La publicité via les médias sociaux.( Télécharger le fichier original )par Adil Tourabi Cadi ayyad - econo,ie et gestion 2015 |
1.1.2. Identité numériqueL'homo internetus n'est plus un homo anonymous ! Sur la toile, le droit de l'anonymat n'existe pas dans les faits. On a souvent évoqué à propos d'Internet le célèbre cartoon : « On the internet, nobody knows you're a dog » (« Sur Internet, personne ne sait que tu es un chien »). Cette caricature de Peter Steiner parue dans le New Yorker du 5 juillet 1993 illustre l'anonymat existant sur Internet à l'époque. Elle représente un chien assis sur une chaise devant un bureau, qui utilise un ordinateur tout en prononçant ces paroles à un autre chien se tenant assis par terre à côté de lui.12 L'arrivée du web 2.0 et la diversité des médias sociaux ont permis aux internautes l'échange avec le contenu des pages web mais aussi entre eux. L'internaute maintenant dispose d'une véritable identité numérique contenant des informations lui concernant et qui peuvent êtres diffusées, laissées voir archivées sur les moteurs de recherche. Ces informations «traces » ne peuvent êtres effacées et sont accessibles à tout moment par tous. Néanmoins, ces derniers temps les médias sociaux ont construit un niveau de veille et de contrôle pour éviter que ces traces numériques ne soient pas utilisées pour des fins commerciales ou plus dans le cas d'une usurpation d'identité. A cette identité numérique dispersée dans le net, il faut ajouter l'image sociale qui reflète la personnalité de chacun et ses interprétations avec les autres. 12 URL : http://www.cartoonbank.com/item/22230 La dernière caractéristique de l'identité numérique c'est qu'elle n'est pas figée, en effet comme l'e-réputation, elle évolue et se développe en fonction de ses interactions avec le monde 2.0. Le souci des entreprises ou toute personne c'est qu'il peut y avoir un véritable décalage entre l'identité Online(le 2.0) et Offline (monde réel) due aux multiples identités utilisées par la même personne (privée, professionnelles, ..) dans sa fréquentation de diverses réseaux. Toutefois, une meilleure gestion de son identité numérique suppose un minimum de connaissances en matière d'outils technologiques en présence. Les priorités avant tout c'est de surveiller ses propres traces et ce qui se dit sur soi. 1.1.3. Le risque de l'e-réputation : des risques sur estimésLe risque lié à l'e-réputation est considéré non seulement comme un risque « indirect » pour l'image de l'entreprise bridant sa capacité à agir ou créant la perception d'une irresponsabilité d'entreprise dans certains cas (Jones, Bowd and Tench ; 2009)13, mais aussi très largement comme un risque « direct » pour le business (attractivité commerciale et baisse du chiffre d'affaires). Les effets d'une mauvaise nouvelle ont d'autant plus d'impact que les personnes estiment qu'une mauvaise nouvelle a plus de poids qu'une bonne nouvelle d'après de nombreuses recherches (Folkes et Kamins ; 199914, Mizerski ; 198215). Cependant, en étudiant les typologies de consommateurs, seuls les internautes « critiques »« conversationalistes » et « créateurs » sont en mesure de publier du contenu relatif à l'entreprise. Et ils ne représentent encore qu'une petite partie des internautes à l'heure d'aujourd'hui. 90% des internautes sont spectateurs, 9% réagissent aux contenus diffusés, et 1% produise du contenu d'après le journal Guardian16. De même, seul 10% des internautes ont déjà relayé un appel au boycott d'une marque sur les médias sociaux même si 63% se disent prêt à le faire17.Bien que ces chiffres puissent paraitre tout de même assez significatifs, il faut rappeler que les internautes n'ont pas la même audience et la même influence sur les médias sociaux. Les internautes ayant réellement relayé un appel au boycott sont beaucoup moins nombreux que ceux qui ont déjà émis et émettent régulièrement des avis sur les 13 Jones, B., Bowd, R. and Tench, R. (2009) "Corporate irresponsibility and corporate social responsibility: competing realities", in Social Responsibility Journal, Vol. 5, No. 3, pp 300-310 14 Folkes V. S., Kamins M. (1999), «Effects of Information About Firms' Ethical and Unethical Actions on Consumers' Attitudes», in Journal of Consumer Psychology 8, 243-259 15 Mizerski, R. (1982) «An Attribution Explanation of the Disproportionate Influence of Unfavorable Information», in Journal of Consumer Research 9, 301-310. 16 Guardians, (2006). «What is the 1% rule?», adresse URL http://www.guardian.co.uk/technology/2006/jul/20/guardianweeklytechnologysection2 17 ANNEXE II Propension des consommateurs à appeler au boycott d'une marque ou à publier des critiques envers celle-ci IDC - SAS (2011) URL: https://fr.scribd.com/doc/59431953/Rapport-IDC-SAS-Medias-Sociaux-E-Reputation-Juin-2011 entreprises sur ces mêmes médias sociaux, soit 67% d'entre eux. Seule une proportion marginale des internautes a déjà publié sur les réseaux sociaux une critique (6%) à l'encontre d'une entreprise ou d'une marque : 3% des interviewés y ont diffusé une seule critique, tandis que 3% en ont déjà diffusé plusieurs. 94% n'ont en revanche jamais entreprit cette démarche. Les jeunes apparaissent en revanche comme les plus actifs : 12% des 18-24 ans ont déjà critiqué une marque ou une entreprise sur un réseau social.18 Les nuisances à la réputation d'une entreprise doivent également être mises en relation avec le type même d'entreprise - les entreprises B2C sont par exemple plus exposées que celles B2B - ou le secteur d'activité de celle-ci. Ainsi les entreprises sensibles comme les entreprises pharmaceutiques, celles du secteur financier ou des transports sont en première ligne. De plus, des études ont montré que les personnes qui recueillent les conseils d'un expert qui contredisent leur opinion s'accrochent d'autant plus à leur première opinion. Un phénomène de réactance démontré par Fitzsimons et Lehmann (2004)19 Par exemple, le pourcentage de personne qui sélectionne un produit qu'ils affectionnent après avoir vu un commentaire positif est de 71%, alors que ce taux atteint 93% après avoir vu un commentaire négatif20.De même des études empiriques ont mis en évidence que même lorsque des observateurs sont confrontés à une information négative, ils sont réticents à changer leur évaluation quant à la réputation de l'entreprise. (Wartick, 1992)21.De plus, dans le cas de certaines marques bénéficiant d'un niveau d'attachement extrêmement fort, l'atteinte à la réputation d'une marque n'engendre pas nécessairement une baisse de l'attractivité des marques de cette entreprise. (Bansal et Clelland, 2004)22.D'où l'importance de la notion d'attachement, et de connexion à la marque, que l'on peut aisément lier à la notion de communauté de marque. Les entreprises survivent aux révélations publiques d'un incident dans leur stratégie de communication sans être toutefois lourdement discréditées. Ainsi, un grand groupe mondial des technologies et de l'information est régulièrement mis en cause par des internautes ou des ONG concernant la violation de la vie privée des membres de cette marque, la sous-traitance en Asie, et l'abus de position dominante de l'entreprise sur 18 Ifop (2011) : « Observatoire des réseaux sociaux de l'ifop vague », adresse URL : http://www.ifop.com/media/poll/1671-1-study_file.pdf 19 Fitzsimons, G. J., Lehmann D. R. (2004), «Reactance to Recommendations: When Unsolicited Advice Yields Contrary Responses», in Marketing Science 23(1), 82-94. 20 O'Connell, A. (2010) «Reading the Public Mind», in Harvard Business Review, 00178012, Vol. 88, Issue 10 21 Wartick S.L. (1992) «The relationship between intense media exposure and change in corporate reputation», in Business & Society, 31: 33-49. 22 Bansal, P., Clelland I. (2004), «Talking Trash: Legitimacy, Impression Management, and Unsystematic Risk in the Context of the Natural Environment», in Academy of Management Journal 47, 93-103. le marché. Les ventes de cette entreprise ont continué de grimper malgré les atteintes à sa réputation, sa capitalisation boursière est même devenue l'une des plus fortes au monde. Un fort niveau d'engagement des consommateurs dans la communication de marque semble donc un levier pour contrôler son e-réputation, mais l'est-il encore lorsqu'il s'agit d'améliorer l'image de marque de l'entreprise ? D'autre part, il est toujours possible d'agir face à ces problèmes de communication. Les entreprises peuvent se justifier, expliquer leurs actes, donner des excuses lorsque cela est nécessaire, mettre la faute sur le dos d'un ou plusieurs membres de l'organisation plutôt que sur elle-même ou encore mettre l'emphase sur les côtés positifs de la marque pour nuancer les propos. Les personnes peuvent néanmoins être sceptiques face à de tels efforts pour redorer l'image de marque d'une entreprise étant donné le faible niveau de crédibilité des médias utilisés pour de telles actions de communication. (Arpan and Raney, 2003)23 Mais plutôt que d'envisager les médias sociaux comme un risque les entreprises devraient prendre conscience des enjeux que représentent les médias sociaux en termes de valorisation de l'image de marque. Le terme valorisation étant utilisé ici non pas pour sa dimension monétaire, mais bien pour signifier que l'entreprise est à même d'atteindre l'image de marque qu'elle souhaite que les consommateurs la perçoive. |
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