La liberté d'opinion et le droit d'expression des travailleurs dans les entreprises au Burkina Faso( Télécharger le fichier original )par Marius WOBA ENAM - DESS 2010 |
Paragraphe II : Le droit de grèveLes relations entre travailleurs et employeur peuvent prendre un aspect conflictuel quand les partenaires sociaux ne parviennent à s'entendre, ni sur l'interprétation des normes applicable à l'entreprise, ni sur leur amélioration en vue de satisfaire leurs intérêts professionnels respectifs par la voie de la négociation collective au niveau de la branche professionnelle, l'entreprise ou l'établissement. La loi donne aux partenaires sociaux les moyens de réaliser ces objectifs en organisant un régime juridique précis favorisant le développement d'une négociation périodique sur tous les points susceptibles d'être améliorés par cette voie. La loi reconnaît également aux salariés le droit de faire la grève et permet de qualifier ce droit social de liberté publique individuelle et collective, en l'inscrivant dans les textes à valeur constitutionnelle36(*). Les travailleurs, après avoir épuisé les moyens préliminaires d'expression, sont contraints parfois d'utiliser la grève dont le régime juridique est relativement développé en droit burkinabè. A- Le régime juridique de la grèveDéfinie comme le refus collectif et concerté par tout ou parti des travailleurs d'un établissement de respecter les règles normales de travail en vue d'amener l'employeur à satisfaire leurs réclamations ou revendications37(*). La grève est un droit individuel exercé collectivement, reconnu aux salariés comme moyen collectif de lutte par le législateur, à travers lequel ceux-ci peuvent s'exprimer autrement que par la négociation. La grève suspend tout simplement la prestation contractuelle du travailleur pour faire aboutir sa prétention dans son conflit collectif. Le contrat de travail étant synallagmatique, il semble en toute logique que la suspension de la prestation de travail entraîne le non paiement du salaire. Bien que la solution soit logique, elle contient un inconvénient : pourquoi l'exercice d'un droit devrait-il être aussi coûteux pour les salariés ? L'inconvénient est plus grand lorsque les salariés ont eu recours à la grève pour revendiquer un droit déjà reconnu. Sensible sans doute à cet inconvénient la jurisprudence nuance la solution de principe. La chambre sociale de la cour de cassation française a en effet jugé que l'employeur peut être condamné à verser aux grévistes les indemnités compensant leur perte de salaire dans le cas où les salariés se sont trouvés dans une situation contraignante telle qu'ils ont été obligés de cesser le travail pour faire respecter leurs droits essentiels, directement lésés par suite d'un manquement grave et délibéré de l'employeur à ses obligations38(*). Mais la solution de principe reste qu'aucun salaire n'est dû pendant la période de grève. Le principe de l'absence de sanction de l'exercice même illégal de la grève est consacré par le législateur, à l'Art.383, code du travail de 2008 en ces termes : " La grève ne rompt pas le contrat de travail, sauf faute lourde imputable au travailleur. Constitue notamment une faute lourde, le fait pour le travailleur gréviste de s'opposer au travail d'autrui et/ou à ce que sa tâche soit effectuée par d'autres travailleurs, même ceux qui n'y sont pas habituellement affectés. Tout licenciement prononcé en violation de l'alinéa premier du présent article est nul de plein droit et le travailleur licencié dans ce cas est réintégré dans son emploi. " * 36 Art.22, Loi N° 002/97/ ADP, portant CONSTITUTION DU BURKINA FASO du 27 janvier 1997: Le droit de grève est garanti. Il s'exerce conformément aux lois en vigueur.( Chapitre IV- Des Droits et Devoirs Sociaux et Culturels) * 37Art. 382, Code du travail de 2008 : La grève est une cessation concertée et collective du travail en vue d'appuyer des revendications professionnelles et d'assurer la défense des intérêts matériels ou moraux des travailleurs. * 38 « Dans le cas où les salariés se trouvent dans une situation contraignante telle qu'ils sont obligés de cesser le travail pour faire respecter leurs droits essentiels, directement lésés par un manquement grave et délibéré de l'employeur à ses obligations, celui-ci peut être condamné à payer aux grévistes une indemnité correspondant à la perte de leur salaire ». Cass. soc. 7 juin 2006 n° 04-46664 (P) |
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