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La cour pénale internationale et les juridictions internes des états

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par Serges NDEDOUM
Université de Dschang - Master 2014
  

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B- L'adaptation par les États de leurs législations nationales

« Le droit international pénal présuppose à maints égards, l'existence de droits pénaux nationaux »147(*). À l'instar de tout le droit international, le droit international pénal a besoin d'être traduit, intégré en droit interne pour son application effective et pour la bonne coordination de la lutte internationale. Cette adaptation législative est obligatoire pour les États parties au Statut. Cependant, compte tenu du fait que les États non parties ne sont pas totalement exclus du champ de la Cour, ces derniers pourraient avoir un intérêt à accomplir aussi cette formalité. L'obligation d'adapter la législation nationale est primordiale pour les États parties. En vertu de l'article 88, ils ont la charge de mettre leurs lois nationales en conformité avec les dispositions du Statut, « en vue de permettre la réalisation de toutes les formes de coopération ». Cette opération a pour but de permettre d'abord à leurs organes judiciaires de pouvoir connaître des crimes prévus par le Statut, et ensuite de faciliter à la Cour une intervention lorsqu'une situation ou une affaire l'exigera. Cette obligation concerne essentiellement les lois pénales relatives aux définitions des crimes et les modalités pratiques de la coopération avec la Cour. Ces dernières impliquent notamment les règles de procédure, la détermination de l'organe national compétent pour recevoir les demandes de la Cour148(*), ou encore les conditions du transfert du suspect à la Cour.

Le Statut reconnaît aux États la priorité de juridiction dans la répression des crimes qu'il prévoit. Les États ont ainsi le devoir de réprimer les infractions commises sur leur territoire, ou qui impliquent leurs nationaux. Un État partie qui envisage de telles poursuites, devrait avoir dans son droit pénal, des incriminations identiques sinon en conformité avec celles prévues par le Statut149(*). Cette idée trouve sa justification dans le fait que, en vertu du principe de complémentarité, la Cour pourrait déclarer recevable une affaire dans laquelle les éléments des crimes sont par exemple plus étroits dans le droit national que dans le Statut. Dans un tel cas en effet, la loi nationale ne permet pas à l'État de connaître du crime parce qu'elle est trop restrictive et ne couvre pas le crime en question  qui entre dans la sphère de définition, plus extensive, du Statut. Respecter cette obligation est pour les États, un moyen de pouvoir user pleinement de la priorité de juridiction qui leur est reconnue.

Ainsi, de nombreux États ont déjà procédé à cette formalité. En effet, en plus des États parties, il y a également les États qui envisagent d'adhérer au Statut. Ce dernier n'exige aucune forme particulière de mise en oeuvre et les États « décident de la procédure à suivre pour rendre leurs dispositions juridiques internes compatibles (...) la forme de la législation retenue dépendra de la constitution, des exigences du traité et de toutes les législations pertinentes déjà en vigueur » pour l'État concerné. Le but ultime étant « de permettre la réalisation de toutes les formes de coopération » prévues par le Statut. Comme le montre une enquête publiée dans la Revue de droit militaire et de droit de la guerre150(*), les procédures de mise en oeuvre et les formes utilisées par les États désireux de le faire sont multiples. Pour les États ayants un système dualiste, celles-ci vont de modifications de la constitution, à l'adoption de lois uniques ou séparées qui intègrent les aspects pratiques de la coopération. Pour les pays monistes151(*), l'intégration des normes du Statut est nettement moins difficile, dans la mesure où le Statut est directement intégré au droit interne dès sa ratification. Certaines dispositions, telles que celles sur les modalités de la coopération, auront cependant besoin d'être accompagnées par des textes d'application.

