I.2- L'analyse du cas particulier de l'auto exclusion
Selon Kempson (2001), l'auto exclusion ou exclusion volontaire
d'un processus par lequel une personne renonce à l'usage des services
bancaires. Ce serait la forme d'exclusion la plus répandue au
Royaume-Uni, ce qui dénote de son importance et de la
nécessité d'en cerner les mécanismes.
La même source distingue alors trois cas de figure :
- il existe d'abord des situations dans lesquelles un individu
décide de n'avoir aucun contact avec les prestataires de services
bancaires pour des raisons autres qu'économiques, sociales, culturelles
etc. (Banque Mondiale, 2009). Compte tenu du fait que cette forme d'auto
exclusion émane réellement d'un choix personnel, elle ne pose pas
réellement de problème d'accès aux services financiers
(Beck et De La Torre, 2006) ;
- ensuite, dans d'autres cas l'auto exclusion est la
résultante de difficultés d'usage rencontrées dans la
relation bancaire, lesquelles engendrent une réduction progressive des
services auxquels un client a accès. Si les difficultés
persistent, alors ce dernier peut choisir une mise en retrait totale ;
- enfin, l'auto exclusion peut être la
conséquence d'un accident de la vie (dégradation de la situation
professionnelle ou familiale) ayant un grand
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
impact sur la situation financière de la victime, et
affectant donc sa capacité-même à supporter les frais
liés à l'usage des produits bancaires ou ses facultés
physiques et mentales (Kempson et Whiley, 1999).
Il convient de souligner que l'exclusion volontaire est
ancrée sur le degré de financiarisation de chaque
société. Ainsi, elle peut être totale ou partielle. Au
Royaume-Uni par exemple, ce processus peut aller jusqu'à une absence
totale de services bancaire ; tandis qu'en France, l'auto-exclusion ne peut
aller au-delà du renoncement aux moyens de paiement (cartes de paiement,
carte de crédit etc.) et aux services de découvert et de
crédit (Gloukoviezoff, 2005).
Le Cameroun se caractérisant encore par un faible
degré de financiarisation, il est tout à fait possible d'y
retrouver des cas d'auto exclusion totale. Ici, des barrières
psychologiques sont à l'oeuvre, notamment la méfiance envers le
système bancaire et le manque de culture financière (Leyshon et
al, 1998) qui favorisent alors la préférence pour une gestion
autonome.
II.2.1- La méfiance à l'égard des
institutions bancaires
Sapienza et Zingales (2009) expliquent ce sentiment de
méfiance par l'incertitude liée à l'avenir et la crainte
de la survenue des crises bancaires
En effet, l'incertitude est une caractéristique
intrinsèque de l'activité bancaire. Elle touche les
déposants à travers les asymétries d'information sur la
gestion de leurs avoirs en banque. Il leur est difficile de connaître le
degré de risque associé aux prêts adossés sur ces
avoirs. Ils perçoivent alors les banques comme des boîtes noires
dont le fonctionnement exact est difficile à maîtriser. Selon
Mishkin (2007), cette opacité des banques du peut engendrer
l'effondrement du système à travers des paniques et des faillites
bancaires.
En ce qui concerne les crises bancaires, elles se manifestent
souvent par l'impossibilité pour les banques d'honorer leurs engagements
envers les déposants. Le Cameroun connait des précédents
en la matière. En effet, le système bancaire camerounais a
été secoué par une crise au milieu des années 1980.
En dépit des mesures
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Les facteurs de l'exclusion bancaire au Cameroun
prises par le Gouvernement, parmi lesquelles l'indemnisation
des déposants par le canal de la Société de Recouvrement
des Créances, une grande partie des clients n'a pas pu rentrer en
possession de son épargne. L'auto exclusion, totale ou partielle, peut
donc être motivée par la crainte de revivre une telle situation
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