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Les fonctions sociales de la littérature dans l'oeuvre de Simplice Ilunga Monga

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par Guy KEBA GUMBA
Université de Lubumbashi - DEA 2016
  

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I.2.1.3. LA SOCIOLOGIE DE LA RECEPTION

Claude Duchet pense que « La signification d'une oeuvre n'est pas réductible à l'intention de l'auteur. Elle résulte en partie de sa position même dans un espace des possibles et dans un espace réel et objectivement structuré de productions symboliques, ainsi que des appropriations qui en sont faites, du sens qui lui est donné, et des tentatives d'annexion dont elle est l'objet » (1979).

Contre l'herméneutique anhistorique d'un côté, mais aussi contre l'histoire littéraire positiviste et la théorie du reflet marxiste de l'autre, Hans-Robert  Jauss a prôné une histoire littéraire antipositiviste fondée sur une approche de la réception conçue comme, l'histoire des effets produits par les oeuvres. Le concept clé est celui d'« horizon d'attente » que Jauss emprunte à Husserl, Mannheim et à Popper pour l'appliquer aux phénomènes littéraires(1967).

Depuis le milieu des  années 1970,les théories de la  réception et de la  lecture acceptent l'ambivalence dutexte et du lecteur, comme caractéristique de la réalisation et de l'actualisation des textes littéraires. Les travaux de  Hans Robert Jauss et de  Wolfgang Iser , répondent à cette insuffisance. Dans cette optique, l'Ecole de Constance (dont Iser et Jauss sont les principaux tenants) tente de renouveler, d'absolutiser l'histoire de la littérature. Cette approche consiste à placer le lecteur au centre de la littérature.

Bien que Jauss et Iser fassent du récepteur une instance nécessaire à l'expérience littéraire, le texte demeure au centre de leur étude. Il devient une entité portant en elle-même les conditions (structures et systèmes) de son actualisation. Le lecteur, en tant qu'agent de récréation littéraire, il est responsable des mises en marche de la sémiosis. Iser et Jauss sont de pionniers de la révolution formelle du texte littéraire.

Pour D. Fermier.: «  Iser et Jauss sont les terroristes de la méthode formelle : terroristes puisqu'ils désamorcent, avec une grande méthodologie, l'entité textuelle en y faisant entrer un intrus, le lecteur, indispensable à l'expérience littéraire. Toutefois, le public de Jauss et le lecteur d'Iser ne sont pas réels. Ce sont des représentations modélisées de l'instance réceptrice de la communication et elles ne peuvent en aucun cas servir à représenter tout lecteur » (2001:33).

Pour R. Barthes  « La lecture, c'est la rencontre de deux pôles : l'un, artistique et propre au texte, l'autre esthétique et propre au lecteur. Donc, le texte, portant en lui-même les conditions de sa réalisation, parle au lecteur, le guide afin qu'il réalise ce qui y est implicite. Ce qui est implicite au texte, c'est d'abord la situation qui sert d'arrière-plan à sa réalisation. D'une part, sa situation qui entoure l'auteur, appuyé de sa position sur la Terre et dans l' Histoire, appuyé de sa  culture, de ses valeurs, ses expériences, ses connaissances et capable d'articuler un lien artistique logique (le texte) entre tout ceci.Donc, il écrit un texte, lui aussi normalisé par des structures et des conventions qui sont à la fois textuelles et extra-textuelles.

D'autre part, ce texte nécessite un lecteur, appuyé de sa position sur la Terre et dans l'Histoire, appuyé de sa société, de son éducation, son enfance, sa sensibilité et habile à établir un lien logique (la lecture) entre tout ça, entre toutes ces conventions.Pour que la communication s'accomplisse, il doit s'établir un rapport entre texte et lecteur » (R. Barthes, : 1985).

Toute littérature est une histoire racontée par l'écrivain et qui doit répondre à un certain nombre des préoccupations et exigences du lecteur. Cela est développé dans la notion de l'horizon de l'attente en confirmant que l'écart esthétique permet de mesurer l'historicité d'un texte.

G. Genette reprend le concept d'horizon d'attente de Gadamer et Heidegger et l'adapte, pour la première fois, à l'histoire de la littérature, qui constitue un système de référence objectivement formulable à l'acte de lecture. Ce système résulte de trois facteurs :

· l'expérience préalable que le public a du genre dont l'oeuvre relève ;

· la forme et la thématique d'oeuvres antérieures dont (l'oeuvre) présuppose la connaissance

· l'opposition entre langage poétique et langage pratique, monde imaginaire et réalité quotidienne. C'est-à-dire que l'oeuvre est reçue et jugée par rapport à l'arrière-plan de l'expérience de la vie quotidienne du lecteur.

L'aisthesis désigne la dimension réceptrice de l'expérience esthétique où un tiers état, le lecteur, extérieur à la sémiose, prend plaisir au sens et sa valeur.

