La stratégie actuelle de communication des
associations repose, comme nous l'avons vu, sur l'émotion
suscitée par des visuels choquants.
Mais au-delà du problème de
«culpabilisation », ces campagnes suscitent des tensions d'ordre
éthique.
LE PRINCIPE DE L'IMAGE « CHOC » : UN MANQUE
D'ÉTHIQUE SOULEVÉ
Les premières tensions sont apparues lors de la
professionnalisation du pôle communication des ONG. Les donateurs se
plaignaient de donner de l'argent pour faire du marketing. Les associations
concurrentes criaient au charity business, où les personnes de bonne foi
se faisaient remplacer par des escrocs ne pensant qu'au profit. Ces
pensées réductrices ont mis à mal durant quelques
années les associations humanitaires. Des chartes éthiques furent
créées. Des rapports sur la répartition des budgets ont
été publiés et sont aujourd'hui présents sur chaque
site internet.
Après plusieurs années où la
communication semblait aux antipodes de l'humanitaire, cette compétence
est enfin entrée dans les moeurs.
Mais une seconde problématique est apparue.
L'instrumentalisation des victimes.
Ces dernières sont la raison d'être des
associations. Si tout allait bien dans le monde, l'humanitaire n'existerait
plus. Cependant, les associations se retrouvent aujourd'hui face à une
population apathique peu sensible à la détresse d'autrui. C'est
pour cela que la majorité des campagnes de communication font
apparaître en gros plan des personnes en difficulté,
généralement des enfants de couleur victimes de malnutrition ou
de violences.
Au fil des années, les images sont devenues de plus en
plus dure à regarder, au même rythme que la population se
détachait des précédentes campagnes. Le but est bien
entendu de créer le malaise pour que la cible fasse un don et apaise sa
conscience. Cette « course » aux horreurs soulève cependant
une question : qu'en est-il des droits de ces victimes ?
Nous pouvons douter sur la démarche du journaliste ou
de l'humanitaire qui a pris cette photo. Il est peu probable que cet enfant ait
accepté de faire diffuser cette photo dans le pays.
L'enfant aimerait-il être visible partout en France, le
visage tordu par la douleur ou la maladie ?
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Cette situation est assez paradoxale de la part des associations
qui ont comme maître mot
« Respect ». Elles devraient être les
premières à ne pas utiliser comme bon leur semble la
détresse de leurs victimes.
Une certaine pudeur est à respecter à leur
égard. Bien que cela ait pour objectif de sensibiliser la population,
afin de récolter des fonds pour venir en aide à ces enfants,
d'autres solutions,
plus respectueuses, existent.
Nous verrons par la suite quels moyens je préconise
pour avoir une communication efficace, dans le respect des victimes, et qui
touche la plus jeune génération.
Mais avant cela, rappelons tout d'abord les objectifs et
enjeux de la communication pour les ONG.
LA COMMUNICATION DES ONG : QUELS OBJECTIFS ?
Si les associations humanitaires acceptent de mettre une partie
de leur budget annuel (généralement entre 5 et 10% du budget)
dans le département marketing et communication, la première
raison et de vouloir toucher de nouveaux donateurs et accroître le nombre
de dons. Ainsi la collecte de fonds est l'activité principale des
responsables des communication. Il est nécessaire pour cela de faire des
campagnes grand public originales et percutantes.
Lors de notre préconisation, nous tenterons de faire
évoluer cet objectif afin qu'il ne soit plus un objectif en soi mais
plutôt une résultante des moyens mis en place pour répondre
aux objectifs suivants. Ainsi, nous pourrons contourner plus facilement ce
problème de campagnes trop émotionnelles.
Le message ne doit plus être principalement « vous
devez donner » mais « vous devez
participer ».