Paragraphe II : Méthode de collecte et traitement
des données
La présente étude utilise des données
secondaires. Toutes les données sont issues de la base de données
World Development Indicators (WDI) 2013 de la BM, excepté celles sur le
capital humain qui sont issues des statistiques du Ministère des
Enseignements Secondaire et Supérieure (MESS) du Burkina Faso. Les
données couvrent la période 1990-2012, soit 23 ans.
Dans le souci d'une bonne régression, il est
nécessaire de prendre certaines précautions. Pour ce faire nous
allons effectuer successivement un certain nombre de tests statistiques tout en
apportant les correctifs nécessaires afin de parvenir à
l'estimation des coefficients du modèle retenu. De ce modèle, des
tests post-estimation seront aussi effectués afin de certifier sa
validité.
+ Tests pré-estimation
V' Test de stationnarité des variables
Les séries macroéconomiques sont en
général non stationnaires. Il convient donc de les rendre
stationnaires avant l'estimation des coefficients du modèle par la
méthode des moindres carrés ordinaires (MCO) qui ne s'applique
qu'aux séries stationnaires. Une série chronologique est
stationnaire si elle est la réalisation d'un processus stationnaire.
Ceci implique que la série ne comporte ni tendance, ni
saisonnalité et plus généralement, aucun facteur
évoluant avec le temps. Autrement dit, un processus stochastique Xt est
stationnaire si :
-E(Xt)=E(Xt+h)=u ? t et ? h, c'est-à-dire la moyenne
est constante et indépendante du temps ;
-La variance est finie et indépendante du temps ;
-La fonction d'autocovariance cov(Xt,Xt+h) est
indépendante du temps.

43
Parmi les tests de détection de racine unitaire, on
distingue essentiellement celui de Dickey et Fuller et celui de Phillips et
Perron. Nous allons utiliser ici le test de Dickey et Fuller augmenté
(ADF) pour prendre en compte l'hypothèse d'autocorrélation des
erreurs.
Les hypothèses, nulle et alternative se présentent
comme suit :
H0 : le processus est non stationnaire (présence de racine
unitaire) H1 : le processus est stationnaire
La règle de décision consiste à comparer
la valeur ADF à celle critique (CV). Si ADF<CV, on accepte
l'hypothèse de stationnarité de la série. On peut aussi
lire tout simplement la valeur de la probabilité (prob) correspondante
et effectuer une comparaison avec un seuil donné (1%, 5% ou 10%). Dans
ce cas, si prob<5%, on accepte l'hypothèse de
stationnarité.
Le tableau suivant résume les résultats du test
de stationnarité : les résultats obtenus sur EVIEWS sont, quant
à eux, présentés en annexe 2.
Tableau 6 : Résumé des tests de
stationnarité
Variables (en log)
|
test en niveau
|
Test en différence première
|
PIB
|
Non stationnaire
|
Stationnaire
|
Capital physique
|
Non stationnaire
|
Stationnaire
|
Capital humain
|
Non stationnaire
|
Stationnaire
|
Ouverture commerciale
|
Non stationnaire
|
Stationnaire
|
Investissement étranger
|
Stationnaire
|
Stationnaire
|
Population active
|
Stationnaire
|
Stationnaire
|
Source : nos estimations à partir de EVIEWS 8.
Il ressort du tableau que les variables du modèle n'ont
pas le même ordre d'intégration. Seuls l'investissement direct
étranger et la population active sont stationnaires à niveau.
Nous allons donc tester la cointégration à l'aide de la technique
de Johansen (1988).

