3.2 Modalités d'action des compétences
politiques
L'étude menée par Perrewé et al. (2004) a
été la première à décrire
concrètement le rôle modérateur des compétences
politiques dans la relation entre une demande psychologique inhérente au
cadre professionnel et la tension perçue, et a servi de base à
des études postérieures visant à décrire plus
précisément cette relation. Deux modes d'action principaux
(Ferris et al., 2005; Treadway et al., 2005) ont ainsi été
avancés.
Premièrement, la perception des facteurs de tension
présents dans l'environnement des sujets peut être
différente selon leur niveau de compétences politiques.
Utilisées comme stratégies de « coping », les
compétences politiques du sujet influencent la perception de
l'intensité des demandes psychologiques qui constituent les menaces de
son cadre professionnel et la latitude dont il dispose pour y répondre.
Les compétences politiques sont dans ce cas de figure des ressources
propres du sujet qu'il utilise comme modérateurs du stress perçu,
soit prioritairement soit en seconde intention une fois leurs ressources
principales épuisées. Kahn, Wolfe, Quinn, Snoek et Rosenthal
(1964) montrent ainsi l'effet de modération par les compétences
politiques de la relation entre conflit de rôle et burnout. Cette
étude est corroborée par les résultats de Perrewé
et al. (2004) qui mesurent l'anxiété psychologique et somatique,
ou encore par Jawahar, Stone et Kisamore (2007) qui mesurent l'effet
modérateur des compétences politiques sur la réduction du
niveau d'accomplissement personnel perçu. L'effet de modération
par les compétences politiques a également été
observé sur les relations entre la surcharge de rôle et la tension
au travail, la satisfaction au travail et l'anxiété
(Perrewé et al., 2005). Meurs, Gallagher et Perrewé (2010) ont
étudié quant à eux la relation entre un conflit
interpersonnel impliquant le salarié et son supérieur
hiérarchique et l'épuisement émotionnel du salarié
consécutif, pour faire ressortir un effet de modération
significatif par le niveau de compétences politiques du sujet.
La seconde modalité d'action des compétences
politiques sur le stress est indirecte. Outre leur effet significatif sur la
perception des facteurs de stress au moment même où le sujet y est
confronté, ce type de compétence, en tant que levier de
mobilisation d'autres ressources, a également un effet à plus
long terme pour faire face aux éléments anxiogènes. En
permettant la
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mobilisation de nouvelles ressources d'adaptation sociale et
interindividuelle, les compétences politiques compensent la perte de
ressources causée par les facteurs de stress de l'environnement. Le
sujet a en effet les moyens d'y faire face plus efficacement grâce
à un réseau relationnel élargit, un potentiel soutien
social plus important, et une capacité d'influencer les comportements
d'autrui dans son propre intérêt. Zinko (2013) indique notamment
dans l'une de ses recherches que le niveau de compétences politiques est
positivement corrélé à la bonne réputation des
individus au sein de l'organisation, qui permet en retour de limiter la tension
perçue dans l'environnement professionnel.
En conclusion, les compétences politiques sont bien non
seulement une ressource personnelle, mais également un moyen
d'accès indirect à d'autres ressources lorsque le sujet doit
faire face à une situation menaçante. Or on sait les ressources
rares dans l'arène politique que représente toute organisation,
d'où l'importance pour le sujet de préserver les siennes et les
développer continuellement en s'appuyant sur son réseau
interpersonnel. On peut de fait se demander si la mobilisation de telles
ressources grâce à un niveau de compétences politiques
élevé diffère selon le type de contexte professionnel dans
lequel évolue le sujet. On pourrait en effet imaginer que selon le
niveau d'interdépendance des tâches et le niveau d'exigences
sociales inhérent au métier exercé, le besoin de s'appuyer
sur un réseau interpersonnel soit plus ou moins saillant, et affecte
différemment la gestion des facteurs de stress consécutifs.
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