Dernier aspect de la Poétique d'Aristote repris par Jauss, « la catharsisinterpelle le lecteur et suscite son adhésion » (G.Genette, 1982).

I.2.1. L'APPROCHE STRUCTURALE

I.2.1.1. ORIGINES ET DEVELOPPEMENT

Le Cours de Linguistique générale de Ferdinand de Saussure de 1916 envisageant d'étudier la langue comme un ensemble avec des éléments qui entretiennent des liaisons d'équivalence ou d'opposition crée implicitement le structuralisme. En effet, vers 1950 l'homme est considéré comme un être pensant, être communicant, être social avec ses semblables. Selon Lévi-Strauss, un homme devient un objet de science, basé sur un système de parenté.

Disons que pour C. Lévi-Strauss, « la structure possède une organisation logique mais implicite, un fondement objectif en deca de la conscience et de la pensée (structure inconsciente). Par conséquent, le structuralisme vise à mettre en évidence ses structures inconscientes ». Vider l'action humaine de son individualité et la déconsidération de l'aspect historique de la langue reste l'objectif du structuralisme.

Les penseurs structuralistes disent que les processus sociaux sont tirés des structures fondamentales qui demeurent, le plus souvent, inconscientes. Ainsi l'organisation sociale produit naturellement certaines pratiques et certaines croyances propres aux individus.

C'est donc un mouvement idéologique qui est en même temps une théorie est une méthode littéraire. Le structuralisme est considéré, dans une certaine mesure, comme une innovation du positivisme tendant à s'émanciper de la philosophie.

Le texte littéraire dans la vision structuraliste est défini comme une manifestation de la langue : on l'étudie à l'aide de structures appelées réseaux, servant à l'analyse linguistique qu'elles soient d'ordre grammatical, syntaxique, rhétorique ou phonétique. En ce moment-là, le texte cesse d'être une entité unique mais devient plutôt comme un point de convergence de tous les réseaux de signification. Signalons aussi que M.Riffatere a introduit dans la pensée structuraliste une étude linguistique des effets du message, c'est-à-dire une prise en compte des effets du texte sur le lecteur. Ce dernier a un rôle à jouer : « il doit interpréter l'oeuvre et l'intérioriser pour sa vie »(1979 :68).

I.2.1.2. LE STRUCTURALISMELITTERAIRE

Le structuralisme littéraire a connu en France, à partir des années 60, le statut d'un mouvement unifié en dépit des caractéristiques particulières à chaque auteur.Roland Barthes, Gérard Genette, Claude Bremond,Paul Larivaille, Tzvetan Todorov, etc. sont les principaux représentants de ce courant structuraliste. Selon Jean-Marie Schaeffer, les sources du structuralisme se situent à la confluence de nombreuses traditions littéraires, telles que le formalisme russe, le cercle linguistique de Prague, etc. L'approche structuraliste littéraire n'est jamais hostile ni à l'examen des faits de l'histoire chronologique, ni à l'étude sociologique des faits littéraires. Cette approche cherche plutôt à remplacer l'histoire événementielle des acteurs et des oeuvres par une histoire des formes, des thèmes, des institutions pour ressortir les structures signifiantes.

Karcevesky et Troubeskoi présument que la linguistique est une méthode propre de manière à permettre de découvrir les lois structurelles de systèmes linguistiques. Influencé par la linguistique de F. de Saussure, aussi par la phénomologie de Hussel et enfin la sémantique de Gestaltisme, le structuralisme linguistique de l'Ecole de Prague se divise en trois périodes :

· 1èrepériode(1926-1934) : c'est la période de la fondation et de la structuration de ce groupe. Elle s'oriente vers les enquêtes structuralistes. Concernant les oeuvres poétiques, cette approche privilégie la composante phonétique. Roman Jakobson et Jean Mukarovisky sont les ténors de ce groupe.

· 2èmepériode (1934-1938): le groupe dévie de son orientation parce que la conception sémiologique de l'oeuvre littéraire transforme celle-ci en fait social et permet aux structurations de rattacher l'évolution littéraire aux autres aspects de la culture.

· 3èmepériode (1938-1948): nous citons Bogatyrev, Jakobson et René Wellek qui plonge le groupe dans un déclin.

Quant au structuralisme génétique, L.Goldman soutient que « C'est une démarche littéraire qui vise à éclairer la genèse des structures textuelles» (1964 :51). Le pionnier est Lucien Goldman qui ambitionne par le va-et-vient entre les parties et le tout pour porter au jour des homologies entre les structures significatives du texte qui mènent vers la conscience du groupe social 

L'écrivain acquiert des forces créatrices dans son groupe social, avec lequel il partage les structures mentales, les faits de conscience, les structures socio-économiques, etc. Pour Lucien Goldman, c'est un phénomène naturel que le caractère collectif de la création littéraire provient du fait que les structures, de l'univers de l'oeuvre sont homogènes aux structures mentales de certains groupes sociaux ou en relations intelligibles avec elles.

De plus, le structuralisme génétique Goldmannien a légué à la sociocritique les concepts de « sujet transindividuel » (la collectivité, le sujet collectif, la microsociété).

I.2.1.3. LE MODELE ACTANTIEL

Le schéma actantiel d'A.J. Greimas (1966) comporte un destinateur (émetteur), un objet (objectif), un destinataire (récepteur) ainsi qu'un adjuvant (aidant) et un opposant (adversaire). Ce schéma inclut parfois aussi la quête, selon qu'on la considère ou non comme un actant. Le schéma actantiel (ou modèle actantiel) rassemble l'ensemble des rôles (les actants) et des relations qui ont pour fonction la narration d'un récit, par acte.

Un personnage, le héros, poursuit la quête d'un objet. Les personnages, événements, ou objets positifs qui l'aident dans sa quête sont nommés adjuvants. Les personnages, événements ou objets négatifs qui cherchent à empêcher sa quête sont nommés opposants. La quête est commanditée par un émetteur (ou destinateur, ou énonciateur) au bénéfice d'un destinataire.

D'une façon générale, tous les personnages qui tirent profit de la quête sont les bénéficiaires. Schématiquement, la matrice actantielle se présente comme suit :

Destinateur

Adjuvant

Objet

Destinataire

Sujet

Opposant

Pour bien comprendre le schéma actantiel, il ne faut pas oublier que les rôles actantiels, c'est-à-dire, à proprement parler, les « actants », ne doivent en aucun cas être confondus avec des « acteurs ». Les actants sont des positions au sein d'une structure ; ils se définissent par leurs relations. Les acteurs d'une histoire, d'un conte, d'un roman... se déplacent d'une position à l'autre et voyagent au sein de cette structure. De plus, les actants sont situés par Greimas sur 3 axes qui les relient de manière significative :

· le sujet et l'objet sont situés sur l'axe du désir (ou de la quête) ;

· le destinateur et le destinataire sont situés sur l'axe de la communication ;

· les adjuvants et les opposants sont situés sur l'axe du pouvoir (pouvoir positif dans le cas des adjuvants, négatif dans le cas des opposants).

En ce qui concerne le rôle du destinateur, le plus souvent, cet actant constitue la ou les valeurs au nom de laquelle (ou desquelles) agit le sujet ; en effet, le sujet fait ou agit, tandis que le destinateur fait faire ou fait agir le sujet. En fin de récit, c'est aussi le destinateur qui « sanctionne » la réussite ou l'échec de la quête du sujet, c'est-à-dire l'obtention ou non de l'objet convoité.

Plusieurs rôles peuvent être cumulés par un personnage, un objet ou un événement ; ou ils peuvent être répartis entre plusieurs personnages, objets ou événements. Il peut y avoir plusieurs schémas actantiels dans un même récit, pour son ensemble -deux quêtes ou plus sont menées conjointement par un ou plusieurs héros- ou au cours du récit, le héros devant réaliser plusieurs quêtes successives (récits où le héros subit plusieurs épreuves) ou une quête incidente prenant place dans l'histoire (récits enchâssés).

Pour approfondir l'analyse des relations entre les actants d'un récit, Anne Ubersfeld propose de percevoir le schéma actantiel de Greimas en triangles actantiels selon les rapports spécifiques entre les actants.

Voici en quelques lignes comment se présente la configuration des triangles actantiels proposés par cette dernière :

A. Le triangle actif ou conflictuel

Le triangle actif ou conflictuel permet de saisir la pertinence de la quête. Il nous permet également de découvrir le niveau d'effort fourni par le sujet dans le cas de tel ou tel type d'opposition.

Par rapport à l'opposant il y a deux possibilités :

1) L'opposant s'oppose directement au sujet, c'est-à-dire que la quête du sujet présente beaucoup de risque dans la mesure où elle s'arrête et que le sujet est éliminé. C'est l'existence du sujet qui est visée.

Objet

SujetOpposant

2) L'opposant est opposant au désir du sujet et par rapport à l'objet. La quête du sujet présente moins de risque car ce n'est pas l'existence du sujet qui est visée par l'opposant.

Objet

Sujet Opposant

B. Le triangle psychologique

Le triangle psychologique nous permet donc de découvrir la source, l'origine, la motivation même de la quête. C'est à partir de ce triangle que nous saurons si la motivation est individuelle ou collective.

Les motivations de la quête se révèlent de manière détaillée : individuelles, collectives, etc.

Destinateur Objet

Sujet

C. Le triangle idéologique

Ce triangle nous permet donc découvrir, si l'intention de la quête sera au profit d'un bénéficiaire individuel ou collectif.L'action du sujet se réalise à l'intention d'un bénéficiaire individuel ou collectif.

Objet Destinataire

Sujet

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams