C. Cependant la rationalisation de la gestion
financière n'est pas négligeable pour le conseil
1) Un partenaire de choix pour la gestion de patrimoine
indépendante
? Une gestion financière parfois
sommaire
Même si, comme nous l'avons vu auparavant, le
robo-advisors ne peut remplacer le conseiller en gestion de patrimoine, il est
en capacité d'améliorer son travail et son activité.
Effectivement, si le service fourni n'est pas totalement celui du conseiller,
il en est tout de même une partie. Sur cette partie du métier, le
robo-advisors peut avoir son rôle à jouer dans les années
à venir. Cela est d'autant plus vrai pour les conseillers
indépendants, généralement relativement modestes, qui
représentent la catégorie la plus concurrencée par les
robo-advisors. La raison en est simple, ces conseillers sont
éloignés des clients haut de gamme par les banques privées
dont les structures et les investissements sont plus à même de
répondre aux besoins des clients les plus fortunés. Fort de ce
paramètre, depuis des décennies, les indépendants du
secteur se sont attribués la clientèle située en dessous
en termes de richesse, parfois boudé par les banques privées,
mais qui a tout de même besoin d'une gestion patrimoniale malgré
qu'elle soit moins complexe que celle des grandes fortunes. De fait, ces
indépendants se retrouvent en confrontation plus directe avec le
robo-advisors qui recherche la même catégorie de client.
De mon expérience personnelle, la gestion d'actifs des
conseillers indépendants est parfois sommaire. La grande polyvalence
requise par le métier implique un manque de perfection dans certains
domaines. Au sein des grandes banques privées, les conseillers sont
ainsi entourés de spécialistes qui formulent des recommandations
et créent des produits maisons, voire même des produits
spécifiques pour un client. L'indépendant ne dispose pas de cette
structure et doit donc composer avec ses connaissances, son entourage
professionnel, des formations et un suivi quotidien de l'actualité
économique et financière. La méthode fonctionne car il est
acquis qu'un client suivi patrimonialement par un conseiller surperforme un
individu qui gère seul ses placements. Cependant, il n'est pas offensant
de dire que cette méthode reste largement perfectible. Nous pourrions
ainsi penser que le robo-advisors puisse être le spécialiste qui
formule des recommandations pour le conseiller, qui les transmet ensuite
à ses clients. On retomberait ainsi dans la même
hiérarchisation clientèle qu'auparavant, avec une banque
privée positionnée sur le haut de gamme avec une structure
d'allocation d'actifs internes optimisée, et des conseillers
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indépendants positionnés sur la gamme
inférieure avec une structure externe d'allocation d'actifs. Depuis
toujours, les conseillers fonctionnent en s'entourant de spécialistes
extérieurs, notamment d'avocats, de fiscalistes, de comptables. Alors
pourquoi pas un robo-advisors ? Cette position est d'ailleurs mise en avant par
certains robo-advisors français, comme l'exprime Léonard de
Tilly, co-fondateur de FundShop, le robo-advisors « est un
véritable outil d'aide à la vente qui crée le lien entre
le CGPI et son client car l'interface est très pédagogique
»38. Ainsi, les robo-advisors se posent plutôt en
concurrent des outils supports du conseiller en gestion du patrimoine comme
Quantalys ou le site Morningstar. Cette aide permettrait de
bénéficier de plus de temps pour prodiguer un véritable
conseil patrimonial et dissocier véritablement l'allocation du
conseil.
? Une nécessaire réglementation de ces
nouveaux acteurs de marché
Certains robo-advisors acquièrent le statut de «
conseiller en investissements financiers » (CIF),
généralement utilisé par les gestionnaires de patrimoine.
Ce statut réglementé par l'AMF stipule que « la
caractéristique principale de l'exercice de conseiller en
investissements financiers réside dans son caractère habituel et
s'inscrit comme une prestation de conseil stricto sensu. L'activité de
conseil consiste à fournir des recommandations personnalisées
à un tiers qui se présente comme adaptées à cet
investisseur, ou fondées sur l'examen de sa situation propre ».
L'adoption d'un tel statut juridique par les robo-advisors laisse sceptique,
puisqu'elle pourrait laisser penser que l'offre proposée est similaire
à l'approche patrimoniale globale prônée par les
gestionnaires de patrimoine. L'objectif d'une telle approche est de
découvrir la situation du client dans sa totalité, et de faire
des recommandations qui répondent à l'ensemble des
problématiques soulevées par le client ou le conseiller lors de
cette découverte. Il y a donc une interaction entre le conseiller et son
client visant à mettre en lumière des objectifs dont le client
n'aurait pas forcément conscience. C'est souvent le cas en ce qui
concerne la transmission patrimoniale, les clients encore dans la force de
l'âge ne jugent pas opportun d'aborder ce sujet aussi tôt alors que
la préparation de la transmission nécessite du temps. Il est par
exemple conseillé d'investir sur des contrats d'assurance-vie avant 70
ans afin de profiter du régime fiscal avantageux au moment de la
succession. Le robo-advisors ne propose qu'une approche besoin qui consiste
uniquement à prendre en considération le besoin
énoncé par le client, par le biais du questionnaire, et à
proposer un produit, en l'occurrence une allocation de portefeuille, qui y
répond. La différence entre les deux approches est que la seconde
ne s'évertue pas à motiver le besoin exprimé du client et
ne l'incite donc pas à construire une vision d'ensemble. C'est
d'ailleurs pour cette raison que Benoist Lombard, président de la
Chambre nationale des conseils en gestion de patrimoine et fondateur de Witam
Multi Family Office, s'élève contre les
38Lors d'un discours prononcé à la
conférence Patrimonia 2015
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robo-advisors en estimant que ces derniers ne respectent pas
les procédures, visant à fournir un conseil éclairé
au client, imposées par le statut de CIF39.
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