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L'ÉTUDE QUANTITATIVE : L'AVIS DES DONATEURS
POTENTIELS
J'ai construit cette étude dans le but de récolter
deux informations bien précises. Tout d'abord
établir le profil du « meilleur » donateur,
celui qui peut facilement être conquis. Et celui du donateur «
compliqué », qui correspond bien souvent aux apathiques
cités lors dans la première partie de ce mémoire. J'ai
besoin de ce profil pour établir un lien avec ma seconde information :
quel type de communication souhaitent les donateurs.
A la fin de cette étude, j'espérais tout
d'abord valider la pertinence de ma problématique, et dans un second
temps voir si mes premières réflexions fondées durant mes
lectures étaient sur
la bonne piste. Il se trouve que tout fut validé comme je
l'espérais.
Mon étude a été menée sur un
échantillon de 115 personnes, ayant en moyenne entre 22 et 34
ans. J'ai eu peu de réponses des plus de 50 ans,
cependant ces derniers sont bien souvent des donateurs fidèles qui n'ont
pas besoin d'être recrutés.
Concernant l'esprit actuel des français par rapport au
don, 72% ne sont pas donateurs. La cause principale est le manque de revenu,
mais le manque de confiance est en seconde place. Par ailleurs, 75% des
répondants préféreraient donner pour une cause
internationale, ce qui me semblait étonnant. En étudiant chaque
commentaire accompagnant les réponses, je me suis rendue compte qu'ils
souhaitaient tout de même régler les problèmes en France
avant cela,
mais qu'un pays développé comme le nôtre
ne devrait pas avoir besoin d'aide humanitaire. Le
manque de confiance réapparaît également
lorsqu'il s'agit d'envoyer de l'argent à l'étranger, les
donateurs ont l'impression de mieux superviser lorsque c'est en local.
Enfin, 53% des répondants trouvent la communication
des ONG culpabilisante, et 38%
n'adhèrent pas à leurs campagnes. Enfin, 22% ne
se sentent absolument pas concernés par cette étude,
n'étant pas intéressés par l'aide humanitaire.
Ce premier portrait montre ainsi que de nombreux
français restent à convaincre et peuvent
devenir de futurs donateurs si l'on parvient à les
toucher convenablement et à leur inspirer confiance.
La suite de l'étude va nous permettre de nous
aiguiller sur de potentiels nouvelles techniques de communication pour les ONG
humanitaires.
Lors de mes lectures, j'ai été horrifiée
par tout ce que l'on ne sait pas dans les pays en voie de développement.
Les gouvernements sont dépourvus de charité, les médias ne
prennent que ce qui les intéressent, et les associations se
débrouillent comme elles le peuvent. J'ai également perçu
un aspect intéressant de la communication dans le département
qu'ils appellent
« fundraising » soit la levée de fonds.
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Cependant ce pôle cible bien souvent uniquement les
professionnels. Or cette communication me paraît intéressante
à exploiter. En effet, très objective et appuyée par des
chiffres concrets, nous comprenons mieux pourquoi nous donnons, quelle est
l'action, combien de temps cela dure etc.
Lors de mon étude quantitative, ma théorie fut
vérifiée car c'est 62% des interrogés qui souhaiteraient
une communication plus informative. Plus inquiétant, 92% des
répondants estiment que les associations ne sont aujourd'hui pas encore
suffisamment transparentes sur leur budget. Ce chiffre alarmant peut
s'expliquer par le fait qu'il faut être donateur pour avoir des retours
sur les budgets, ou alors il faut chercher, parfois difficilement sur leur site
internet. Or aujourd'hui le français veut des informations sans avoir
besoin de chercher quoi que ce soit.
Une autre piste à exploiter est celle du
témoignage. En effet 49% souhaiteraient voir des
personnes ayant été sur le terrain
interviewés, contre 20% pour les campagnes TV. Ainsi, les
français se déculpabiliseraient car ils verraient que la France
se bat quand même chaque jour, et cela peut également les motiver
à s'engager à leur tour.
Enfin, si l'on devait faire le profil du « donateur
facile » ce serait une femme qui souhaite se battre pour les enfants,
possédant au moins le BAC, active d'environ 25 ans.
A l'inverse, le donateur le plus dur à toucher serait
un homme d'une vingtaine d'années qui est
jusqu'à présent très peu
sensibilisé et qui a un niveau d'étude inférieur au BAC,
actuellement à la recherche d'un emploi, étudiant ou jeune
actif.
Aucune surprise par conséquent sur le profilage. Il
faut donc parvenir à toucher la gente masculine et les persuader que le
peu de dons qu'ils feront ne changera pas leur budget mais pourra grandement
aider les populations étrangères. Il faudra également les
sensibiliser sur les causes humanitaires en leur montrant concrètement
la pierre qu'ils peuvent apporter à l'édifice.
