Facteurs politico-légaux
Les pouvoirs publics français ont mis en place en 1953
des droits de mouture qui déterminent une capacité
d'écrasement. Ils sont cessibles et se vendent sur un marché qui
leur est dédié. Au préalable, un agrément doit
être demandé au ministère de l'agriculture par les deux
moulins intéressés. Chaque transaction entrainera des droits
d'enregistrement collectés par l'Etat.
Depuis fin 2014, la teneur en sel des baguettes a
été réduite. C'est la conséquence de l'accord
signé entre le gouvernement et la confédération nationale
de la boulangerie française. Aujourd'hui pour 1kg de farine, le
boulanger ne mettra plus que 18 g de sel contre 20g par le passé.
Depuis le 21 mars 2016, de nouvelles règles
d'étiquetage ont été décidées par la DGCCRF.
Une distinction est faite entre les produits pré-emballés et les
produits non pré-emballés et selon le cas des indications
spécifiques doivent apparaitre sur les étiquettes. La nouvelle
règle concerne la déclaration nutritionnelle. Il est devenu
obligatoire de noter les informations nutritionnelles, à savoir : la
valeur énergétique et les quantités de graisse, d'acides
gras saturés, de glucides, de sucres, de protéines et de sel,
pour 100 g ou 100 ml, ou encore par portion si celle-ci est clairement
identifiée.
Facteurs économiques
Le marché de la meunerie française pèse
près de 4 millions de tonnes de farines destinées au
marché intérieur, dont 37 % pour les artisans boulangers et 28 %
pour les industries alimentaires (voir annexe 1). On compte
plus de 400 moulins en France, mais 45 % d'entre eux ont une capacité
d'écrasement inférieure à 1 000 tonnes et ne produisent
que 20 % de la farine nationale. Le marché est essentiellement tenu par
quatre grandes entreprises nationales1 (55%) et douze entreprises
multirégionales2 (25 %).
1 Nutrixo, Soufflet, Grands Moulins de Strasbourg et
Axiane
2 Dijon céréales, Terrena, Groupe
Nicot...
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Le chiffre d'affaires du secteur de la meunerie est en
légère croissance depuis 4 ans et avoisine en 2015 les 2
milliards d'euros. C'est un marché mature, les volumes consommés
et produits sont très stables.
Les cours du blé est un facteur important dans
l'économie meunière : celui-ci est bien plus bas en 2016 (140
€/t) qu'en 2015 (169 €/t). Cela signifie que les achats de
matières premières seront moins couteux et que les ventes de
farines seront plus rentables. En effet, le meunier possède une fonction
d'amortisseur : il encaisse les fluctuations des cours du blé et
maintien des prix de vente stables. Ainsi c'est la marge du meunier qui est
impactée et non l'artisan boulanger.
L'activité boulangère concerne directement le
secteur de la meunerie : on compte environ 32 000 boulangeries en France et ce
chiffre est stable depuis 2006. Le Chiffre d'affaires est d'environ 11
milliards d'euros annuels générés par la vente de plus de
6 milliards de baguettes (source INSEE). Ce marché se porte bien et les
évolutions sociales lui offre de nombreuses opportunités de
développement.
Facteurs sociaux-culturels
Les tendances alimentaires changent
régulièrement, mais depuis plusieurs années, deux
principales tendances émergent et perdurent, il s'agit du BIO et du Sans
Gluten.
L'alimentation Biologique est liée au
soulèvement écologique très présent au
21ème siècle. Le consommateur souhaite consommer des
produits éco-responsables et surtout sains, sans OGM ou ajout de
pesticides. En 2015, le marché du bio pesait 5,5 milliards d'€,
soit une progression de 10 % par rapport à 2014. Tous les secteurs
alimentaires sont touchés et de nombreuses marques jouent le jeu en
lançant une gamme BIO. La meunerie n'est pas épargnées et
nombreux sont ceux qui proposent des farines et des mix BIO à
destination des artisans boulangers mais également de la grande
distribution.
Le régime sans gluten était initialement
destiné aux personnes atteintes de la maladie coeliaque qui se
caractérise par une intolérance du gluten. Le corps
développe des anticorps contre les molécules de gluten qui est
alors perçu comme une menace pour le corps humain. Moins d'1% de la
population est touché par cette maladie, alors pourquoi ce régime
fait fureur ?
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Il faut savoir que 10 % de la population sont «
intolérants » au gluten, c'est-à-dire qu'ils digèrent
mal ces molécules qui forment des maux de ventre et des gaz.
Réduire leurs apports en gluten les aides à se sentir mieux.
C'est à partir de cet échantillon de la population qu'a
émergé le régime sans gluten, qui aujourd'hui est
associé à un mode de vie sain. Ainsi des individus ne
possédant aucune contre-indication à la consommation de gluten,
se sont mis à adopter occasionnellement ou définitivement ce
régime alimentaire. Bien évidemment, l'aliment contenant le plus
de gluten est le pain : ce régime impact directement l'activité
de la meunerie.