44
V' Test de cointégration
L'existence d'une relation de long terme entre des variables
individuellement non stationnaire est à la base de la théorie de
la cointégration. Cette théorie permet d'étudier des
séries non stationnaires mais dont une combinaison linéaire est
stationnaire. Le but de ce test est donc de détecter si les variables
possédant une racine unitaire ont une tendance stochastique commune.
Soient les hypothèses suivantes :
H0 : absence de cointégration
H1 : présence de vecteur cointégrant
La règle de décision consiste à comparer
le ratio de vraisemblance à la valeur critique (CV). Si le ratio de
vraisemblance est supérieur à la valeur critique, on accepte
l'hypothèse de cointégration ; sinon on la rejette. On peut aussi
comparer la probabilité correspondante (prob) au seuil retenu (1%, 5% ou
10%). Dans ce cas si prob<5%, on accepte l'hypothèse de
cointégration, sinon on la rejette. Sur EVIEWS, on dispose de plusieurs
options. L'hypothèse de cointégration est admise si le test est
concluant pour au moins une des options.
Tableau 7 : Test de cointégration
Unrestricted Cointegration Rank Test (Trace)
|
|
Hypothesized Trace 0.05
No. of CE(s) Eigenvalue Statistic Critical Value
|
Prob.**
|
None * 0.587831 44.64499 40.17493
|
0.0166
|
At most 1 * 0.486594 26.03225 24.27596
|
0.0298
|
At most 2 0.417551 12.03179 12.32090
|
0.0559
|
At most 3 0.031909 0.681020 4.129906
|
0.4688
|
Trace test indicates 2 cointegrating eqn(s) at the 0.05 level
|
|
* denotes rejection of the hypothesis at the 0.05 level
|
|
**MacKinnon-Haug-Michelis (1999) p-values
|
|
Source : estimation de l'auteur sur EVIEWS 8
Le tableau montre que le rang de cointégration vaut
deux (2) au seuil de 5%. On accepte donc l'hypothèse de
cointégration des quatre variables non stationnaires à niveau.
Une fois la stationnarité et la cointégration admises, nous
pouvons passer à l'estimation des coefficients du modèle.
v Estimation des coefficients du modèle : modèle
à correction d'erreur31
Plusieurs méthodes d'estimation d'un modèle
à correction d'erreur sont proposées dans la littérature.
Il s'agit notamment de la méthode en deux (2) étapes d'Engle et
Granger (1987) et celle en une seule étape de Hendry (1995). La
procédure en deux étapes, bien que la plus utilisée dans
les études empiriques, présente un certain nombre de
défauts parmi lesquels figure, la non prise en compte dans l'estimation
de l'équation de long terme, de l'information potentielle contenue dans
la dynamique de court terme. En tenant compte du niveau d'intégration
des variables, le modèle à correction d'erreur à la Hendry
se présente comme suit :
D(lnyt)= á0 +
á1D(lnkt) + á2D(lnht) +
á3D(lnOuvt) + á4lnIdet +
á5lnPopt + á6lnyt-1
+ á7lnkt-1 +
á8lnht-1 +
á9lnOuvt-1 + et
D(xt)= xt-xt-1 est l'opérateur de
différence première. Les coefficients á1,
á2, et á3 représentent
les élasticités de court terme. Les élasticités de
long terme sont données par : á4,
á5,
-á7/á6
;-á8/á6
;-á9/á6.
á6 est le coefficient de correction
d'erreur. Il doit être négatif, inférieur à
l'unité en valeur absolue et significatif. Il indique la vitesse
d'ajustement de la variable PIB réel pour retourner à
l'équilibre de long terme suite à un choc.
Le tableau suivant résume les résultats de
l'estimation des coefficients du modèle à
correction d'erreur.

45
31 Les séries non stationnaires étant
cointégrées, il convient d'effectuer une représentation
à correction d'erreur. En cas de non cointégration, la
représentation devrait s'écrire sous forme vectorielle
autorégressive (VAR) en différence première.

