3.2.2. Revue de la littérature
Au Niger, jusqu'à cette date, il n'existe aucune
donnée sur le M-E. Seuls le programme d'études des ENI et les
documents destinés à la formation des formateurs de ces
écoles (voir MEN, 2008, 2009, 2010) en parlent. Ailleurs dans le monde,
les ouvrages foisonnent dans ce domaine et permettent un regard critique en la
matière. Mais pour des raisons d'organisation, nous nous
intéressons singulièrement aux ouvrages traitant des fondements
du M-E et de l'entraînement pédagogique pratique.
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3.2.2.1. Les fondements du M-E
Dans la recherche d'une nouvelle solution aux problèmes
de formation pratique qui utiliserait d'autres modèles que la mise en
situation concrète sur le terrain, le M-E a été construit
principalement, selon plusieurs auteurs (Allen et Ryan, 1969/1972 ; Altet et
Britten, 1983 ; Linard et Prax, 1978 ; Wagner, 1992), autour des principes
théoriques de la psychologie de l'apprentissage et de l'enseignement
programmé, de la modélisation et, de la technologie
éducative.
3.2.2.1.1. Les principes théoriques de la
psychologie de l'apprentissage et de
l'enseignement programmé
Selon Allen et Ryan, le M-E s'est inspiré de quatre
éléments de la psychologie de l'apprentissage et de
l'enseignement programmé dont le premier consiste en une prise de
conscience des besoins de l'élève, des relations
enseignant-enseignés et des conditions nécessaires au processus
d'apprentissage.
Le second élément concerne l'acquisition
graduelle des aptitudes nouvelles : « on n'apprend qu'une seule aptitude
à la fois, on ne passe à l'étude de l'aptitude suivante
que lorsqu'on a maîtrisé la précédente, on ne
cherche à combiner plusieurs aptitudes déjà
maîtrisées que dans la phase ultime de cet apprentissage »
(Allen et Ryan, 1969/1972, p. VIII).
Le troisième principe a trait au feedback. Le
quatrième et dernier élément est la prise en compte des
différences individuelles. Le formateur se fonde sur l'autocritique de
l'apprenant pour une éventuelle rémédiation : « c'est
selon le niveau atteint par l'auto-observation critique qu'il y a lieu, pour le
formateur, d'aborder avec son stagiaire tout ou partie de ce qui est
critiquable et perfectible dans la performance pédagogique de celui-ci
» (Allen et Ryan, 1969/1972, p. IX).
Quant à Altet et Britten (1983), ils ont
identifié sept principes théoriques de la psychologie de
l'apprentissage et de l'enseignement programmé sur lesquels se base le
M-E :
- La répétition du travail d'une aptitude
à acquérir pendant au moins deux séances et sa reprise
jusqu'à ce qu'elle soit acquise ;
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- La progression dans l'apprentissage, en ce sens que les
éléments d'apprentissage, décomposés et
simplifiés, sont programmés de façon progressive. Ainsi,
avec le temps, on s'efforce de travailler plus d'une aptitude à la fois
afin de recomposer la réalité complexe de l'acte
pédagogique. Certains auteurs comme Roegiers (2007) parleraient d'une
pédagogie de l'intégration ;
- Le transfert des acquis du fait que l'apprentissage est
découpé en des difficultés graduelles au lieu d'être
global ;
- La motivation des élèves à vouloir
donner le meilleur d'eux-mêmes surtout pour ceux qui ne sont pas
habitués à se voir à l'écran ;
- L'action individuelle dans la mise en pratique et
l'entraînement aux différentes aptitudes pédagogiques ;
- Le renforcement qui s'effectue au moment du feedback
grâce à l'autoscopie, à l'hétéroscopie et aux
conditions de réalisation des micro-leçons (climat de confiance)
;
- Et l'apprentissage individualisé car
l'activité peut se faire selon un mode de travail individuel et
être adaptée aux besoins de chaque élève. Perrenoud
(2000) parlerait de pédagogie différenciée.
En analysant les travaux de ces deux groupes d'auteurs (Allen
et Ryan, 1969/1972 ; Altet et Britten, 1983), l'on se rend aisément
compte qu'ils ne se contredisent pas. En réalité, Altet et
Britten ont éclaté les résultats auxquels étaient
parvenus leurs prédécesseurs. Leurs deux premiers principes ne
sont rien d'autres que le détail du deuxième principe d'Allen et
Ryan. Aussi leur troisième principe s'y rapproche-t-il puisqu'il
dépend de la décomposition de l'acte pédagogique.
Leurs deux derniers principes, eux aussi, sont l'émanation du
premier principe d'Allen et Ryan. L'un dépend des relations
enseignant-enseignés et l'autre tient compte des besoins de
l'apprenant.
Finalement, seules la motivation et l'action individuelle
constituent des éléments nouveaux dans l'ouvrage d'Altet et
Britten. Mais quoi qu'il en soit, le M-E s'est bien inspiré de
l'enseignement programmé. C'est, du moins, la conclusion à
laquelle est parvenue Linard (1985) pour qui : « fragmentation en
micro-aptitudes bien définies, action individualisée,
répétition, motivation par retour d'information (ou feedback)
immédiat sur sa propre
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performance, renforcement positif maximum et progression
organisée, sont dûment reliés à l'enseignement
programmé des années cinquante, inspirateur de la méthode
» (p. 64).
Les lignes qui suivent abordent le deuxième point des
fondements, à savoir la modélisation, un des principes de
l'apprentissage social.
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