Réflexions sur la problématique du coup d'état en Afrique.( Télécharger le fichier original )par Koffi Afandi KOUMASSI Université de Lomé - Master 2 en Droit Public Fondamental 2015 |
2-) La réaction à l'incapacité du gouvernementCertaines immixtions des hommes en kaki en politique se justifient par l'argument de se poser en remède à l'incapacité des gouvernants. Dans un contexte d'insécurité et d'instabilité du pays, de délabrement du tissu social, de désillusion économique, de pauvreté extrême de la population, les citoyens « délaissent parfois les procédures pacifiques de protestation pour recourir à des techniques extralégales »124(*). Les manifestations réclamant à cor et à cri une certaine amélioration du niveau de vie sont du moins vaines sinon réprimées grâce à l'appui de l'armée par des dirigeants enfermés dans une gestion patrimonialiste des richesses nationales. Mais ceux-ci se trahissent en croyant trouver dans l'armée un quelconque salut pour leurs entreprises personnelles. Car A. Zolberg a écrit que, « paradoxalement, les leaders recourent à la force quand le pouvoir et la légitimité ont échoué ; mais l'utilisation de la coercition dans le but d'asseoir l'autorité des leaders soulève à nouveau le problème de leur légitimité dans l'esprit de ceux à qui cette mission est confiée »125(*). C'est pourquoi convaincus de leurs capacités à pallier les insuffisances des gouvernants, les militaires décident de prendre le pouvoir. L'armée, en tant que conscience de la nation, intervient dans cette situation de crise d'État pour chasser l'ancienne classe dirigeante afin de soulager les souffrances de la population. Par ailleurs, l'existence de tensions ethniques, de troubles internes ou de menaces externes susceptibles de provoquer la désintégration de la nation est souvent évoquée à l'appui de certains coups de force. C'est le cas du coup d'État du 22 mars 2012 au Mali. Pour le Capitaine Amadou Sanogo, chef du Comité National de Redressement de la Démocratie et pour la Restauration de l'État de Droit (C.N.R.D.R.E.D), la junte putschiste, le renversement du président A.T. Touré a pour objet « de mettre un terme à un régime incompétent et incapable à gérer la crise au Nord du Mali et à lutter contre le terrorisme ». Dans ce canevas, les coups d'État sont des mécanismes de régulation politique face à des rouages institutionnels défaillants. Ils constituent une réponse militaire à une crise de gouvernance sur fonds de crise politique, économique et sociale. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, l'intrusion de l'armée dans l'univers politique recèle bien de réalités néfastes (B). * 124 M.-L. MARTIN, La militarisation des systèmes politiques en Afrique : 1960-1972, une tentative d'explication, op.cit., p. 73. * 125 Cité par M.-L. MARTIN, id., p. 75. |
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