D/ Approches de la culture de
sécurité
L'utilisation du terme «culture de
sécurité« n'est pas anodine car elle est fortement
liée au contexte des années 1980, période durant laquelle
le terme «culture d'entreprise» a connu son apogée dans le
domaine du management (12). En un peu moins de trente ans, la notion de culture
de sécurité considérée comme la prise en compte des
facteurs organisationnels et humains dans la gestion des risques, a
été diffusée dans tous les secteurs industriels à
hauts risques. Néanmoins, dans la littérature scientifique, il
n'y a pas de consensus sur la définition, les caractéristiques et
le concept de la culture de sécurité. La culture de
sécurité, considérée comme une dimension du concept
plus global de culture organisationnelle, est donc tributaire des débats
sur cette même culture organisationnelle (13).
Gudelnmund cité par Nascimento identifie deux approches
(14) :
1) Une première approche culturaliste :
«Ce que l'organisation est»
Il s'agit de l'approche dominante où la culture est
analysée comme un objet en soi et cette analyse permet de comprendre le
fonctionnement du collectif et de l'organisation. La culture de
sécurité désigne les normes, les valeurs, les croyances,
les attitudes et les représentations partagées par un groupe de
personnes supposées être liées à la
sécurité.
On distingue trois types de mécanismes sociaux relatifs
à la CS :
-- l'intégration : la CS est
considérée comme le ciment social du groupe.
Ce mécanisme participe à l'uniformisation de la CS
au sein d'une organisation. L'identification d'éventuelles sous-cultures
témoignerait de la faiblesse de stratégie du leadership.
-- La différentiation : la CS est
analysée comme un produit construit socialement selon le pays, le
secteur, les services, les professions et les groupes. Cette perspective admet
l'existence de sous-cultures au sein des organisations. Le rôle de ces
sous-cultures dans la sécurité globale est le point focal de
l'analyse. Ce mécanisme pourrait expliquer les résultats
divergents entre différents services d'une même organisation.
-- l'ambiguïté : ce mécanisme
peut être considéré comme une extension du mécanisme
de différentiation. Il renvoie aux intentions des individus, chacun
pouvant appartenir à des sous-cultures différentes.
Figure 1 : Domaines de la Culture de
sécurité (Rapport IRSN 2005/54)
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12
La culture de sécurité dans l'approche culturaliste
serait au carrefour de ces trois mécanismes et il est intéressant
d'observer et d'analyser leurs points de chevauchement (15). La culture de
sécurité s'élabore alors sur un ensemble
d'hypothèses et de pratiques associées qui forgent les croyances
sur les dangers et la sécurité (16). Ainsi Vaughan, cité
par J.L. Hall, pense que pour appréhender le contexte d'un
événement ou d'une activité il est nécessaire de se
pencher sur les manières dont la culture se développe et
influence notre quotidien (17). Vaughan prend l'exemple des ingénieurs
de la NASA, responsables du programme de la Navette spatiale. Il explique la
normalisation de la déviance par une conviction culturelle qui a
mené les ingénieurs à penser que tout allait bien alors
que les informations dont ils disposaient leur indiquaient l'inverse.
2) Une seconde approche fonctionnaliste :
«Ce que l'organisation a»
La culture de sécurité est considérée
comme une variable parmi d'autres. L'analyse, dans ce cas, porte sur le mode de
fonctionnement de l'organisation. On s'intéresse alors aux structures
pratiques et politiques prévues pour améliorer la
sécurité. Les recherches sont dirigées vers la description
des attributs de ces organismes « sûrs » qui sont :
-- l'engagement de la direction et du
management séniors en matière de sécurité
-- la vigilance à l'égard des
dangers et de leur impact potentiel
-- les normes et règles réalistes
et flexibles en rapport avec les dangers
-- la réflexion continue sur les
pratiques et apprentissages organisationnels grâce à
des systèmes de surveillance et des retours
d'expérience.
Dans cette perspective, la culture de sécurité est
ainsi une variable qui peut être isolée, analysée et
modifiée.
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