CONCLUSION
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La mise en scène de la sexualité dans les spots
publicitaires alimentaires : du côté de la réception -
Villien Perrine
On constate un transfert ou un lien direct entre le plaisir
sexuel et le plaisir alimentaire. La publicité met en scène la
sexualité de manière à faire coïncider le plaisir que
peut procurer une bouteille de Perrier avec le plaisir que peut éprouver
un couple lors d'un acte sexuel. On voit également une complicité
suggérée entre le consommateur et le produit via la connivence
qui s'exerce entre la femme et l'homme matérialisé par la
bouteille.
Le Perrier est donc aussi fou, dans sa capacité à
fournir du plaisir, qu'un rapport sexuel entre deux êtres, ou que la
masturbation de l'homme par la femme.
La mise en scène de la sexualité dans les spots
publicitaires alimentaires : du côté de la réception -
Villien Perrine
Caprice des Dieux : Le
téléphérique 1986, France Produit par l'agence
BDDP Scénario de Patrice Leconte Format vidéo (spot
publicitaire)
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La mise en scène de la sexualité dans les spots
publicitaires alimentaires : du côté de la réception -
Villien Perrine
CAPRICE DES DIEUX 1986
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A PROPOS
Caprice des Dieux conçu par Jean-Noël Bongrain qui
se lance dans sa production le 21 juin 1956 après cinq ans de
réflexion sur le produit.
« Caprice » signifie « désir soudain et
irréfléchi » ou encore « envie subite et
passagère »., d'après le dictionnaire Larousse.
Vendu dans plus de cent cinquante pays à plus de deux
milliards d'exemplaires depuis sa création.
Une innovation dans le paysage du fromage, grâce
à l'originalité de sa boite, en forme de calisson, un ovale qui
se démarque des autres fromages, et fait notamment concurrence au
Coulommiers Président.
En terme de publicité : 1963, sur RTL et Europe 1 avec
le slogan « un amour de fromage ». 1968, sur le poste, diffusé
sur les chaînes de l'ORTF : « un amour de fromage, léger
comme la brise, naturel, frais comme la rosée, doux comme un ciel de
printemps, crémeux et fondant » 1976 « on peut toujours
compter sur un caprice ». 1978 « les amoureux qui vivent d'amour et
d'eau fraîche ». Puis suit, depuis 1985, la fameuse série des
pubs de Patrice Leconte « on se fait un petit caprice ? » mettant en
scène une femme qui propose, sur le ton de la tentation, un caprice
à un homme et ce, quel que soit le lieu. En 2004, la marque fête
son cinquantième anniversaire et joue sur la révolte des dieux
« Caprice des Dieux : un des derniers moments de pure gourmandise,
ça se respecte ! ».
STYLISTIQUE
- Les couleurs sont assez froides, hormis l'extérieur
de la cabine qui est rouge. On est dans un décor montagnard, en hiver,
recouvert de neige.
- La couleur dominante est donc le blanc qui uniformise le
tout.
- Les personnages, à l'intérieur de la cabine se
fondent au décor, dans la mesure où leur combinaison est blanche,
et qu'ils ont également les lèvres blanches typiques des skieurs
qui se mettent du stick à lèvres pour que celles-ci ne gercent
pas avec le froid. Toutefois, on constate deux personnages qui se
démarquent du décor, car habillés de vêtements
colorés. L'accent est donc mis sur eux et permet aux spectateurs,
dès le début du spot, de s'y focaliser.
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La mise en scène de la sexualité dans les spots
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Villien Perrine
- Plus spécifiquement : un homme, une femme, mis en
évidence, et une poignée de moniteurs que l'on peut assimiler au
décor, de second plan, des rôles de figurants en quelque sorte.
Ils seraient là pour justifier le spot « Caprice à deux.
»
- Pour les plans et les vues : on a d'abord une vue d'ensemble
: le téléphérique rouge qui monte dans un paysage
blanc.
