II.2.2- L'analyse du cas particulier du
surendettement
Si l'on se réfère au préfixe «sur
», tiré du latin « super » et qui signifie
surplus, excès, surcharge, le surendettement renvoie à un
endettement excessif. Toutefois, dans son ouvrage consacré à
l'exclusion bancaire, Gloukoviezoff (2010) en donne une définition plus
étoffée. Il voit dans le surendettement «
l'impossibilité structurelle pour une personne ou un ménage de
faire face à ses engagements financiers contractuels sans réduire
les dépenses nécessaires à son niveau de vie au-dessous
d'un seuil minimal socialement acceptable, en raison de son
impossibilité de mobiliser d'autres avoirs (financiers ou non) ou
d'autres sources de financement ».
L'analyse des mécanismes du surendettement repose sur
une grille de lecture binaire en termes de surendettement actif ou passif.
Ainsi, le premier concerne les personnes ayant contracté un
crédit auprès d'organismes financiers ou de sources informelles.
En revanche, le second type de surendettement est la conséquence d'un
accident de la vie (licenciement, maladie ou accident, divorce etc.) qui vient
déséquilibrer le budget des personnes qui en sont victimes.
A la base de l'endettement des particuliers se trouve le
crédit à la consommation qui occupe une place de choix dans les
sociétés contemporaines. La plupart du temps les individus
recourent à l'endettement dans un but précis, à savoir
financer des biens durables ou immatériels et faire face à des
aléas. En outre, ce mode de financement présente un grand
avantage, à savoir la possibilité qu'il offre d'étaler les
dépenses dans le temps.
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
Suivant cette logique et compte tenu de la rentabilité
de telles opérations, les banques ont développé de divers
instruments de crédit au fil du temps, à l'instar des
découverts ou encore du crédit revolving17 dont les
consommateurs sont particulièrement friands. Il s'agit là de
facilités permanentes permettant aux utilisateurs de disposer de fonds
à leur guise.
Malheureusement, ces crédits sont très souvent
perçus comme des revenus artificiels, des « fontaines de miracles
» utilisés tant pour résoudre les problèmes
financiers que pour réaliser des rêves (Belkacem, 2009).
Seulement, un usage abusif de tels produits plonge les clients dans un cercle
vicieux, en déséquilibrant leurs budgets. Ces personnes
concernées se trouvent obligées de contracter de nouveaux
crédits pour combler des découverts, payer des dettes. Pour
mettre un terme à ce cycle infernal, elles sont contraintes de recourir
au crédit, ce qui complexifie d'avantage la situation.
Ce faisant, la banque n'offrira une option de rachat au client
que si ce dernier, bien qu'illiquide pour faire face aux mensualités de
ses différents crédits, continue à présenter un
profil relativement sûr. Il s'agit alors pour la banque de tirer avantage
de ces difficultés bancaires, en regroupant l'ensemble des
crédits en un nouveau prêt, sur une période plus longue et
avec des mensualités plus faibles.
Toutefois, si le risque de défaut de l'emprunteur
devient dangereusement élevé, la banque enclenche la
procédure de recouvrement : c'est la « disqualification bancaire
» (Gloukoviezoff, 2010). Elle vise pour la banque à éviter
limiter les coûts qu'occasionnerait la défaillance du client.
S'agissant de ce dernier, il est désormais en proie à l'exclusion
bancaire et indigne d'intérêt, les banques n'ayant pas de temps
à accorder à ceux qui n'ont pas de l'argent (Bernard, 2006).
17 Le crédit revolving est un crédit
à la consommation souvent accompagné d'une carte qui permet
à tout moment de disposer d'une réserve d'argent remboursable au
fur et à mesure et qui se reconstitue en fonction des remboursements
effectués. Selon le montant emprunté et celui des
mensualités, le taux d'intérêt varie rendant le calcul du
coût global très difficile (Gloukoviezoff, 2004). L'accès
à ce type de crédit est relativement simple dans la mesure
où les démarches et les informations requises sont
réduites au strict minimum. Toutefois, la simplicité
d'accès de ces crédits n'a d'égal que leurs
difficultés d'usage liées à la difficulté à
calculer le coût total du crédit, la tentation que
représentent ces réserves pour les personnes déjà
en situation de précarité, l'absence totale de suivi ainsi que la
brutalité des méthodes de recouvrement.
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
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