46
Tableau 8 : Estimation du modèle à
correction d'erreur
Variable
|
Coefficient
|
Std. Error t-Statistic
|
Prob.
|
C
|
-10.57497
|
3.759823 -2.812624
|
0.0157
|
D(LNH)
|
-0.238811
|
0.134145 -1.780242
|
0.1003
|
LNIDE
|
-0.007278
|
0.004874 -1.493214
|
0.1612
|
D(LNK)
|
0.092898
|
0.049909 1.861360
|
0.0874
|
D(LNOUV)
|
-0.024071
|
0.052432 -0.459090
|
0.6544
|
LNPOP_ACT
|
1.486770
|
0.457561 3.249339
|
0.0070
|
LNY(-1)
|
-0.596670
|
0.197054 -3.027948
|
0.0105
|
LNH(-1)
|
-0.268119
|
0.146661 -1.828154
|
0.0925
|
LNK(-1)
|
0.053259
|
0.053378 0.997767
|
0.3381
|
LNOUV(-1)
|
0.139614
|
0.053961 2.587308
|
0.0238
|
R-squared
|
0.748676
|
Mean dependent var
|
0.055865
|
Adjusted R-squared
|
0.560182
|
S.D. dependent var
|
0.026587
|
S.E. of regression
|
0.017632
|
Akaike info criterion
|
-4.935200
|
Sum squared resid
|
0.003731
|
Schwarz criterion
|
-4.439272
|
Log likelihood
|
64.28720
|
Hannan-Quinn criter.
|
-4.818375
|
F-statistic
|
3.971894
|
Durbin-Watson stat
|
2.567055
|
Prob(F-statistic)
|
0.014691
|
|
|
Source : nos estimations à partir de EVIEWS 8.
On retient que le modèle a un coefficient de
détermination acceptable (R2 ajusté= 56,02%). Le test
de Fisher indique par ailleurs que les coefficients du modèle à
correction d'erreur sont globalement significatifs (au seuil de 5%)
malgré quelques faibles significativités individuelles que
révèlent les statistiques de Student. Enfin, la force de rappel
vers l'équilibre (á6) est inférieure à
l'unité en valeur absolue et est négative et significative. Le
modèle à correction d'erreur est donc valide. Nous allons par la
suite procéder aux tests post-estimation.
+ Tests post-estimation
V' Test de normalité des erreurs
L'hypothèse de normalité des termes d'erreur
joue un rôle essentiel car elle va préciser la distribution
statistique des estimateurs. C'est donc grâce à cette
hypothèse que l'inférence statistique peut se réaliser.
Elle peut être testée sur les variables du modèle ou sur
les résidus. Nous utiliserons la statistique de Jarque et Bera pour
effectuer ce test sur les résidus.
Soient les hypothèses suivantes :
H0 : °t suit une loi normale N(m,a)
H1 : °t ne suit pas une loi normale N(m,a)
On n'accepte l'hypothèse de normalité au seuil
de 5% que si la statistique de Jarque-Bera est inférieure à 5,99
(ou tout simplement si prob>5%).
Figure 5 : Test de normalité des
erreurs
Series: Residuals Sample 1991 2012 Observations 22
Mean
|
-9.16e-16
|
Median
|
-0.000591
|
Maximum
|
0.023360
|
Minimum
|
-0.022328
|
Std. Dev.
|
0.013329
|
Skewness
|
0.109476
|
Kurtosis
|
2.215229
|
Jarque-Bera
|
0.608489
|
Probability
|
0.737681
|
5 4 3 2 1 0
|
|
|
-0.02 -0.01 0.00 0.01 0.02
|
Source : nos estimations à partir de EVIEWS Les
erreurs sont donc normalement distribuées.
V' Test de stabilité
Ce test vise à vérifier la stabilité des
coefficients du modèle dans le temps, au fin de prévision. On
distingue le test de Chow (1960) et celui de Brown-Durbin-Ewans (1975). Nous
allons effectuer le test Cusum de Brown-Durbin-Ewans qui offre l'avantage
d'étudier la stabilité sans définir à priori une
date de rupture sur les coefficients. Le test Cusum permet de détecter
les instabilités structurelles et le test Cusum carré, les
instabilités ponctuelles et globalement il y'a instabilité si la
courbe coupe le corridor (en rouge).
Figure 6 : Test de stabilité
CUSUM 5% Significance
CUSUM of Squares 5% Significance
01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12
01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12

47
Source : nos estimations à partir de EVIEWS.
Le modèle est donc ponctuellement et structurellement
stable.
V' Test d'autocorrélation des erreurs
Il existe plusieurs tests d'autocorrélation. Les plus
utilisés sont : le test de Durbin-
Watson et celui de Breusch-Godfrey. Nous utiliserons ici le test
de Breusch-Godfrey.
Le test de Durbin-Watson32 est inapproprié
à cause de l'existence de variables décalées dans le
modèle.
Soient les hypothèses suivantes : H0 : Erreurs non
corrélées
H1 : Erreurs corrélées
On accepte l'hypothèse H0 si la valeur de la
probabilité est supérieure à 5%, sinon on la rejette. On
obtient par EVIEWS le tableau suivant :
Tableau 9 : Test d'autocorrélation
Breusch-Godfrey Serial Correlation LM Test:
F-statistic 2.605531 Prob. F(2,10) 0.1228
Obs*R-squared 7.536841 Prob. Chi-Square(2) 0.0231
Source : l'auteur à partir de EVIEWS
Les probabilités ne sont pas toutes supérieures
à 5%. On accepte donc l'hypothèse d'autocorrélation des
erreurs.
Cochrane-Orcutt propose une méthode
d'estimation des paramètres qui doit être utilisée en cas
de corrélation des erreurs. En appliquant ce correctif au modèle
à correction d'erreur, on obtient le tableau suivant :

48
32 Excepté le test du h de Durbin(1971) qui
peut aussi être utilisé.