- S'ensuit une vue de l'intérieur de la cabine qui
permet d'identifier le contenu de celle-ci. La femme est d'abord mise en
valeur, avant l'homme. On voit ensuite un jeu sur les deux personnages avec des
va-et-vient entre le visage de l'homme et celui de la femme lorsqu'ils
échangent deux trois mots (proposition de la part de la femme de se
faire un caprice). Ces gros plans sur visages permettent aux consommateurs, et
néanmoins spectateurs, de saisir les émotions des deux acteurs
(étonnement, joie ...)
- La décision de l'homme se concrétise par
l'éviction inattendue des moniteurs hors de la cabine (tout le monde
descend).
- La caméra joue à nouveau entre le couple
resté dans la cabine et la collectivité larguée, ce qui
renforce la mise en valeur de sa différence et l'isole davantage, le
plaçant dans les meilleures conditions pour partager le fromage.
- C'est sur une vue plus éloignée que continue
la pub ; on voit les deux corps côté à côte,
rapprochés, et dans une position propice au caprice.
- La pub se termine par l'échange de fromage, avec,
à nouveau, des gros plans sur les visages et le regard aguicheur de la
femme mis en évidence, à la fin notamment, lorsqu'elle tend du
fromage à son partenaire avant de le mettre dans sa bouche.
- C'est une pub assez épurée dans l'ensemble ;
il n'y a pas trop d'informations données en même temps, les
personnages restent sympathiques et attachants.
- Il y a également un échange verbal, la femme
vient proposer un caprice, sur le ton de la tentation, à l'homme qui lui
répond.
- La musique en fond rythme le spot et donne l'impression d'un
balancement auditif que l'on pourrait apparenter au balancement de la cabine,
et à la dualité genrée du spot : un homme, une femme,
balancement renforcé par les jeux de caméra de l'un à
l'autre.
THEMATIQUE
- On retrouve des symboles forts notamment dans le choix du
paysage : la montagne, le ski, un sport d'hiver qui n'est pas donné
à tout le monde, mais plus à une clientèle
aisée.
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Villien Perrine
- Les lèvres blanches, les moniteurs bronzés
marquent cette volonté de se démarquer, de séduire, on
peut y voir un peu de frime de la part de la gente masculine.
- La femme est représentée comme la
séductrice, c'est elle qui vient chercher l'homme pour partager son
fromage. Elle l'aborde sur le ton de la tentation. Si l'on évoque la
référence biblique, on peut assimiler le Caprice des Dieux, le
fromage, au fruit de la tentation, la pomme du jardin d'Eden.
- La singularisation de l'homme pourrait se justifier comme la
volonté, pour la femme, d'accéder à la perfection, de
chercher la perle rare, l'idéal masculin, l'unique, d'où le fait
qu'il soit habillé différemment des autres moniteurs.
- L'homme est bronzé, il sourit, il a les yeux qui
pétillent, il est conquis par la femme séductrice, la femme
quelque peu aguicheuse.
- On peut également souligner le cliché de
l'homme qui ne se fait pas prier, attiré par le sexe, jusqu'à en
négliger la collectivité. On le voit au travers de «
Terminus, tout le monde descend !». On lui propose d'assouvir ses
désirs, inutile de le supplier, il agit spontanément sous le coup
de la pulsion en éjectant les moniteurs hors de la cabine, qui se
retrouvent plantés comme des piquets dans la poudreuse ! Le fait de
faire chuter si brutalement le reste de la cabine permet d'illustrer la
tendance de l'homme à agir selon ses pulsions dès qu'une femme
est en jeu.
- D'autres signes de l'aguicheuse apparaissent très
clairement : la femme nourrit l'homme, son regard est baissé sur ses
lèvres, elle cherche sa complicité, ouvre la bouche, et nargue
l'homme en feignant de lui mettre du fromage dans la bouche avant de le mettre
dans la sienne, sans le quitter des yeux. Il y a dans cette dernière
scène un plaisir assez personnel et sadique de la part de la femme.
- Les Dieux vivent au-dessus de nous, là ? où il
y a le paradis. Manger du Caprice des Dieux serait donc le moyen de vivre le
paradis sur terre.
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