Autre tendance sociale : le pain souffre de
préjugés. En effet, il serait perçu comme un aliment qui
fait grossir, donc l'ennemi principal des régimes minceurs. Cet apriori
est totalement faux, au contraire, le pain a beaucoup d'atouts : riche en fibre
et en « bons » sucres. Il possède également un indice
glycémique bas ce qui évite l'abondance de
sécrétion d'insuline et donc le stockage graisseux. Mais les
idées reçues ont la vie dure, et cela impacte
inévitablement les meuniers qui se doivent de combattre ces
préjugés en communiquant davantage et en éduquant les
consommateurs.
Tout comme l'alimentation BIO, la lutte contre le gaspillage
alimentaire est une tendance sociale en lien avec l'écologie. Les
consommateurs changent leurs habitudes et privilégient des produits avec
moins d'emballage, ou des formats plus petits afin d'éviter de jeter la
moitié du produit qui périmera. Il est dans
l'intérêt d'un meunier de tenir compte de ces
préoccupations écologiques, de les intégrer dans sa chaine
de production en proposant des produits avec des emballages simples et
adaptés.
Les habitudes des français évoluent, notamment
celles liées aux prises des repas. Si dans les années 80, le
temps consacré au déjeuné était de 1h30,
désormais il est de 22 minutes. Ce constat est à prendre en
considération, car les habitudes alimentaires ont évolué
en conséquent. Si certains emportent des plats « maison »
à réchauffer, beaucoup optent pour une solution snacking à
emporter. Ce marché est en plein essor et cela représente une
sérieuse opportunité pour les boulangers et par extension pour
les meuniers.
A l'inverse, le petit déjeuner est de plus en plus
délaissé. Bien qu'étant un moment clé de
l'équilibre nutritionnel, près d'un tiers des enfants sautent le
petit déjeuner en 2015 contre seulement 16 % en 2010 (source
Crédoc). De plus, s'il était classiquement composé d'une
tartine et d'un café, le pain traditionnel a fait place à la
biscotte et un produit laitier s'ajoute à la
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composition classique du petit déjeuner. Ce constat est
un manque a gagné pour la boulangerie artisanale et donc pour son
fournisseur.
Parmi les changements d'habitude, on constate que les
consommateurs de pain achètent de plus en plus fréquemment leur
baguette dans les supermarchés au moment de faire leurs courses. Ce
phénomène est dû à la recherche perpétuelle
d'un gain de temps. Si jusqu'alors, le pain de grandes surfaces était de
qualité médiocre, celle-ci s'est considérablement
améliorée durant la dernière décennie.
Facteurs Technologiques
L'augmentation de la consommation de pain en grandes surfaces
est liée au développement de laboratoires3 qui cuisent
les baguettes sur place et proposent une large gamme de produits. Lidl a
été le précurseur en la matière et a fait de ce
pain une réelle plus-value par rapport à ses concurrents. Bien
qu'on retrouvait déjà des baguettes dans les supermarchés,
rares étaient les pains encore chauds et à l'allure
appétissante. Bien que la technologie n'ait pas énormément
évoluée, c'est son usage qui a été modifié :
des fournées sont aujourd'hui programmées tout au long de la
journée pour offrir au consommateur un pain frais encore
tiède.
Il y a 2 ans au concours Lépine, un boulanger mosellan
a remporté le premier prix grâce à son distributeur
automatique de baguettes (voir annexe 2). Depuis, cette
machine envahie la France entière et connais un succès certain.
Cette nouvelle machine propose du pain frais et chaud 24/24h. Si le village
dans lequel elle est installée, ne possède pas de boulangerie,
cette solution est idéale et permet au boulanger qui l'alimente de
vendre son pain sans mettre en place une tournée spéciale. Par
contre, si cette machine vient s'implanter dans la zone de chalandise des
boulangeries voisines, elle peut être perçue comme une menace et
la cause d'une baisse du chiffre d'affaires. En outre, les clients
apprécient cette innovation, bien que certains la trouve impersonnelle
et préfèrent le contact avec leur artisan.
Facteurs Ecologiques
L'AFNOR a mis en place la norme ISO 26000 ayant pour but de
définir la responsabilité sociétale des Entreprises
autrement dit, « la maitrise des impacts de ses décisions et
activités
3 Un laboratoire est le terme employé pour
désigner les fournils implantés au sein des grandes surfaces.
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sur la société et sur l'environnement prenant en
compte le développement durable, la santé et le bien-être
de la société ». Cette norme est l'une des rares à ne
pas présenter de certification, elle se veut davantage comme un guide
des bonnes pratiques à tenir pour respecter l'environnement.
La loi du 17 août 2015 concernant la transition
énergétique pour une croissance verte, a pour but de renforcer
l'indépendance énergétique de la France et de
réduire les émissions de gaz à effets de serre. On y
retrouve notamment des indications sur le traitement des déchets
appelée économie circulaire. Les principaux objectifs sont :
? Éviter le gaspillage de ressources et
d'énergies ? Diminuer les impacts environnementaux
? Limiter la production de déchets non
réutilisés
Les accords et les engagements en matière
d'environnement sont multiples et les pays du monde entier se sentent
concernés par l'avenir de la planète. La France est un bon
élève mais pas le meilleur : selon le cabinet d'analyse
américain Dual Citizen LLC, le pays le plus « verts »
est la Suède, la France n'arrive qu'à la 13ème place.