L'adoption des principes de prévention en droit de l'environnement au Burkina Faso et leur mise en oeuvrepar Bètièrèyaône Joel SOMDA Université de Limoges - Master 2 Droit International et Comparé de l'Environnement 2010 |
Paragraphe II : Champ d'application de l'E.I.ELa croissance de l'activité économique aux Etats-Unis avec son cortège de travaux et d'aménagements de grande envergure source de pollution a été le leitmotiv de l'instauration du principe des E.I.E. L'objectif majeur était une protection plus efficiente de l'environnement à travers la prise en compte des facteurs environnementaux dans la réalisation des projets de développement. Pour atteindre cet objectif, il faut déterminer ceux des ouvrages ou aménagements qui doivent être assujettis à l'E.I.E. C'est le problème fondamental que pose la question de la sphère d'applicabilité de l'E.I.E, celle de son champ d'application matériel. Si l'E.I.E ne doit s'appliquer qu'à une catégorie déterminée d'activités, il est logique qu'un contenu particulier lui soit imposé pour tenir compte des impératifs de protection de l'environnement. Comme le relève MAURICE KAMTO, « l'étude d'impact est coûteuse et ne saurait être engagée de manière fantaisiste »60(*). C'est pourquoi la question du champ d'application de l'E.I.E a été sans aucun doute un sujet de préoccupation pour les rédacteurs du décret portant champ d'application, contenu et procédure relative à l'étude et à la N.I.E, à en juger la minutie avec laquelle la question a été traitée. Le résultat est que la couverture des E.I.E et N.I.E est suffisamment large (A). Néanmoins, on peut observer que le décret n'a pas suffisamment pris en compte certains aspects (B). A/ Un champ d'application suffisamment largeTraditionnellement, trois méthodes différentes peuvent être utilisées pour la détermination des ouvrages ou activités assujettis à l'étude ou à la N.I.E : le système d'étude préliminaire61(*), le système de listes62(*) (positives ou négatives) et le système mixte63(*). Le décret sur les études et N.I.E combine le système de listes positives et de listes négatives car autant certaines activités sont assujetties à l'étude ou à la N.I.E, autant d'autres en sont dispensées. Pour ratisser large, la nouvelle loi a choisi une répartition des travaux, aménagements ou ouvrages par secteurs d'activités. Les domaines respectifs de l'E.I.E (1) et de la N.I.E (2) font l'objet d'une extension considérable. 1/ Le domaine de l'E.I.E Aussi bien pour l'E.I.E que pour la N.I.E, la nomenclature des travaux, ouvrages, aménagements et activités concernés figure à l'annexe 1 du décret. Celui-ci fait preuve d'originalité en faisant une répartition par secteurs d'activité. Chaque secteur d'activité est divisé en trois catégories A, B, et C. En règle générale, les critères utilisés sont multiples et vont du risque environnemental de l'activité à l'envergure du projet en passant par la fragilité de la zone ou la raison économique du projet. Le décret semble avoir jeté son dévolu sur les deux premiers critères. Pour savoir si un ouvrage ou activité est assujetti à l'E.I.E, il suffit de se reporter à la nomenclature figurant dans la catégorie A. Outre les secteurs traditionnels tels ceux de l'eau, des mines et de la géologie, de l'urbanisme et des travaux publics, de nouveaux domaines font leur entrée. Il s'agit d'une part de la défense nationale avec l'assujettissement des camps militaires, champs de tirs et poudrières à l'E.I.E et d'autre part, du secteur de l'agriculture, la culture du coton étant dorénavant assujettie à l'E.I.E. Cela mérite une attention particulière car nonobstant la noblesse d'une telle disposition, sa faisabilité est quelque peu problématique. Réaliser une E.I.E n'est pas une sinécure et les agriculteurs modernes à eux seuls ne peuvent pas le faire, encore moins nos braves paysans. A moins que les autorités ne prennent des mesures particulières, on ne voit pas trop comment la mise en oeuvre de cette disposition peut se réaliser. La même logique d'extension n'a pas épargné la N.I.E. 2/ Le domaine de la N.I.E Le décret sur les études et N.I.E définit la N.I.E comme une E.I.E simplifiées mais répondant tout de même aux mêmes préoccupations que l'E.I.E et comportant des indications sérieuses de nature à permettre une appréciation globale des incidences environnementales d'un projet ou programme de développement. Les ouvrages et activités soumis à la N.I.E sont rangés dans la catégorie B et également par secteur d'activités comme c'est le cas pour l'E.I.E. La caractéristique commune aux activités assujetties à la N.I.E est qu'elles ont un effet plus ou moins limité sur l'environnement. Parmi ces activités, une seule figure dans la rubrique « justice » à savoir la construction de centres pénitenciers et est exclusivement soumise à une N.I.E. A titre de droit comparé, en France, c'est le décret d'application de la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature intervenue le 12 octobre 1977 qui a institué le mécanisme des notices d'impact. Celles-ci n'étant absolument pas prévues par la loi susvisée, leur institution a été controversée et le dernier mot est revenu au juge administratif qui a admis leur légalité. Si dans l'ensemble, le décret ratisse large dans la détermination des ouvrages ou activités soumis à étude ou à N.I.E, il est à noter que cette couverture est tout de même relative. * 60 KAMTO M, Droit de l'environnement en Afrique, op. cit., P. 96. * 61 Il consiste à soumettre à l'E.I.E les ouvrages ou activités qui ont un impact important ou significatif sur l'environnement et à procéder à une étude sur la nécessité de l'E.I.E en cas de doute. * 62 Ce système permet, à partir d'une liste, de déterminer les ouvrages ou activités assujettis ou non à E.I.E selon que la liste est positive ou négative. * 63 Le système mixte consiste, à partir d'une liste de travaux ou d'ouvrages, à soumettre ou au contraire à exonérer certains de l'E.I.E en fonction de l'existence ou non d'effets sur l'environnement. |
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