II.4. Paysage et patrimoine
On s'intéresse au paysage suite à une
double90 demande sociale. La première, écologique, qui
s'interroge sur la qualité environnementale des paysages qu'on doit les
transmettre aux générations futures. La deuxième,
culturelle, souvent liée à la vogue du patrimoine. En 1992, on a
dépassé l'intérêt, ponctuel, des monuments
bâtis à la patrimonialisation des paysages avec l'introduction
d'une catégorie, spécifique à l'appréciation
culturelle et patrimoniale des paysages, à la liste du patrimoine
mondial de l'UNESCO. Cette catégorie a deux typologies, l'un qui
s'intéresse au paysage dans son pole naturel en appréciant la
nature géologique d'un paysage hors le temps des sociétés.
Par contre, l'autre s'intéresse aux paysages façonnés par
les sociétés en témoignant une culture et des modes
d'occupation du territoire représentatifs
88 CONAN Michel, « l'invention des identités
perdues », in. BERQUE Augustin (dir.), cinq propositions pour une
théorie de paysage, Seyssel, 1994, Champ vallon, P38.
89 Ibid. P34.
90 LEVEAU Philippe, «patrimoine, paysage et
identité », in. DUMASY-MATHIEU Françoise,
archéologie et environnement dans la méditerranée
antique, Genève, 2009, Droz, P14.
79
Le monument historique et ses abords, une
représentation paysagère de l'identité
CHAPITRE
sociale et territoriale TROISIEME
d'une culture. Le second type est appelé «les
paysages culturels» qui marquent l'indissociabilité de l'oeuvre
humaine avec son environnement naturel et illustrent l'évolution sociale
et territoriale, tout en mesurant les contraintes et les atouts
présentées par l'environnement naturel. Il s'agit d'une image
exceptionnelle d'une valeur patrimoniale.
La patrimonialisation de ces paysages consiste à la
réappropriation de la société d'une valeur perdue, tout en
acceptant de nouvelles valeurs, qui soient la valeur vénale,
scientifique et de communication91 :
· La valeur vénale
: une sorte de commercialisation du paysage, par le biais du
tourisme culturel. Le paysage devient un objet de valorisation touristique
où il peut devenir une image de marque identitaire d'une ville, d'une
région ou d'un pays, dépendamment de son exposition et de sa
notoriété.
· La valeur scientifique
: consiste à la valorisation du paysage, tout en
analysant les composants qui contribuent à sa sauvegarde. C'est comme le
paysage politique où on argumente et légitime
l'appréciation d'un paysage aux yeux d'une large partie du public. Les
sciences concernées peuvent être l'architecture, l'urbanisme,
l'archéologie ou la sociologie.
· La valeur de communication
: consiste à l'exploitation du rapport identitaire
entre la société et le paysage. Cette valeur communique le
paysage comme l'identifiant d'une société et d'un territoire, tel
le paysage des montagnes de la région Kabyle en Algérie, avec ses
petites maisons, qui communique le mode de vie sociale et identifie cette
portion du territoire comme une oeuvre représentative de cette
communauté, mais illustre, plus particulièrement, son
identité.
La patrimonialisation du paysage semble être plus
facilement médiatisée et appréciée en
parallèle à l'intérêt grandissant de la notion
d'image, qui représente l'identité sociale et territoriale. Il
est, alors, nécessaire d'étudier la représentation
identitaire issue d'une perception du patrimoine bâti, tout en analysant
la contribution de ses abords dans la production et l'appréciation de ce
genre d'image.
91 Ibid.
80
LA BASILIQUE ST-AUGUSTIN ET SES ABORDS A ANNABA
Pour une reconnaissance politique et sociale des valeurs des
abords du patrimoine bâti en Algérie
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