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ÉTUDE QUALITATIVE : AVIS DES
EXPERTS20
Mon étude qualitative avait pour but de
récolter l'avis d'experts de la communication en milieu humanitaire. Je
n'ai malheureusement pu interviewer que deux personnes, ne parvenant pas
à
joindre les plus grosses ONG. Cependant ces réponses
ont été très intéressantes et m'ont
réellement aidée pour la réalisation de ma
préconisation.
J'ai commencé par interviewer Judith Marie, qui
travaille actuellement chez Emmaüs mais qui a eu un long parcours
humanitaire. Elle abonde dans mon sens lorsqu'il s'agit de développer
une communication plus objective. Dans le milieu humanitaire, ils cherchent
effectivement à s'éloigner de l'aspect culpabilisant de la
campagne. Concernant le problème de confiance, Emmaüs essaye
d'être le plus transparent possible. Cette association comme beaucoup
d'autres sait que les donateurs sont méfiants et n'accepteront plus de
nouveaux scandales. Ce n'est pas une seule institution qui est en jeu mais
l'ensemble du monde humanitaire.
La communication humanitaire souhaite évoluer,
notamment en utilisant le digital comme tremplin.
Le web leur permet de pouvoir s'exprimer plus facilement
à moindre frais, il faut maintenant
l'utiliser à bon escient.
Quelques mois plus tard, j'ai contacté Matthieu
Grapeloup, chargé de la communication du siège du GERES. Cette
association conduit des projets de développement autour de
l'accès à
l'énergie propre pour les plus pauvres. Son
siège social est à côté de Marseille, mais ses
actions sont tournées essentiellement en Asie.
Ayant peu de moyens pour la communication externe, le GERES
n'est pas véritablement concerné pour le moment du
problème de défiance des donateurs potentiels. Mais ce peu de
moyen est un frein pour le développement «
basique » de la communication. Matthieu est exposé au même
problème que beaucoup de responsables communication dans des
associations ont : persuader en interne de l'utilité
de communiquer auprès des donateurs pour en augmenter le nombre.
Le côté visuel serait aujourd'hui encore
primordial dans la communication. Cela permet d'avoir un message percutant et
clair. Mais tout comme Judith, il estime que les campagnes aujourd'hui sont
trop moralisatrices pour la jeune génération. Cette
dernière souhaite s'engager, voir du concret dans leur action.
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D'après Mathieu il faudrait donc que la communication
s'axe sur le côté utile et engageant
qu'apporte le don. Ce n'est pas juste 5€ par mois, c'est
une part dans un projet gigantesque ! Enfin, il est important de faire
évoluer la communication tout en respectant l'éthique des
associations. La communication doit être percutante et au
service de la visibilité de
l'association, tout en utilisant un budget le plus
limité possible et en respectant une transparence totale.
Nous avons émis quelques ébauches pour faire
évoluer la communication des associations humanitaires. Cependant, nous
n'avons pas encore traité le problème de défiance de la
nouvelle génération. Certes faire preuve de
transparence est nécessaire aujourd'hui pour ne pas faire fuir la
population. Mais ne serait-il pas possible de l'attirer justement parce qu'il
se sentira bien dans une association en particulier ?
Parmi les tendances en France du marché en 2014 et
2015, la personnalisation et le contact
humain sont présents. Bien que les ONG ne peuvent pas
se permettre de « surfer » sur les tendances marketing sans
s'octroyer les foudres des médias, il est tout de même
intéressant de les étudier. Les citoyens ont aujourd'hui besoin
de se sentir important au sein d'une société, d'un groupe, d'une
association. Mais il a également besoin de créer des liens forts
au sein de cette même communauté.
Aujourd'hui les associations prennent le rôle d'adultes
reprochant à leurs enfants de ne pas assez s'investir. Il y a une
certaine distance entre associations et donateurs, une impression d'être
jugés et vus de haut par chacun des partis.
Pour obtenir la confiance d»un jeune adulte, il faut
commencer par lui montrer qu'on l'estime et que c'est un maillon aussi
important que l'association.
Il est aujourd'hui nécessaire de ne plus voir un
rapport association-donateur mais visualiser cela en un bloc unique : la
Solution.
Ainsi, se rapprocher de ses donateurs est une solution
à étudier. Il ne faut pas se contenter de les remercier et de
leur donner des nouvelles lointaines par newsletter. Il est important de
créer un dialogue avec eux sur le long terme. La communication
participative est un axe intéressant qui pourrait avoir un double
avantage. Le donateur se sentirait pleinement à sa place au sein
d'une communauté qui partage le même engagement,
et l'association elle-même pourrait évoluer dans tous les domaines
grâce aux apports de chaque membre de cette communauté.