I.2 CONTROVERSES THEORIQUES ET STRATEGIQUES DE POLITIQUE
MONETAIRE (DOUZOUNET M., 2009)
Nous présentons d'une part dans ce point une revue de
la littérature recensant les controverses théoriques sur
l'efficacité de la politique monétaire en matière de
croissance ; et d'autre part les stratégies de la politique
monétaire pratiquée par la BCC.
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I.2.1 Politique monétaire et croissance
économique : une revue de la littérature
Sur le plan théorique, la question du rôle de la
politique monétaire et plus généralement des unions
monétaires en matière de croissance continue de soulever
d'importants débats opposants les sceptiques aux optimistes.
I.2.1.1 La thèse des sceptiques en faveur d'une
relation limitée
La thèse de sceptiques est très ancienne,
principalement partagée par les monétaristes MILTON FRIEDMAN et
par quelques économistes comme William POOLE. Ce dernier à
l'occasion de 43è congrès de l'Association Nationale
Américaine des Economistes d'Entreprises en septembre 2001 sur le
thème « Relance de la croissance économique : Que peut faire
et que ne peut pas faire la politique monétaire? » avait repris le
discours prononcé par MILTON FRIEDMAN, que le seul but de la politique
monétaire est de veiller à la stabilité des prix, en
évitant toute action contra-cyclique sur le marché, susceptible
de perturber ces derniers, tant l'incertitude pèse sur le délais
d'action de la politique.
POOLE reprend ce point de vue à son compte, en
rappelant que selon FRIEDMAN, la politique monétaire n'affecte que les
variables nominales telles que les taux d'intérêts nominaux ou le
niveau des prix. Les effets d'impacts sur les niveaux ou les taux de croissance
de ces variables. En conséquence, la BC ne peut espérer
être efficace en recherchant pour cible, la valeur d'une quelconque
variable réelle, car les effets d'impact sur les variables
réelles comme le PIB ou le taux de chômage, sont par nature
transitoire et très aléatoires.
Précisant son point de vue personnel, POOLE conclut
qu'en effet, même s'il est possible d'entamer une action de correction
des fluctuations cyclique d'activité. Il convient qu'une telle action ne
vienne pas compromettre l'objectif des stabilités des prix, que seule la
BC est à mesure de réaliser. C'est pourquoi la prudence exige de
ne pas définir des objectifs de croissance ou de chômage, car non
seulement on ne fait rien de ce que serait le taux de croissance
d'équilibre de longue période, mais on ne sait rien non plus du
taux de chômage compatible avec l'équilibre du marché de
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travail à long terme. Donc une action de relance par la
monnaie, risque de conduire à une épouvantable erreur de
politique économique.
Daniel THORNTON, un des principaux responsables de la Reserve
Fédérale dans l'Etat de Saint-Louis, se pose aussi la question si
la politique monétaire est-elle encore efficace. Pour le cas
Américain, l'auteur répond par la négative à cette
question, lorsque du moins il considère les périodes de
récession. Il remarque que la Reserve Fédérale a
réduit le niveau du taux effectif sur les fonds. C'est-à-dire
qu'au cours du dernière période, la réserve
fédérale a même anticipé la récession en
réduisant le taux effectif sur les fonds fédéraux qui
constitue son principal instrument de politique monétaire, bien avant
que l'activité ne parvienne au sommet du cycle conjoncturel. Pourtant,
la réponse de l'économiste Américain ajoute TRORNTON,
apparait pour le moins Américain en dépit d'une théorie
aussi bien en ce qui concerne la récession que pour la récession
actuelle, en comparaison avec la réponse de l'économie lors des
récessions observées avant la 2è Guerre Mondiale, aux
variations des instruments de la politique monétaire.
Comment dans ces conditions expliquer la faiblesse des effets
de la politique monétaire sur l'activité réelle ?
Plusieurs explications sont envisageables, mais nous retenons celle qui nous
semble accessible et compréhensible pour tout lecteur. L'explication
donnée est relative à l'asymétrie entre la réponse
de l'économie à des augmentations de taux d'intérêt
et celle qu'elle enregistre suite à des baisses de taux
d'intérêt.
En effet, à court terme, la politique monétaire
affecte l'activité réelle via son effet sur le prix, or si la
rigidité des prix est plus forte lorsqu'ils baissent que lorsqu'ils
augmentent, les effets du resserrement monétaire vont se refléter
davantage sur l'activité que sur les prix, et ce par opposition aux
effets d'une politique monétaire expansive. Cette asymétrie
d'ajustement des prix étant notamment à relier à
l'impossibilité pour les firmes privées de diminuer les salaires,
lorsque notamment les contrats de travail comportent des clauses
d'indexation.
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La faiblesse de la réponse de l'économie aux
variations à la baisse de taux d'intérêt ne provient-elle
pas tout simplement de ce que la croissance constitue un
phénomène réel, par opposition à l'inflation qui
serait un phénomène monétaire.
SIDRAUSKI(1967) prend quant à lui la position
diamétralement opposée aux travaux de TOBIN, il suppose que la
monnaie entre dans la composition de la fonction d'utilité des
ménages car elle fournit un flux de services issus de sa
détention. Les résultats conduisent à déterminer la
super neutralité de la monnaie. La monnaie dans ce cas n'aurait aucun
effet ni à court terme, ni à long terme car elle ne serait pas
susceptible de jouer sur le niveau et l'évolution du PIB.
Ces analyses sceptiques du rôle de la politique
monétaire en matière de croissance n'est pas du point de vue de
tous les théoriciens. Ce qui convient de présenter la
thèse des optimistes en faveur d'une relation avérée.
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