49
Tableau 10 : Correction de
l'autocorrélation
Variable
|
Coefficient
|
Std. Error t-Statistic
|
Prob.
|
C
|
-12.57727
|
2.827403 -4.448346
|
0.0010
|
D(LNH)
|
-0.223620
|
0.124560 -1.795277
|
0.1001
|
LNIDE
|
-0.005159
|
0.005857 -0.880754
|
0.3973
|
D(LNK)
|
0.093616
|
0.054662 1.712635
|
0.1148
|
D(LNOUV)
|
0.034401
|
0.052241 0.658499
|
0.5238
|
LNPOP_ACT
|
1.419603
|
0.411143 3.452818
|
0.0054
|
LNY(-1)
|
-0.462694
|
0.184591 -2.506586
|
0.0292
|
LNH(-1)
|
-0.405314
|
0.098453 -4.116842
|
0.0017
|
LNK(-1)
|
0.066540
|
0.030609 2.173888
|
0.0524
|
LNOUV(-1)
|
0.194500
|
0.044496 4.371222
|
0.0011
|
MA(1)
|
-0.999974
|
0.240302 -4.161321
|
0.0016
|
R-squared
|
0.885286
|
Mean dependent var
|
0.055865
|
Adjusted R-squared
|
0.781001
|
S.D. dependent var
|
0.026587
|
S.E. of regression
|
0.012442
|
Akaike info criterion
|
-5.628597
|
Sum squared resid
|
0.001703
|
Schwarz criterion
|
-5.083076
|
Log likelihood
|
72.91456
|
Hannan-Quinn criter.
|
-5.500088
|
F-statistic
|
8.489092
|
Durbin-Watson stat
|
2.502637
|
Prob(F-statistic)
|
0.000735
|
|
|
Inverted MA Roots
|
1.00
|
|
|
Source : nos estimations à partir de EVIEWS
Le coefficient associé à la variable MA(1) est
significatif. La correction de l'autocorrélation des erreurs est donc
acceptée. On note au passage une amélioration sensible du
coefficient de détermination ajusté qui passe de 56,02% à
78,1%. Le signe du coefficient de la variable Ouverture à court terme a
été également corrigé.
V' Test d'homocédasticité des erreurs.
Le test d'homocédasticité vise à attester
la constance de la variance des erreurs dans le temps. On distingue le test
d'hétéroscédasticité de White et le test
AutoRegressive Conditionnal Heteroscedasticity (ARCH). Nous utiliserons ici le
test ARCH.
Soient les hypothèses suivantes : H0 : Erreurs
homocédastiques ; H1 : Erreurs
hétéroscédastiques.
Si la probabilité correspondante est supérieure
à 5%, on accepte l'hypothèse H0 ; sinon on la rejette.

50
Tableau 11 : Test
d'hétéroscédasticité
Heteroskedasticity Test: ARCH
F-statistic 0.472119 Prob. F(3,15) 0.7062
Obs*R-squared 1.639265 Prob. Chi-Square(3) 0.6505
Source : nos estimations à partir de EVIEWS. Les
erreurs sont donc homocédastiques.
V' Test de causalité
La causalité entre les variables peut être
testée à l'aide de la méthode de Granger. Nous allons
vérifier ici l'existence d'une relation de causalité entre la
variable expliquée (PIB réel) du modèle et la variable
explicative d'intérêt à savoir l'ouverture commerciale.
Soient les étapes et les hypothèses suivantes :
Étape 1 : H0 : ln(ouv) ne cause pas ln(PIB) ; H1 :
ln(ouv) cause ln (PIB).
Étape 2 : H0 : ln(PIB) ne cause pas ln(ouv) ; H1 :
ln(PIB) cause ln(ouv).
Dans toutes les étapes l'hypothèse nulle n'est
acceptée que si la probabilité correspondante est
supérieure à 5%, sinon elle est rejetée au profit de
H1.
Tableau 12 : Test de causalité
Null Hypothesis: Obs F-Statistic Prob.
LNOUV does not Granger Cause LNY 22 7.65433 0.0123
LNY does not Granger Cause LNOUV 2.92792 0.1033
Source : l'auteur à partir de EVIEWS
Le tableau révèle l'existence d'une
causalité unilatérale : celle exercée par l'ouverture
commerciale sur le PIB réel.
|