Ainsi, les États, dans le cadre de la coopération avec la CPI, doivent incriminer dans leurs législations nationales les atteintes telles que, Le faux témoignage ; La production des éléments de preuve faux et falsifiés ; Les représailles exercées contre un témoin en raison de sa déposition ; La destruction ou la falsification d'éléments de preuve ou l'entrave au rassemblement de tels éléments ; L'intimidation d'un membre ou agent de la CPI, entrave à son action ou trafic d'influence afin de l'amener, par la contrainte ou à la persuasion, à ne pas exercer ses fonctions ou à ne pas les exercer comme il convient ; Les représailles contre un membre ou un agent de la CPI dans le cadre de ses fonctions officielles. La cour a compétence pour juger les auteurs de ces atteintes à son administration de la justice, au cas où l'auteur a agi intentionnellement (art. 70). Les États doivent ainsi coopérer avec la cour dans la répression de ces comportements.

Dans ce même ordre d'idée, les États ont aussi la possibilité d'apporter des modifications au Statut lui-même. En effet, le Statut prévoyait une conférence de révision de ses dispositions, qui devait se tenir dans un premier temps, sept années après son entrée en vigueur152(*), et ensuite à tout moment où une révision s'avèrerait nécessaire, sur convocation du Secrétaire Général des Nations Unies. Ainsi, sur proposition d'un État membre, un amendement peut être apporté au Statut par le biais de l'Assemblée des États Parties qui regroupe les États ayant ratifié le Statut.

Jusqu'ici, tout applique bien. Mais il faut dire que cette application se faire lors de l'intervention pratique des États dans les procédures engagées par les organes de la Cour.

* 147 Cf. Sassòli (M.), Droit pénal international et droit pénal interne : le cas des territoires se trouvant sous administration internationale , in ROTH R. et HENZELIN M., Le droit pénal à l'épreuve de l'internationalisation, Paris LGDJ, Genève GEORG, Bruxelles Bruylant, 2002, p. 121.

* 148 En Suisse par exemple, un service spécial appelé Service Central, a été créé pour assurer cette fonction (Cf. article 3 de la loi suisse citée à la note 124), ce qui constitue une avancée par rapport à la coopération avec les tribunaux ad hoc, qui conférait cette fonction à l'office fédéral de la justice (Cf. Arrêté fédéral relatif à la coopération avec les tribunaux internationaux chargés de poursuivre les violations graves du droit international humanitaire du 21 décembre 1995 ( RS 351.20), V. le site http://www.admin.ch/ch/f/rs/3/351.20.fr.pdf (visité le 30 mars 2015).

* 149 Cf. Henzelin (M.), «La compétence pénale universelle : une question non résolue par l'arrêt Yerodia », in Revue générale de droit international public, précité note 76, 2002, p. 833. Il est convenable d'insister ici sur la distinction qui existe entre l'obligation d'adapter la législation nationale et la souhaitable identité dans la définition des crimes dans la législation nationale avec celle du Statut. La première est une exigence du Statut tandis que la seconde n'est une manière de mettre en oeuvre cette exigence qui est laissée au libre arbitre des États parties.

* 150 Revue de droit militaire et de droit de la guerre, N° 42, Vol. 1 et 2, 2003, Bruxelles, p. 45 et Ss.

* 151 Ce sont les pays au sein desquels le droit interne et le droit international forment une source unique et sont applicables conjointement par les organes nationaux. Les règles internationales intègrent directement l'ordre juridique interne, sans une loi nationale d'insertion, dès qu'elles sont valablement acceptées. Cette thèse s'oppose à celle du dualisme. Le besoin de hiérarchiser se présente en cas de conflit entre ces deux droits. Dans ce cas la primauté peut être accordée au droit interne ou au droit international selon les systèmes. V. à ce sujet N'guyen (Q. D.), Daillier (P.) et Pellet (A.), Droit international public, Op. cit., p. 93 ; Combacau (J.) et SUR (S.), Droit international public, 6è éd., Paris, Montchrestien, p. 178.

* 152 La révision devait avoir en 2009, mais après plusieurs reports, elle a eu lieu plutôt en 2010 à Kampala. Et l'un des sujets qui était sur la table était la définition du crime d'agression comme le souligne l'article 5(2) du Statut.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry