sur les grandes lignes directrices du contrôle des finances
publiques, que les objectifs spécifiques du contrôle des
finances publiques tiennent essentiellement à l'utilisation
appropriée et efficace des fonds publics, la recherche d'une gestion
financière rigoureuse, l'adéquation de l'action administrative et
l'information des pouvoirs publics et de la population par la publication de
rapports objectifs.
Le champ des finances publiques est visiblement dominé
par le contrôle présent à toutes les étapes de la
vie financière de l'Etat et des collectivités locales.
b) Typologie du contrôle
Le contrôle prend des formes et modes d'exercice divers.
Ce qui a amené des auteurs à entreprendre la classification des
différents types de contrôle.
A cet égard, DUVERGER (2000) considère que le
contrôle peut revêtir plusieurs formes et être classé
d'après la nature des personnes contrôlées (contrôle
sur les administrateurs et contrôle sur les comptables), d'après
la nature des faits contrôlés (contrôle des recettes et
contrôle des dépenses), d'après le moment du contrôle
( contrôle a priori, contrôle en cours d'exécution et
contrôle a posteriori), d'après la nature des organismes
contrôleurs (contrôle administratif, contrôle juridictionnel
et contrôle politique exercé par le parlement). D'autres auteurs
procèdent à une distinction plus synthétique identifiant
les modes d'endo contrôle ou contrôles financiers internes et les
modes d'exo contrôle ou contrôles financiers externes. FALL (2004)
soutient que les premiers interviennent en cours d'exécution ou a priori
et sont exercés par des services relevant des Ministères des
finances, les seconds étant exercés par des organes situés
en dehors de l'administration que sont notamment les juridictions des comptes
et le Parlement. En dépit des efforts de classification des
différents modes de contrôle qui s'exercent sur les finances
publiques, les systèmes financiers des Etats de l'Afrique subsaharienne
francophone cumulent ces différentes modalités de contrôle
à l'instar du système financier français dont ils sont
héritiers.
Dans le même ordre d'idées, TAM (1990)
énonce deux options de contrôle à savoir le domaine
d'application du contrôle qui porte en principe sur les opérations
de dépenses et de recettes des organismes publics d'une part, et de la
multiplicité et variété des contrôles d'autre
part.
15
Il distingue cinq (5) classifications des contrôles.
Pour lui les contrôles peuvent être classés d'après
les agents contrôlés et s'exercent sur les administrateurs de
crédits, les ordonnateurs-délégués et les
comptables publics. TAM (1990) poursuit en énumérant les
contrôles d'après le moment où ils s'exercent : les
contrôles à priori, en cours d'exécution ou après
l'exécution ; il cite également les contrôles en ce qu'ils
portent sur la régularité des actes (contrôles de la
régularité des actes) ou sur la qualité de la gestion ; il
classe aussi les contrôles d'après qu'ils s'effectuent sur place
et sur pièces (les contrôles sur place et les contrôles sur
pièces).
La dernière classification faite est le contrôle
d'après les organes qui les exercent qui se répartit
premièrement en organes d'endo contrôle et organes exo
contrôle et deuxièmement en trois groupes de contrôles :
organes administratifs, organes juridictionnels et organe
politique.12
Pour notre part, ces différentes classifications
relèvent beaucoup plus de la théorie que de la pratique. Sur le
plan théorique cette classification est pointue et s'accommode avec la
doctrine. Tandis qu'au plan pratique il présente le risque de confusion
pour les gestionnaires des budgets.
Jusque-là les auteurs se sont intéressé
à la genèse et aux différents types de contrôle des
finances publiques dont les finances locales. Leurs interventions se portent
également sur les moments du contrôle ainsi que les structures de
contrôle de chaque pays. De même le problème soulevé
par les auteurs et les différents rapports se résument d'une part
à l'intérêt du contrôle pour les populations et
d'autre part sur les conséquences des mauvaises gestions des finances
publiques.
Mais la problématique de l'efficacité du
contrôle n'est pas assez développée par les auteurs. En
effet une chose est de contrôler mais le but principal reste
l'efficacité c'est-à-dire atteindre les objectifs poursuivis par
le contrôle. Ces objectifs sont la diminution ou l'anéantissement
total des malversations ou irrégularités de gestions des budgets
locaux. Quelques rares auteurs se sont intéressés à
l'efficacité du contrôle des finances publiques.
Ceux qui se sont intéressé à la question
font un diagnostic d'un organe de contrôle pour mettre à nu les
faiblesses qu'il faille corriger. Dans un premier temps ISSAD et
12 TAM (1990) page 310
16
ABADA (2014) de l'Université de Setif 1 ont fait un
rapport sur l'« évaluation de l'efficacité du contrôle
financier de l'état sur l'exécution des programmes
d'investissements publics (2001-2014) » qui soulèvent les forces et
faiblesses du contrôle financier sur la gestion des finances publiques.
Ils mettent à nu la problématique du contrôle financier sur
les dépenses d'équipement de l'Etat, sur la lutte contre le
gaspillage et la mauvaise gestion des deniers publics.
Dans un second temps, KERS (2013), de la cour des comptes du
Maroc décrit, les limites du dispositif du contrôle des finances
publiques qui sont de deux ordres. D'une part, ce sont essentiellement les
fragilités du système tenant à la diversité des
procédures et techniques d'investigation et d'autre part les conditions
défavorables liées à l'absence du suivi des indicateurs de
performance et aux insuffisances constatées au niveau des reporting
limitant ainsi la qualité des contrôles effectués.
Quant à DIALLO (2011) de l'UCAD dans son mémoire
de fin d'études sur « le contrôle des finances locales au
Sénégal », le contrôle des finances locales
comporte des imperfections susceptibles d'entraver son efficacité. Il
note que du point de vue politique, c'est la prévalence des relations
partisanes entre l'organe délibérant et l'exécutif qui
constitue le premier blocage. L'efficacité du contrôle du budget
local est ensuite confrontée au manque de formation des élus
locaux chargés du contrôle interne.
Dans un rapport au gouvernement français, LAMBERT et
MIGAUD (2009) ont rendu publiques, le 16 septembre 2005, les conclusions de
leur mission auprès du Gouvernement sur la mise en oeuvre de la LOLF. Ce
rapport propose des pistes de travail pour transposer « aux
collectivités territoriales des outils et processus budgétaires,
comptables et relatifs à l'évaluation et au contrôle
introduits par la LOLF ». Ce rapport précise qu'« une
amélioration des outils budgétaires des collectivités
territoriales pourrait donc être envisagée, et contribuer tant
à la transparence de l'action qu'à la performance de la gestion
locale. Une fois les outils forgés, elle pourrait faire l'objet d'une
expérimentation, sur la base du volontariat, dans les
collectivités » (p.80)13.
13* Laurent ZAMPICCOLI
17
TOURE14 (2004) du Mali évoque des paradoxes
dans le système de contrôle des finances publiques dans son pays.
Mais avant ces paradoxes l'auteur, sur la notion de contrôle
soulève la problématique de la confusion entre le contrôle
hiérarchique et le contrôle de tutelle. S'agissant des paradoxes
évoqués par TOURE (2004) sur le système de contrôle
des finances publiques au Mali, l'auteur relève dans un premier temps
les insuffisances du contrôle interne.
A ce titre, il cite d'abord les faiblesses du contrôle
interne qui sont entre autres le manque d'assimilation du fait administratif,
la longueur des circuits administratifs, la fluctuation des hiérarchies,
les difficultés de mise en oeuvre de la responsabilité
pécuniaire des ministres, la lenteur de la publication des rapports de
contrôle. TOURE (2004) relève aussi l'inadaptation du
contrôle interne qui se caractérise par le chevauchement des
différentes structures de contrôle interne et par le fait que les
mêmes structures disposent des mêmes attributions. TOURE (2004)
propose donc une intégration des systèmes de contrôle pour
remédier à l'inadaptation. L'auteur met à nu
également d'autres limites qu'il qualifie de subjectives au rang
desquelles on peut noter les difficultés d'ordre politique et
administratif et le manque de motivation des agents.
Il convient de souligner que l'étude de
l'efficacité des structures a très peu intéressé
les auteurs burkinabè. C'est cela qui témoigne de la
rareté des publications y relatives, exemption faite des organes de
contrôle qui publient régulièrement leur rapport
d'activités.
E
n sommes, nous avons dans un premier temps donné des
éclaircissements sur les concepts clés du thème de notre
étude. Dans un second nous nous sommes intéressé à
la revue de littérature pour montrer la situation de la
problématique de l'efficacité du contrôle des budgets
locaux vue par la doctrine. La littérature sur le contrôle des
finances publiques est abondante ; cependant sur l'analyse de
l'efficacité du contrôle les publications sont rares. Il y a lieu
de décrire maintenant le dispositif et les normes de contrôle de
l'exécution du budget communal au Burkina Faso.
14 Enseignant à la faculté des sciences
juridiques et économiques de l'Université de Bamako
18
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